Les calottes polaires sont sans doute les zones de notre planète où les conséquences du réchauffement du climat sont les plus manifestes. Alors qu’au nord, la taille de la banquise arctique a fortement reculé en 2016 à cause de records de températures (jusqu’à 20 °C supérieures aux normales de saison), au sud, l’ouest de l’Antarctique est continuellement déstabilisé par la fonte des barrières de glace flottantes.

Larsen est l’une de ces barrières glacées menacée de disparition. Une crevasse géante y progresse depuis plusieurs années, précisément dans sa partie « C » et menace de détacher une partie importante du bloc de glace de la barrière.

Un futur iceberg aussi gros qu’un département français

La faille est apparue en novembre 2011 et ne dépassait pas la dizaine de kilomètres de longueur jusqu’à l’été austral 2014. Depuis, elle a surtout progressé par à-coups, à trois reprises : en 2014, en mai-juin 2016, puis en décembre 2016, où la faille a désormais atteint 90 kilomètres de longueur et s’est élargie jusqu’à mesurer près de 500 mètres de largeur.

La progression de la faille dans la barrière de glace Larsen C (péninsule Antarctique) depuis novembre 2010. | MIDAS Project / Adrian Luckman, Swansea University

Seuls vingt kilomètres séparent désormais celle-ci de l’océan. Les scientifiques estiment que ce bloc de glace de plus de 5 000 km² devrait se détacher du reste de la barrière de Larsen dans les prochains mois.

Pour bien réaliser la taille de ce probable futur iceberg, nous vous proposons de la comparer à la superficie de votre département.

Sélectionnez votre département : 

Nom du département

Superficie :  km2

Iceberg de Larsen C

Superficie : 5 000 km2

La crainte d’une désintégration totale du Larsen C

Les barrières de glace (ou ice shelves en anglais) sont de grandes surfaces de banquise flottant sur les eaux de l’océan Antarctique et forment la prolongation de la glace continentale sur la mer. Ces glaces flottantes, dont l’épaisseur peut atteindre plusieurs centaines de mètres, jouent un rôle crucial dans la stabilité des glaciers continentaux. Leur masse permet de retenir la glace posée sur le continent qui, sans elles, glisserait naturellement vers l’océan, où elle fondrait.

Les barrières de glace empêchent de facto la fonte de milliers de kilomètres cubes de glace qui pourrait contribuer à une importante augmentation du niveau des océans.

Le détachement imminent de ces 5 000 km² de glace, ce qui représente plus de 10 % de la surface de Larsen C, pourrait gravement déstabiliser la barrière tout entière. Adrian Luckman, glaciologue à l’université de Swansea (Pays de Galles) et responsable du projet Midas, qui surveille la faille par satellite, estime que la barrière risque à terme de disparaître totalement. Comme Larsen B, une barrière voisine qui s’est désintégrée en 2002 en l’espace de trois mois, à la suite de la perte progressive de ses glaces.

La désintégration spectaculaire de Larsen B a provoqué une accélération de la fonte des glaciers qu’elle retenait, certains fondant jusqu’à huit fois plus vite qu’avant.

Une étude publiée en février 2016 dans la revue Nature a estimé, pour la première fois, la part des barrières glacées qui soutenait directement le poids des glaciers continentaux et – a contrario – la part de la glace dite « passive », c’est-à-dire la glace qui n’est pas directement nécessaire à la retenue de la glace du continent. Selon cette étude, la majeure partie de la glace du Larsen C qui est sur le point de se détacher est justement cette glace passive. Il est donc peu probable que la perte de cette glace entraîne des effets immédiats sur la stabilité de l’ensemble.

La barrière Larsen C est composé de 10,6% de glace « passive » selon une étude publiée en 2016. Les 5 000 km² menacés de se détacher enlèveraient une grande partie de cette glace passive, rendant la barrière très vulnérable. | Fürst et al. (2016)

A l’échelle de l’Antarctique, les auteurs de l’étude estiment que cette « barrière de sécurité » représente 13,4 % de la surface des barrières de glace. Plus une barrière possède une part importante de glace passive (en bleu), plus elle est stable et résistante. A l’inverse, plus elle est composée de glace faisant office de « murs porteurs », plus elle est vulnérable face au changement climatique. On dénombre actuellement sept barrières dont le taux de glace passive est inférieur à 5 %.

La proportion de glace passive au sein des barrières de glace du continent Antarctique. La glace passive est représentée en bleu, la glace « porteuse » en jaune. | Fürst et al. (2016)