Dans les rues de New York, en octobre 2016. | SPENCER PLATT / AFP

Les créations d’emploi aux États-Unis ont nettement ralenti en décembre, mais le marché de l’emploi américain reste toutefois dynamique. La première économie du monde a ainsi créé le mois dernier 156 000 emplois, selon les chiffres publiés, vendredi 6 janvier, par le Département du travail. C’est une déception par rapport aux anticipations des économistes qui s’attendaient à 175 000 créations. Le taux de chômage, lui est reparti légèrement à la hausse à 4,7 %, soit 0,1 point de plus qu’en novembre.

Même si les statistiques publiées vendredi marquent un net ralentissement par rapport à celles du mois de novembre (204 000 emplois créés, soit 26 000 de plus que la première estimation), l’ère Obama se termine sur un bilan du marché du travail globalement positif. Avec 75 mois consécutifs de créations d’emploi, le président américain, qui doit passer le relais le 20 janvier à son successeur, Donald Trump, aura connu la plus longue série en la matière depuis 1939.

Incontestablement positif sur le plan quantitatif, le bilan de M.Obama est plus contestable sur le plan qualitatif, même si, de ce point de vue, les chiffres de décembre marquent une légère amélioration.

Sur le plan quantitatif, 2016 s’est achevée sur la création de 2,2 millions d’emplois. Il s’agit tout de même de la moins bonne performance depuis 2011. L’économie américaine a ainsi créé en moyenne chaque mois 180 000 emplois, soit un niveau nettement inférieur à celui de 2015 (225 000) et de 2014 (248 000), qui avait constitué le meilleur millésime depuis la fin des années 1990, alors que Bill Clinton était président. Pour mémoire, en décembre 2008, à la veille de l’investiture de M.Obama, le nombre de chômeurs avait explosé de 632 000, soit 7,2 % de la population active avant d’atteindre les 10 % en octobre 2009.

Frustration de la population

Au-delà de cette résorption spectaculaire du nombre de sans-emploi, obtenue en partie grâce au soutien de la Réserve fédérale (Fed), qui a injecté des milliards de dollars de liquidités et maintenu ses taux d’intérêts proches de zéro pendant près de six ans, sur le plan qualitatif, le marché du travail n’est pas vraiment revenu à la normale. Les huit dernières années auront en effet été marquées par des salaires, qui ont fait du quasi-surplace, malgré la baisse continue du taux de chômage. Cette situation a entretenu la frustration d’une partie non négligeable de la population, qui a exprimé son mécontentement en votant pour Donald Trump.

Décembre a malgré tout été marqué par une inflexion bienvenue avec une progression du salaire horaire sur un an de 2,9 %. Ce rythme n’avait plus été atteint depuis sept ans et est à comparer avec les 2,5 % enregistrés en novembre. La tendance ne devrait pas fléchir sur les prochains mois dans la mesure où pas moins de 19 États fédérés ont augmenté le 1er janvier le salaire minimum. Toutefois le rebond du mois dernier ne doit pas faire oublier que les salaires des non-cadres n’ont jamais aussi peu augmenté depuis plusieurs décennies. L’une des raisons de ce phénomène est à chercher du côté de la productivité aux États-Unis, qui a fait du surplace en 2016

Toujours sur le plan qualitatif, on notera également que le nombre d’emplois à temps partiel subis reste encore très au-dessus de son niveau d’avant crise. Le taux de chômage qui prend en compte ces salariés qui ont un emploi à temps partiel, mais qui voudraient retrouver un plein-temps a certes reculé de 0,1 point en décembre à 9,2 %, mais le chiffre était en moyenne de 8,5 % avant la crise financière de 2008.

Importantes disparités

Autre paramètre, qui illustre la relative faiblesse du marché de l’emploi : le taux de participation. Celui-ci comprend le nombre total d’Américains qui ont un emploi ou qui en recherchent effectivement un. Or ce taux de participation reste toujours à un niveau très bas, jamais vu depuis les années 1970, à 62,7 %. Il s’agit d’une amélioration de 0,1 point par rapport à novembre. C’est ce qui explique en grande partie la légère dégradation du chômage : moins de gens sont découragés de chercher un travail à la hauteur de leurs compétences et de leurs exigences en termes de salaires et viennent donc gonfler les statistiques des chercheurs d’emploi, qui sont désormais 7,5 millions.

Enfin, si l’on regarde les créations d’emploi par secteur, on constate que ce sont majoritairement les postes les moins bien payés qui constituent l’essentiel de la hausse. C’est le cas de la restauration (30 000 créations) ou encore du secteur social (20 000). Le secteur industriel, qui a souffert ces derniers mois, retrouve un peu d’allant avec 17 000 créations, même si les entreprises du secteur énergétique ont continué à détruire de l’emploi (à hauteur de 2000 postes).

M. Trump hérite donc d’un marché de l’emploi solide, mais qui est caractérisé par d’importantes disparités suivant le niveau de diplôme et les qualifications, tandis que nombre d’emplois bien payés, notamment dans l’industrie, continuent de disparaître.