Après Google et Apple, Margrethe Vestager monte à l’assaut d’une nouvelle forteresse : Facebook. La commissaire à la concurrence a adressé mardi 20 décembre à la star des réseaux sociaux une communication de griefs, l’accusant d’avoir fourni des informations « fausses » ou « trompeuses » dans le cadre du rachat de WhatsApp en 2014. Informations sur lesquelles la Commission s’était fondée pour autoriser l’opération.

« Les sociétés sont tenues de fournir des informations exactes à la Commission », a déclaré la commissaire danoise. De son côté, Facebook conteste les accusations de Bruxelles. « Tout au long du processus, nous avons fourni des informations précises à propos de nos capacités techniques et de nos intentions », a indiqué un porte-parole du géant du Web. L’américain « respecte le processus de la Commission » et se dit « confiant qu’un examen complet des faits confirmera qu’il a agi en bonne foi ».

La procédure ne met pas en danger l’acquisition à 22 milliards de dollars (21,16 milliards d’euros) de WhatsApp par Facebook. Néanmoins, si les reproches étaient confirmés, la Commission pourrait infliger une amende allant jusqu’à 1 % de son chiffre d’affaires, qui s’élevait à 17,9 milliards de dollars en 2015.

L’exploitation des données opérées par Facebook en cause

Au cœur des récriminations, l’exploitation des données opérées par Facebook sur ses différentes plates-formes. La Commission européenne assure qu’en 2014 le réseau social avait indiqué « qu’il n’était pas en mesure d’associer automatiquement et de manière fiable ses comptes d’utilisateurs avec ceux de WhatsApp ». Mais après réflexion, Bruxelles considère que « cette possibilité technique existait déjà en 2014 », indique la lettre officielle de la Commission.

Pour étayer son accusation, la Commission s’appuie sur les modifications opérées par Facebook en août 2016 dans la politique de confidentialité de WhatsApp, qui a permis d’associer les numéros de téléphone de ses utilisateurs aux profils des membres de sa maison mère Facebook.

En septembre, Bruxelles a d’ailleurs poussé Facebook à cesser temporairement, en novembre, le partage d’informations de WhatsApp en Europe. De fait, l’affaire avait valu à Facebook de nombreuses critiques en Europe, notamment de la part du « G29 », qui regroupe les autorités nationales de protection de données des 28 Etats membres de l’Union européenne, dont la CNIL française.

L’affaire tombe mal pour Facebook

De source proche de la société américaine, on indique qu’en 2014 le réseau social ne disposait pas de méthodes pour associer correctement l’ensemble des numéros de téléphones à ses plates-formes. Ce n’est qu’en 2016, que l’entreprise de Mark Zuckerberg s’est rapprochée de la Commission européenne afin de modifier sa politique de confidentialité. Elle cherchait en effet un moyen de comptabiliser précisément son nombre d’utilisateurs à travers ses différentes plates-formes.

Selon son entourage, le réseau social serait incapable en revanche de rendre les messageries instantanées « interopérables », autrement dit de les faire communiquer entre elles, ne serait-ce que parce que WhatsApp offre par défaut à ses utilisateurs des communications entièrement chiffrées. Or, en 2014, l’inquiétude de Bruxelles portait sur ce point précis, et non sur la simple analyse des données des utilisateurs.

L’affaire tombe mal pour Facebook qui accumule les difficultés en Europe. La société a été critiquée pour son incapacité à empêcher la circulation des « fake news » (fausses informations). L’Allemagne, par exemple ,a lancé une enquête anti-trust qui porte sur les pratiques de confidentialité de Facebook et les insuffisances de sa politique de modération face à des contenus haineux.