François Hollande et Myriam El Khomri, ministre du travail, à Taverny (Val-d’Oise), le 26 décembre. | Lionel Bonaventure / POOL / REUTERS

Editorial du « Monde ». L’Histoire a l’ironie mordante. C’est au moment où François Hollande a décidé de ne pas se représenter à l’élection présidentielle qu’il peut enfin commencer à tenir l’engagement auquel il avait conditionné, il y a plus de quatre ans, une candidature à sa propre succession : l’inversion de la courbe du chômage.

En effet, les chiffres des demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi en novembre, rendus publics lundi 26 décembre, confirment la tendance qui se dessinait depuis le printemps et qui s’est affirmée plus nettement cet automne. En novembre, le nombre de demandeurs de catégorie A, ceux qui n’ont aucune activité, s’est établi à 3 447 000 pour la France métropolitaine, soit une baisse de 31 800 en un mois, de près de 110 000 sur les trois derniers mois et de quelque 133 000 depuis le début de l’année.

Bonnes nouvelles trop rares

C’est la première fois depuis 2008, avant même la crise financière mondiale, que la décrue du chômage se confirme durant trois mois consécutifs. Le reflux est particulièrement marqué (- 9,2 %) pour les jeunes de moins de 25 ans. En outre, il est encourageant que cette dynamique positive soit confirmée par les sorties de Pôle emploi pour cause de reprise d’emploi : elles ont atteint leur plus haut niveau depuis huit ans, selon le ministère du travail. Enfin, le nombre des créations nettes d’emplois en France a augmenté de 240 000 depuis dix-huit mois.

Le cancer de ce chômage massif reste la cause première du discrédit des gouvernants et du pessimisme des Français

Lors d’un déplacement à Taverny, dans le Val-d’Oise, lundi, le président de la République a tenu à exprimer sa « satisfaction » devant ces résultats. On le comprend : en matière d’emploi, les bonnes nouvelles sont trop rares depuis 2012 pour qu’il ne marque pas le coup. C’est en septembre de cette année-là, trois mois après son élection, qu’il avait annoncé l’inversion de la courbe du chômage avant la fin 2013. Cette promesse tardant à se réaliser, il avait lié son sort à cette trop fameuse courbe, en avril 2014 : « Si le chômage ne baisse pas d’ici à 2017, je n’ai aucune raison d’être candidat, ou aucune chance d’être réélu. » On sait ce qu’il en a été jusqu’à ces derniers mois : une crue sans fin, des records à la hausse battus chaque mois ou presque et le crédit de la parole présidentielle en berne, quelle que soit sa détermination.

Un pays malade

Echaudé par tant d’attentes déçues, le chef de l’Etat s’est d’ailleurs montré prudent. S’il a salué l’effort « engagé », il a précisé que le travail n’est pas encore « accompli », car « rien n’est joué ». Et pour cause. Si la décrue des chômeurs de catégorie A est significative, leur nombre cumulé avec celui des catégories B et C (les personnes en activité réduite tenues de rechercher un emploi) a continué à progresser légèrement : il s’établit à 5 475 000, en hausse de 0,5 % en un an pour la France métropolitaine et à 6 238 000 pour la France entière. En outre, le vaste plan de formation mis en œuvre pour les demandeurs d’emploi depuis le début de l’année a effectivement contribué à dégonfler le nombre des chômeurs de catégories A, B et C.

Enfin, et surtout, l’amélioration actuelle ne saurait faire oublier qu’un pays dont près de 10 % de la population active est sans emploi, et ce depuis une huitaine d’années, est un pays malade. Le cancer de ce chômage massif reste la cause première du discrédit des gouvernants et du pessimisme des Français. Quoi qu’il en dise, c’est aussi pour cette raison que François Hollande a renoncé à se représenter : l’embellie de ces derniers mois n’aurait pas effacé, en ce domaine, l’échec du quinquennat.