Mimer un animal ou un danseur sur un nuage dans le cadre d’ateliers clown-théâtre pour faire ressortir ses émotions et les analyser. S’observer marcher et prendre conscience de ce que l’on dégage. Simuler une négociation commerciale. C’est pour permettre à ses étudiants de développer leurs capacités à innover et à ­entraîner une équipe que l’Ecole nationale ­supérieure en génie des systèmes et de l’innovation (ENSGSI) a conçu, dès sa création en 1993, une formation qui accorde une large place au développement personnel.

« A une époque où les écoles d’ingénieurs ne juraient que par les “hard skills”, nous faisions figure d’ovni auprès de la Commission des titres d’ingénieurs », se souvient Valérie Rault, la ­directrice.

« A une époque où les écoles d’ingénieurs ne juraient que par les “hard skills”, nous faisions figure d’ovni auprès de la Commission des titres d’ingénieurs », se souvient Valérie Rault, la ­directrice. Au total, sur les trois années du ­cycle ingénieur, la formation aux soft skills, les compétences humaines, représente un tiers du temps de présence des étudiants.

Au programme : des cours d’animation de réunions, de négociations, de management d’équipes mais aussi des ateliers de gestion du stress, de relaxation ou encore de communication non verbale. L’objectif est d’amener les étudiants à prendre conscience de leur valeur, de leurs potentialités mais aussi de leurs limites. « A partir de là, ils peuvent se construire, remettre en question leurs représentations du monde et ainsi porter le changement », argumente Martine Tani, responsable du pôle management, projet personnel et professionnel de l’école.

Tout au long du cursus, l’accent est mis sur la pédagogie de projet et les mises en situation. « La connaissance de soi est un processus qui se base d’abord sur un vécu. Dans un premier temps, l’étudiant s’observe, puis il opère un questionnement sur sa façon d’être et de penser le monde », explique l’enseignante.

Cette démarche peut déstabiliser. Certains étudiants vont même jusqu’à refuser de s’impliquer dans les ateliers. « Nous avons beau les prévenir de la manière dont on fonctionne lors des entretiens de recrutement, ils ne s’attendent pas nécessairement à avoir à réfléchir sur eux-mêmes pour se former au management. Ils sont plutôt en attente de techniques et de recettes, reconnaît Martine Tani. Or, un cadre de haut niveau doit être capable d’aller vers l’inconnu pour innover. »

Pas de solutions clés en main

Pour aider les étudiants dans ce travail, l’école a mis en place un dispositif de coaching. « L’idée n’est pas d’apporter des solutions clés en main mais d’amener le jeune à les trouver par lui-même en lui laissant du temps. Il ­arrive un moment où il comprend le sens de la formation », commente la responsable. Pour Brunelle Marche, diplômée de l’école en 2014, le déclic est arrivé assez vite : « Au départ, j’ai été un peu surprise, d’autant que je sortais de trois années de licence à l’université. Mais en quelques semaines, j’ai vu l’intérêt d’apprendre à analyser et à surmonter mes émotions. »

Quant aux entreprises, « elles reconnaissent aux étudiants de l’ENSGSI une grande maturité émotionnelle et une réelle capacité d’ajustement à leur environnement, assure Martine Tani. Pour preuve : chaque année, plus de 60 % des étudiants de l’ENSGSI sont embauchés avant la fin de leur mission de fin d’études et 86 % occupent un emploi moins de six mois après la sortie de l’école. »

Isabelle Dautresme

Un dossier spécial pour tout savoir sur les écoles d’ingénieurs

Retrouvez notre dossier spécial dédié aux écoles d’ingénieurs, publié progressivement sur notre site (rubrique Ecoles d’ingénieurs) et dans un supplément de 12 pages publié dans « Le Monde » daté du jeudi 24 novembre, avec des décryptages, des reportages dans les écoles ainsi que des témoignages.