Documentaire sur Histoire à 21 h 50

Michel Deon, photographié chez lui en mai 2008 | JEAN LUC BERTINI / PASCO

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, alors que Sartre expose dans Qu’est-ce que la littérature ? (1948) sa théorie de l’écrivain engagé – proclamant que « l’art pour l’art est un appel stérile à la liberté » -, une poignée d’écrivains d’à peine 30 ans sort du rang, « bien décidés à écrire pour eux-mêmes, et non sous la férule d’un maître d’école ». Ainsi que le relate Michel Déon, qui était jusqu’à peu – il est mort le 28 décembre – le dernier survivant d’une bande constituée, au hasard des amitiés, par Roger Nimier, Jacques Laurent et Antoine Blondin.

Le goût de la provocation

Dans ce contexte très idéologique, ces trublions de droite, qui « renouent avec la grande tradition du roman français », selon l’éditeur Bernard de Fallois, irritent par leurs écrits souvent allègres, leur désinvolture, par leur goût de la fête, de la provocation et leur admiration pour des écrivains proscrits tels Morand, Céline, Giono, Montherlant, Chardonne, qu’ils vont s’évertuer à sortir de l’oubli.

Les revues littéraires sont alors le théâtre de batailles où l’on s’étrille et se répond à coups de pamphlets. L’un d’entre eux, signé en 1952 par Bernard Frank, dans Les Temps modernes, de Sartre, et visant ces écrivains « fascistes », va, sans le vouloir, en les baptisant de hussards – terme du reste que certains rejetteront –, les légitimer et leur permettre de passer à la postérité.

Michel Déon "Un taxi mauve" | Archive INA
Durée : 09:51

Sans doute est-ce là l’un des petits griefs que l’on peut faire au film d’Eric Deroo et Charles Thimon, qui se concentre un peu trop sur ce quatuor, oubliant ceux qui s’y rattachèrent plus ou moins comme Kléber Haedens, Stephen Hecquet ou François Nourissier.

De même, si la mort brutale de l’étincelant Nimier, en 1962, leur « chef de file », ainsi que l’émergence du Nouveau Roman marquent une rupture, les œuvres de ces mousquetaires vont continuer à rayonner jusqu’à aujourd’hui. Et un certain esprit « hussard » continuer à souffler grâce à de fines lames telles qu’Eric Neuhoff ou Yann Moix.

Leur après-guerre ou le roman des Hussards, d’Eric Deroo et Charles Thimon (Fr., 2015, 70 min).