Délestée de la frénésie des prix littéraires mais presque aussi fournie que la rentrée de septembre – 517 romans attendus cet hiver contre 559 en automne –, la « petite rentrée » de janvier sera l’occasion de découvrir de nouvelles plumes issues du continent africain et des Caraïbes.

Une autre histoire américaine

En septembre, Imbolo Mbue, écrivaine camerounaise installée à New York, publiait en France son premier roman, Voici venir les rêveurs (Belfond). Au cœur d’une intense bataille entre groupes éditoriaux, le manuscrit de cette jeune femme, qui n’avait jamais rien publié, a été acheté un million de dollars à la foire du livre de Francfort en 2014.

Romancière d’origine ghanéenne, Yaa Gyasi, 27 ans, a connu le même succès avec son premier roman. Evénement de la foire du livre de Londres en 2015, Homegoing a été acheté à trois millions de dollars par l’éditeur new-yorkais Knopf. Encensée par la critique outre-Atlantique, présentée par le magazine Vogue comme un écrivain qui renouvelle le grand roman américain, Yaa Gyasi fait preuve d’un talent de conteuse et d’une ambition indéniable dans cette saga entêtante. Sur trois siècles, de Cape Coast à Baltimore, en passant par les plantations du Sud et Harlem, elle nous raconte l’histoire d’une famille emportée par la traite négrière, qui connaîtra la colonisation puis l’indépendance en Afrique, l’esclavage, la ségrégation et le racisme aux Etats-Unis. Traduit en France sous le titre No Home (éditions Calmann-lévy), le livre sera en librairie le 4 janvier.

Calmann-Levy

Sur les ruines du régime de Kadhafi

Egalement très attendu en janvier, le récit d’Hisham Matar, La terre qui les sépare (Gallimard). Il y revient sur le destin de son père, opposant au régime de Kadhafi. Né à New York, où son père était venu travailler pour la délégation libyenne aux Nations unies, Hisham Matar a vécu quelques années à Tripoli avant de devoir s’exiler en Egypte en 1979 quand son père est persécuté par le régime de Kadhafi. En 1990, alors qu’Hisham Matar fait ses études à Londres, son père est enlevé au Caire. Il ne le reverra plus jamais. Vingt-et-un ans plus tard, lors de la chute de Kadhafi, les prisons du régime sont vidées par le peuple mais son père est introuvable. Que lui est-il arrivé ? L’écrivain rentre au pays après trente ans d’exil et mène l’enquête. Hisham Matar signe un récit poignant, sur la perte et le coût de l’engagement politique, ainsi qu’un portrait très documenté sur la Libye contemporaine.

Gallimard

Ta-Nehisi Coates retourne en enfance

L’auteur d’Une colère noire (National Book Award 2015) Ta-Nehisi Coates raconte dans Le Grand Combat (Autrement) son enfance dans les années 1980 et les quartiers pauvres de West Baltimore et comment il a échappé à un destin tout tracé grâce à la littérature.

Autrement

Autre titre fort venu des Etats-Unis, les Confessions de Nat Turner (Allia). A la tête d’une sanglante révolte d’esclaves en Virginie, en 1831, Nat Turner en raconte la genèse à un avocat venu lui rendre visite dans le couloir de la mort. Publiées après son exécution, en novembre 1831, ses Confessions n’avaient jamais été traduites en français. L’histoire de Nat Turner a inspiré un film, The Birth of a Nation, qui sortira en salles en 2017.

THE BIRTH OF A NATION Bande Annonce (2016)
Durée : 01:51

Le grand retour d’Emmanuel Dongala

La petite rentrée d’hiver sera aussi l’occasion de retrouver Emmanuel Dongala avec La Sonate à Bridgetower (Actes sud). Dans ce roman d’apprentissage, itinéraire d’un jeune violoniste prodige et de son père, un Noir de la Barbade, de Vienne à Paris en passant par Londres, à la fin du XVIIe siècle, l’écrivain congolais révèle la condition méconnue des Noirs dans l’Europe des Lumières.

Enfin, on notera en janvier un nouveau livre d’Abdellah Taïa, Celui qui est digne d’être aimé (Seuil), L’appel de la lune (Gallimard), le premier roman du chercheur et écrivain sénégalais Tidiane N’Diaye, auteur du Génocide voilé (Gallimard, 2008), brillant essai sur la traite arabo-négrière ainsi que Rapatriés, le premier roman prometteur du jeune écrivain Néhémy Pierre-Dahomey sur le destin des boat people de Haïti.

Actes sud