Theresa May, à Bruxelles le 15 décembre 2016. | JOHN THYS/AFP

Theresa May n’a pas lésiné sur le symbole. Le 29 décembre 2016, elle a offert par courrier au président élu Donald Trump une copie d’un message adressé au peuple américain par Winston Churchill, « le plus célèbre des Anglo-Américains », en 1941, juste après l’attaque japonaise sur Pearl Harbour. L’ancien premier ministre y exprimait, selon Mme May, « un sentiment d’unité et d’association fraternelle entre le Royaume-Uni et les Etats-Unis » qui, a-t-elle écrit à M. Trump, « est exactement aussi réel aujourd’hui que par le passé ».

Atout dans le débat politique britannique, encore plus depuis le Brexit, la « relation particulière » revendiquée par le Royaume-Uni avec son ancienne colonie américaine avait été mise à l’épreuve lorsque Barack Obama, peu avant le référendum, avait menacé les Britanniques d’être relégués « en fin de liste » pour un accord de libre-échange avec les Etats-Unis, s’ils sortaient de l’UE. Donald Trump, lui, avait immédiatement salué le Brexit et promis de replacer Londres en première position.

Mais, en novembre, la presse britannique, navrée, avait considéré comme une humiliation que le président tout juste élu n’appelle Mme May qu’après les présidents égyptien, indien, et même irlandais. Pas plus qu’elle n’avait goûté sa suggestion de nommer l’ancien dirigeant de l’extrême droite britannique Nigel Farage, son premier visiteur européen après son élection, comme ambassadeur à Washington.

Suivisme

La première ministre s’est alors lancée dans une intense entreprise de suivisme à l’égard des positions extrémistes de M. Trump sur la politique israélienne. Alors que le Royaume-Uni a été, aux côtés de l’Egypte, l’un des artisans du projet de résolution 2334 au Conseil de sécurité de l’ONU, condamnant la colonisation israélienne en Cisjordanie et l’a voté le 23 décembre, Theresa May a opéré une volte-face.

Le 30 décembre, son porte-parole avait critiqué les propos du secrétaire d’Etat américain, John Kerry, qualifiant le gouvernement Nétanyahou de « coalition la plus à droite de l’histoire israélienne ». La colonisation « est loin d’être le seul problème dans ce conflit », avait estimé Downing Street, ajoutant qu’il n’était « pas opportun de critiquer la composition du gouvernement démocratiquement élu d’un allié ». Une semaine plus tard, Londres a fermé les yeux sur les agissements d’un membre de l’ambassade d’Israël, révélée par un reportage en caméra cachée d’Al-Jazira, discutant de la manière de compromettre un ministre britannique hostile à la colonisation israélienne.

Le dernier épisode de cette curieuse entreprise de séduction a eu lieu lorsque Londres a snobé Paris en revendiquant un statut de simple observateur à la conférence sur le Proche-Orient organisée par la France, ce week-end. Non seulement le Royaume-Uni a été le seul parmi plus de soixante-dix participants à ne pas signer la déclaration finale, mais il a empêché, lundi 16 janvier, la validation de ses conclusions par l’UE en dépit de son statut de membre sortant de l’Union. Boris Johnson, ministre des affaires étrangères, a même emporté le soutien de ses homologues hongrois, croate, bulgare et tchèque dans son refus.