Après un an de détention provisoire, un lycéen de Nîmes, Wissem N., comparaissait, jeudi 12 janvier, devant le tribunal correctionnel de Nîmes pour apologie du terrorisme. Il a été condamné à trois ans de prison, dont un an assorti d’un sursis avec mise à l’épreuve.

Ce sont les parents du jeune homme qui avaient signalé, début 2016, que leur fils de 18 ans passait ses journées devant l’ordinateur et avait changé de comportement. Sur les réseaux sociaux, il postait des photos sur lesquelles il posait ici avec un drapeau de l’Etat islamique, là prenant la pose avec le doigt levé. Sur une autre il avait inscrit une légende : « Prêt à tuer les Koufars [mécréants]. »

L’enquête menée par les services antiterroristes a aussi révélé que le lycéen avait téléchargé (ce qu’il conteste) une vidéo avec une chanson à la gloire d’Amedy Coulibaly, l’auteur de la tuerie de l’Hyper Cacher, en janvier 2015. La chanson justifie aussi l’attentat de Charlie Hebdo. Le prévenu reconnaît avoir posté les images qui lui sont reprochées. Mais s’il confesse avoir eu une appétence pour l’islam radical, il assure avoir tourné la page.

Pourtant, lorsque le juge des libertés et de la détention lui a permis de sortir de prison, une quinzaine de jours en septembre 2016, le lycéen a continué d’échanger sur Internet avec des contacts jugés douteux. La police l’a même placé en garde à vue pour avoir téléchargé des fichiers audio à la gloire de l’Etat islamique. Il a aussi été interrogé dans le cadre d’une procédure finalement classée sans suite pour une participation à une association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste.

« Danger pour la communauté nationale »

Interrogé jeudi sur sa volonté exprimée de partir en Syrie, Wissem N. explique qu’il a dit cela à sa mère sur le mode de la provocation. Lors du procès, il a été révélé qu’un de ses amis du lycée, un certain « Adam » était, lui, bel et bien parti en Syrie. Le magistrat du parquet, qui avait requis quatre ans de prison ferme, a clairement exprimé son inquiétude face à un jeune homme « loin d’être déradicalisé » et représentant « un danger pour la communauté nationale », susceptible de dissimuler son adhésion aux thèses djihadistes. « Une peine inférieure, ce serait jouer à la roulette russe avec la société », a-t-il indiqué.

La défense, soutenue par Mes Nougier et Aoudia, a souligné le courage des parents qui ont dénoncé leur fils pour le protéger. Les avocats ont aussi indiqué que le lycéen était parfaitement intégré dans son lycée où il n’avait jamais fait d’apologie du terrorisme. « C’est un jeune discret et calme. » Fustigeant le principe d’une peine de prison trop lourde, la défense s’est interrogée sur le signe envoyé aux familles tentées de signaler le comportement d’un de leurs enfants, avec le risque de le voir partir en prison pour plusieurs années.

Quelque 300 personnes feraient l’objet d’une fiche « S » en raison de leur lien supposé avec l’islam radical dans le Gard, ce qui situerait le département au troisième rang sur le plan national si on le rapporte au nombre d’habitants. En marge de l’audience, jeudi, un avocat glissait, mi-inquiet, mi-ironique : « Vous pensez sérieusement qu’ils vont se déradicaliser en détention ? »

Hocine Rouagdia (Nîmes, correspondance)