Le 12 septembre 1940, près de Montignac en Dordogne, Simon Coencas, 13 ans, découvrait avec trois camarades l’une des plus importantes grottes ornées du paléolithique : Lascaux. Soixante-seize ans plus tard, l’homme contemple la voûte de la salle des Taureaux du fac-similé de la fameuse grotte. Il aura fallu trois ans pour reproduire la copie parfaite de l’intégralité des œuvres que l’homme de Cro-Magnon y a réalisées, il y a 17 000 ans. Quelque six cents animaux, quatre cents signes (bâtonnets, points, signes rectangulaires) ont été peints dans une réplique de la grotte, une pièce hybride de 240 mètres de long, composée de végétal, de béton, de fer et de résine, qui se trouve au cœur d’un musée, le Centre international de l’art pariétal, bâtiment de 8 500 m2 dont la forme se confond avec la colline à laquelle il est adossé.

"LASCAUX IV: UN DEFI TECHNOLOGIQUE" BA
Durée : 00:41

Le documentaire Lascaux IV : un défi technologique raconte l’aventure architecturale et artistique qu’ont vécue les cent cinquante personnes mobilisées sur ce chantier monumental. D’emblée, le film joue sur le fil d’un faux suspense : « Parviendront-ils à tenir les délais et surtout à transmettre la magie de Lascaux ? », interroge le narrateur. Ce parti pris n’est pas gênant, tant les intervenants sont passionnants. Au fil des explications des « préhistologues », géoarchéologues, minéralogistes, on comprend pourquoi la préhistoire est l’une des disciplines scientifiques les plus dynamiques.

Première visite de la reproduction de la grotte de Lascaux désormais ouverte au public, à Montignac (Dordogne), le 15 décembre. | MEHDI FEDOUACH / AFP

Les réalisateurs ont également suivi les trente-quatre sculpteurs, peintres, décorateurs de théâtre et de cinéma, restaurateurs de l’Atelier des fac-similés du Périgord (AFSP) qui ont réalisé les 900 m2 décorés de la grotte. Admiratifs du travail de leurs lointains aînés, les artistes expliquent comment ils ont utilisé des pigments naturels – oxyde de manganèse pour le noir et oxyde de fer pour les ocres, les jaunes et les rouges –, appliqués au pinceau ou par projection à l’aide d’un tube pour recréer l’effet soufflé que maîtrisait l’artiste de la préhistoire. Quelque 50 000 photographies prises en très haute définition leur ont servi de modèle.

« Voile de pierre »

Contrairement à Lascaux II, copie partielle de la grotte réalisée d’un seul bloc à l’intérieur d’une cavité entre 1972 et 1983, le nouveau fac-similé est constitué d’une multitude de morceaux de parois, en polystyrène, qui ont été assemblés à l’aide de clés et d’encoches. Ils ont ensuite été recouverts de couches d’élastomère, puis d’une structure rigide en fibre de verre, un « voile de pierre » afin de reproduire à l’exact l’aspect de la grotte originale qui a été scannée en 3D.

Les fresques ont dû être transférées à bord d’un camion, de l’AFSP au Centre international d’art pariétal, situé à 1 km. Il convenait enfin de reconstituer l’éboulis protecteur qui formait l’entrée de la grotte. En 1947, cette zone avait été détruite pour permettre l’accès du public. Des sculpteurs l’ont reproduite à partir de photographies d’époque et de témoignages écrits. Sans l’aide de la 3D, cette fois !

Le film n’oublie pas de revenir sur les conditions de formation des grottes dans la vallée de la Vézère, les particularités minérales de la grotte de Lascaux, les fresques symboliques peintes par l’homme de Cro-Magnon, la découverte de la grotte en 1940, le succès touristique dans les années 1950, avant la fermeture en 1963. Autant d’allers-retours entre passés et présent nécessaires pour comprendre ce qui fait la magie de Lascaux.

Lascaux IV : un défi technologique, de David Lefort, Charles-Henri Georget (Fr., 2015, 90 min).