Des citoyens attendent pour s’inscrire sur les listes électorales, à Montpellier, le 28 décembre 2016. | PASCAL GUYOT / AFP

Ils ont été 660 000 à s’inscrire en ligne sur les listes électorales françaises en 2016. Une augmentation de 180 % par rapport à l’année 2011, a indiqué, lundi 2 janvier, la Direction de l’information légale et administrative.

Parmi ces (futurs) électeurs se dégagent des profils divers. Réinscription après un temps de retrait de la vie politique ou première inscription après 40 ans… Pour quelles raisons certains électeurs ont-ils décidé de passer le cap du vote pour l’élection présidentielle des 23 avril et 7 mai ? Nous avons posé la question aux lecteurs du Monde.

Inscription facilitée en ligne

  • Amaury C., 25 ans, Lyon, ingénieur en informatique

« Habituellement inscrit sur la liste du village de mes parents, une pub sur Internet m’a motivé à m’inscrire en ligne. Simple et rapide, la dématérialisation des services de l’Etat fait plaisir. »

  • Suvathana C., 29 ans, Bruxelles, responsable conformité

« J’habite à Bruxelles et je me suis inscrit pour la première fois via le registre des Français établis hors de France. Tout se fait en ligne. Cela m’a pris dix minutes et j’ai eu la confirmation dans la journée. »

  • Marion D., 27 ans, Bordeaux, commerciale export

« Le système n’est pas très adapté : j’ai déménagé dix fois en dix ans pour mes études, stages, premier emploi. Le fameux justificatif de domicile devient une galère, pas adapté à la mobilité croissante de notre génération. Aujourd’hui, nous faisons tout en ligne, alors pourquoi ne pas voter en ligne ? Jusque-là, la politique n’était pas une priorité. Mais quand j’ai vu qu’autour de moi, des gens qui étaient depuis toujours inscrits sur les listes n’iraient pas voter cette année, par refus du système, j’ai estimé qu’il était important d’y aller. »

Naturalisation

  • Muhammad A.-W., 24 ans, Courbevoie, doctorant

« J’ai acquis la nationalité française il y a peu, en août 2016. (…) Le vote doit être un devoir, c’est en tout cas comme ça que je le perçois. C’est important de choisir celui ou celle qui dirigera le pays. J’attends ce moment impatiemment et j’attends surtout de voir les candidats à l’élection présidentielle. »

  • Tarek H., 35 ans, Toulouse, ingénieur

« Je suis naturalisé depuis 2013, et cette année je m’inscris pour la première fois sur les listes électorales. Je vote parce que je tiens aux valeurs françaises. Ce n’est pas poétique ou parfait mais je trouve que c’est un beau pays qui, comme un adolescent, se cherche et s’idéalise. »

  • Andrei C., 36 ans

« Début décembre, mon épouse et moi avons été notifiés de l’acquisition de la nationalité. Même si on a déjà voté en tant que citoyens européens, nous nous sommes inscrits tout de suite. En plus de voter pour l’élection la plus importante de la République, les temps sont graves au sein de l’Union européenne et dans le monde. On espère un soulèvement des gens rationnels, en réaction au Brexit et à Trump. »

Réaction contre les extrêmes en France et dans le monde

  • Antoine P., 25 ans, Lisbonne, banque et services financiers

« Je me sens plus concerné par les orientations politiques de mon pays pour plusieurs raisons : le contexte politico-économique ; la volonté de voir enfin des réformes structurelles et passer outre le scepticisme grandissant de l’électorat (…) Et la montée de l’extrême droite – éviter un scénario identique aux élections américaines. Nous avons pu voir que les sondages restent des estimations et que le fait de se mobiliser permet d’éviter des surprises. »

  • Manon L., 25 ans, agent CAF

« Je travaille à la Caisse d’allocations familiales. Les propos racistes sont devenus monnaie courante, et sont prétextes à beaucoup de mécontentements. C’est toujours “la faute des étrangers si on a droit à rien”. Des “vivement 2017” à tendances pro FN… alors, pour 2017, je me suis inscrite sur les listes électorales. Et oui ! Je ne voterai ni pour la gauche ni pour la droite cette année. Je lance un bulletin SOS anti-extrême droite. Parce qu’on en est là, “nous”, le petit peuple : nous votons par dépit. »

  • Kevin S., 27 ans, Strasbourg/Paris, développeur Web

« Cela fait des années que je ne vote pas, c’est lié à une déconnexion des politiques actuellement en place. (…) Cette année, et notamment en réaction à l’élection de Donald Trump, j’ai réalisé que si une des options que je qualifie de dangereuse venait à passer, (…) beaucoup auraient à y perdre — je pense à Marine Le Pen, pour ne citer qu’elle. J’ai préféré légitimer une option peu satisfaisante plutôt que de laisser champ libre à une option complètement insatisfaisante. »

  • Ilan T., 24 ans, Ivry-sur-Seine, doctorant en biologie

« J’ai toujours été inscrit dans la ville de résidence de mes parents ce qui me poussait plutôt à l’abstention pour des raisons pratiques. Le vote en faveur du Brexit et l’élection de Donald Trump ont constitué le déclic. Je me suis dit qu’il fallait impérativement voter en 2017 pour faire barrage à Marine Le Pen qui a finalement des chances d’accéder au pouvoir. J’ai constaté aussi une mobilisation sur Facebook d’amis qui partageaient le lien pour s’inscrire en ligne. Cela m’a pris cinq minutes et je me suis senti assez stupide de ne pas l’avoir fait plus tôt… »

  • Olivier D., 46 ans, Nanterre, cadre développement durable

« J’ai 46 ans et en octobre 2016, pour la première fois, j’ai demandé une carte d’électeur. (…) J’ai pleinement conscience de cette tendance lourde d’une montée de l’extrémisme dans le monde mais aussi en France, et cela m’inquiète. Je me suis donc décidé à passer le pas. »