La participation sera-t-elle plus élevée que lors du précédent scrutin, qui eut lieu fin 2012 ? C’est l’une des grandes inconnues des élections dans les très petites entreprises (TPE), dont le coup d’envoi a été donné, vendredi 30 décembre. Le vote, qui s’effectue par correspondance ou par Internet, dure jusqu’au 13 janvier en métropole (et cesse une semaine après, en outre-mer, s’agissant des suffrages envoyés par courrier). Peuvent s’exprimer quelque 4,5 millions de personnes travaillant pour un particulier employeur ou dans une société de moins de onze salariés. Une douzaine d’organisations sont en lice, au niveau national interprofessionnel ; s’y ajoutent celles qui ne concourent que dans certaines régions ou professions (soit, au total, une trentaine d’organisations).

Il y a quatre ans, l’abstention avait été massive : près de 90 % ! Elle pourrait l’être de nouveau, cette fois-ci, compte tenu des péripéties qui se sont produites. Initialement, les élections auraient dû avoir avoir lieu du 28 novembre au 12 décembre 2016. Mais le gouvernement les a repoussées, à cause d’une action en justice de la CGT contre la participation au scrutin du Syndicat des travailleurs corses (recours que la centrale de Philippe Martinez a d’ailleurs perdu). Le report du vote risque de brouiller l’esprit de nombreux électeurs, d’autant plus que les professions de foi des syndicats mentionnent les anciennes dates du scrutin. Cela risue de n’être guère propice à l’expression des suffrages : « Avant le réveillon, je vote FO. Après, je risque d’oublier… », a plaisanté sur Twitter Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de Force ouvrière.

Les enjeux sont pourtant loin d’être anodins. Le scrutin dans les TPE, tout comme ceux dans les entreprises de plus grande taille, s’inscrit dans le processus destiné à mesurer l’audience des syndicats. Il permet aux salariés de voter pour l’organisation qui les représentera au niveau des branches et à l’échelon national. Il leur donne aussi la possibilité d’opter pour des représentants dans les commissions paritaires régionales : mises en place à partir de juillet prochain, celles-ci serviront d’espace de concertation entre travailleurs et patrons de TPE ; elles pourront aussi contribuer à résoudre des litiges. Enfin, les suffrages sont pris en compte dans la désignation de conseillers prud’hommes.

Mais il n’est pas sûr que l’objet de ces instances soit clair dans l’esprit de tous. En outre, les élections se déroulent sur sigle, avec, toutefois, la possibilité pour les organisations en lice de présenter une liste nominative : « Vous ne savez (…) pas exactement pour qui vous votez, relève Dominique Andolfatto, professeur de sciences politiques à l’université de Bourgogne, dans un entretien à Atlantico.fr. Vous devez simplement départager des organisations syndicales que vous ne connaissez pas nécessairement bien et qui ne sont pas implantées dans votre entreprise. » Ce qui n’est guère motivant.

Moins d’un point sépare CFDT et CGT

Lundi 2 janvier, la ministre du travail, Myriam El Khomri, devait se rendre à Chambray-lès-Tours (Indre-et-Loire) dans un salon de coiffure, pour y rencontrer des salariés invités à se prononcer dans le cadre du scrutin.

En 2012, la CGT était arrivée très largement en tête des élections dans les TPE, avec 29,54 % des suffrages, devant la CFDT (19,26 %) et FO (15,25 %). Derrière, il y avait l’UNSA (7,35 %), la CFTC (6,53 %) et Solidaires (4,75 %). Toute la question, maintenant, est de savoir si la centrale de Philippe Martinez maintiendra sa domination. Elle espère, en tout cas, tirer parti de son opposition résolue à la loi travail, en 2016.

Les résultats seront proclamés le 3 février. En mars, ils seront additionnés à ceux des élections dans les autres entreprises, de début 2013 à fin 2016 ; on connaîtra alors la représentativité de chaque organisation syndicale. L’ambition de la CFDT est de déloger la CGT de sa position de numéro un ; moins d’un point les sépare.