Près de 6,3 millions d’Ivoiriens sont attendus aux urnes, dimanche 18 décembre, pour élire aux élections législatives, en un seul tour, les 255 députés de l’Assemblée nationale ivoirienne.

Pour l’élection de la dernière législature sous la présidence d’Alassane Ouattara et deux mois et demi après l’adoption de la nouvelle Constitution, les principales formations politiques du pays sont secouées par des divisions internes. Bien qu’affaiblie, la coalition au pouvoir part favorite pour conserver sa confortable majorité parlementaire.

  • Quelle majorité pour le gouvernement ?

Favori avec près d’un candidat pour chaque circonscription, le Rassemblement des houphouétistes pour le développement et la paix (RHDP), la formation au pouvoir depuis 2011, a connu nombre de défections de personnalités dont la candidature n’avait pas été retenue. L’Union pour la Côte d’Ivoire (UPCI) et l’Union pour la démocratie et la paix en Côte d’Ivoire (UDPCI), deux partis minoritaires, dont les dirigeants ont été évincés du gouvernement après qu’ils aient fait savoir qu’ils ne satisfaisaient pas du peu de place qui leur était accordée, se sont désolidarisés de la coalition.

Des frictions sont également apparues du côté des deux principales composantes du RHDP, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), fondé par le père de l’indépendance du pays, Félix Houphouët-Boigny, et le Rassemblement des républicains (RDR) du président Ouattara. Bien qu’ils aient réussi à se mettre d’accord sur des candidatures uniques à ces législatives à un tour, le référendum constitutionnel d’octobre et les projets de fusion à moyen terme des deux partis attisent les tensions.

Résultat : plusieurs députés dissidents présentent des candidatures indépendantes dans leur circonscription et vont devoir affronter des cadres du RHDP. A Cocody, la commune huppée d’Abidjan, ce sont deux héritières qui sont en lice. D’un côté, la députée Yasmina Ouegnin, 37 ans et fille de l’ancien chef du protocole de Félix Houphouët-Boigny, en opposition avec la ligne officielle du PDCI, devra faire face à la ministre de la communication, Affoussiata Bamba, la fille de Bamba Moriféré, l’une des figures de la gauche ivoirienne. A Port-Bouët, une autre commune d’Abidjan, le bouillonnant Kouadio Konan Bertin, dit « KKB », déjà candidat dissident du PDCI lors de la présidentielle de 2015, sera notamment opposé à son ancien adjoint au sein de la jeunesse du PDCI, qui lui a reçu l’investiture du RHDP.

  • Quel poids pour l’opposition ?

De son côté, le Front populaire ivoirien (FPI), le parti fondé par l’ex-président Laurent Gbagbo, veut croire en ses chances de retour sur le devant de la scène politique après avoir boycotté les dernières législatives. La formation, malgré des moyens limités par des années de crise interne, présente 187 candidats. Parmi eux, on retrouve des poids lourds qui font leur grand retour sur la scène politique avec, à Port-Bouët, l’ancien directeur du port d’Abidjan, Marcel Gossio, ou encore l’indéboulonnable leader des jeunes du FPI, Konaté Navigué, dans le Nord.

Mais le parti à la rose reste encore divisé, deux ans après le schisme qui a vu la légitimité de son président, l’ex-premier ministre Pascal Affi NGuessan, être contestée par une vaste branche qui refuse toute participation aux institutions tant que Laurent Gbagbo, en procès à la Cour pénale internationale (CPI), ne sera pas libéré. Amputé d’une bonne partie de son électorat, le FPI aura donc fort à faire pour revenir au premier plan de la vie politique.

  • Et hors des gros partis ?

Si d’autres formations de moindre ampleur participent, comme le parti Liberté et démocratie pour la République (Lider) de l’ex-président de l’Assemblée nationale, Mamadou Koulibaly, cette élection se distingue des autres par le grand nombre d’indépendants (740), qui représentent plus de la moitié des candidats, contre un tiers seulement lors des précédentes élections, en 2011. Le mode de scrutin à un tour et le nombre important de candidats dans certaines circonscriptions pourraient morceler l’électorat et donner lieu à quelques surprises. A noter qu’on ne compte que 12 % de candidatures féminines, donc peu d’espoirs que le chiffre de 9 % de députées actuellement à l’Assemblée soit dépassé.

  • Quel avenir pour Guillaume Soro ?

Affaibli par plusieurs démêlés judiciaires depuis un an, récemment hospitalisé au Maroc et en manque d’alliés au gouvernement depuis les derniers remaniements, Guillaume Soro, président sortant de l’Assemblée nationale, compte bien rester quatre ans de plus au perchoir. Favori dans sa circonscription de Ferkessedougou, dans le nord du pays, il assure avoir « la confiance pleine et totale » du président Ouattara pour « rempiler ».

A noter cependant que son poste « au perchoir » de l’Assemblée nationale, s’il y est reconduit, sera moins stratégique. Depuis l’adoption de la nouvelle Constitution, le président de l’Assemblée n’est plus le successeur du chef de l’Etat en cas de vacance du pouvoir. C’est le vice-président, qui devrait être nommé après ces législatives.