Sevil Shhaideh était pressentie pour devenir première ministre, mais le président roumain a mis son veto. | © Inquam Photos / Reuters / REUTERS

Le président roumain, Klaus Iohannis, a refusé, mardi 27 décembre, de nommer au poste de premier ministre la candidate des sociaux-démocrates, dont la victoire aux récentes élections législatives tourne à l’affrontement politique avec le chef de l’Etat.

Le Parti social-démocrate (PSD), vainqueur des législatives du 11 décembre, avait désigné la semaine dernière, pour prendre la tête de l’exécutif, Sevil Shhaideh, issue de la petite minorité turque de Roumanie. Elle serait ainsi devenue la première femme musulmane à gouverner un pays de l’UE.

Mais le président de centre droit a opposé une fin de non-recevoir à ce choix surprise : « J’ai bien analysé les arguments pour et contre et j’ai décidé de ne pas accepter cette proposition », a-t-il annoncé.

Il n’a pas expliqué son refus mais l’ancrage politique de l’époux de Mme Shhaideh, un Syrien ayant émigré en Roumanie en 2011, pourrait être en cause. Les liens politiques de M. Shhaideh ont fait l’objet de nombreuses spéculations ces derniers jours. Selon une enquête du site d’investigation Rise Project, il aurait à plusieurs reprises affiché son soutien au président syrien, Bachar Al-Assad, et au Hezbollah libanais, allié du régime de Damas.

L’opposition avait dit par ailleurs craindre que Mme Shhaideh soit la femme « de paille » du chef du PSD, Liviu Dragnea, qui avait été son témoin de mariage mais qui, surtout, avait renoncé à briguer le poste de premier ministre en raison d’une condamnation à deux ans de prison avec sursis pour fraude électorale qui le rend inéligible à toute fonction ministérielle.

Le PSD envisage un recours

M. Iohannis a demandé aux sociaux-démocrates et à l’Alde, leur petit allié libéral, de « faire une autre proposition ». Le chef du PSD, Liviu Dragnea, a accusé le président de « vouloir déclencher à tout prix une crise politique ».

Son parti examinera différentes options parmi lesquelles une procédure de suspension du président ou un recours devant la Cour constitutionnelle dans l’espoir qu’elle oblige M. Iohannis à désigner Mme Shhaideh, a-t-il indiqué. « S’il apparaît qu’il est dans l’intérêt du pays de suspendre M. Iohannis, je n’aurai aucune hésitation à le faire », a affirmé M. Dragnea. Selon l’analyste politique Andrei Taranu, le PSD ne dispose toutefois d’aucun argument solide pour accuser le chef de l’Etat d’avoir violé la Constitution.

Des questions demeurent quant aux raisons qui ont poussé le président à faire barrage à la candidate du PSD. Si l’appartenance religieuse de Mme Shhaideh ne faisait pas débat dans ce pays dont la population est très majoritairement orthodoxe, son manque d’expérience politique avait été mis en cause par l’opposition. Sevil Shhaideh a eu pour seules responsabilités un portefeuille de ministre du développement pendant cinq mois en 2015.