Jordan Faucher est franco-algérien. Et c’est en Israël, au Maccabi Herzliya (division 2) que ce jeune attaquant de 25 ans empile les buts avec déjà 14 cette saison, une réussite qui pourrait lui ouvrir les portes de la sélection algérienne que son oncle, Fathi Chebel, a fréquentée. Et un jour disputer la CAN.

Sa réussite actuelle, qui fait de lui le meilleur buteur de la ligue 2 israélienne, confirme celle de la saison dernière, quand il avait déjà affolé les compteurs avec 24 buts. Cet hiver, il a été approché par plusieurs clubs israéliens de ligue 1, dont l’Hapoël Kiryat Shmona, et commence à susciter un certain intérêt auprès de formations françaises de ligue 1 pour la saison 2017-2018, puisque Jordan Faucher sera libre le 30 juin. « Un retour en France ? Cela me plairait et ce serait une progression pour ma carrière. Il n’y a pas encore de propositions mais je sais qu’on m’observe. Peut-être qu’il y aura plus de chances d’être appelé par l’Algérie, que je vais suivre de près lors de la CAN. Une compétition que j’aimerais jouer un jour ! »

Il y a quatre ans, alors qu’il pointait le bout de son nez à Tours (ligue 2), Jordan Faucher avait été contacté par la Fédération algérienne de football (FAF), informée que l’attaquant né à Créteil possédait la double nationalité. « Mon père est français, ma mère est originaire de Constantine. J’ai les deux passeports, et l’Algérie était venue aux renseignements. Tout comme la fédération française, d’ailleurs, pour ses sélections de jeunes. Mais je m’étais blessé et je n’ai plus eu de nouvelles depuis », explique le joueur. « Si l’Algérie me sélectionne, j’y vais sans hésiter. Je pense que je serai le premier joueur d’origine algérienne évoluant en Israël à jouer pour une sélection nord-africaine. » On le confirme. Mais il ne serait « que » le second membre de sa famille à devenir international algérien : Fathi Chebel, son oncle et ancien milieu de terrain de Metz, Nancy, Lens et du RC Paris, a porté le maillot des Fennecs au début des années 1980.

« Mes proches étaient un peu inquiets »

Jordan Faucher, formé à Metz, passé par Tours et la Belgique – Tournai puis Antwerp, où les retards récurrents dans le versement des salaires l’ont poussé à changer d’horizon – n’imaginait pas écrire un (si long) chapitre de sa jeune carrière en Israël. « Je n’avais jamais pensé y jouer. Cela s’est fait par hasard. Comme je n’étais plus payé à Antwerp, j’avais la possibilité de partir. Mon agent, qui travaille beaucoup avec Israël, m’avait dit qu’un club de ligue 1, l’Hapoël Raanana, était intéressé. On m’a envoyé un billet d’avion, mais mon passeport était périmé. On m'en a renvoyé un autre billet Je devais partir le samedi, mais ce jour-là, je devais jouer avec Antwerp, et mon président voulait que j’attende le dimanche pour partir. Finalement, Raanana s’est impatienté et je n’y suis pas allé. »

Mais il était sans doute écrit quelque part que Faucher partirait en Israël, puisque quelques jours après l’échec de la première piste, l’attaquant est prêté pour six mois au Maccabi Herzliya, en ligue 2, qui lève vite l’option d’achat. Avec, au moment de dire oui, une litanie de questions qui tournent en boucle dans sa tête. « Je me suis évidemment interrogé. Par rapport à la situation du pays, avec les attentats. Et aussi en raison de mes origines algériennes… Je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Mes proches, eux aussi, étaient un peu inquiets. Mais mon agent m’a rassuré. Il m’a dit qu’il ne m’enverrait pas là-bas s’il avait eu le moindre doute. »

Car depuis presque trois ans qu’il s’est installé à Herzliya, dans cette ville balnéaire plutôt huppée située près de Tel-Aviv, Jordan Faucher n’a jamais subi la moindre réflexion sur ses origines. « Je me disais que ça pourrait arriver… Mais on ne m’a jamais rien dit : aucune allusion sur mes origines, aucune menace, aucune insulte. Ni dans la rue, ni dans les stades. Ma réussite sportive a sans doute facilité les choses. Une chose est certaine : si cela devait arriver, je partirais sans attendre. C’est quelque chose que je ne pourrais pas accepter. Je me suis parfaitement bien intégré à la société israélienne. Je parle même hébreu, bien que je ne l’écrive pas, car c’est vraiment compliqué… Mais ici, je me sens surtout en sécurité. Beaucoup plus qu’en France. Je mène une vie normale. Je ne prends pas de précautions particulières, y compris quand je vais dans des endroits où il y a du monde. Peut-être devrais-je faire plus attention. »