Stephane Pallez, PDG de la Francaise des jeux, lors de l’inauguration du nouvel entrepôt automatisé de l’entreprise publique, près de Roissy (Val-d’Oise),  le 13 avril 2016. | KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Enfin une entreprise publique en grande forme ! La Française des jeux (FDJ), qui dispose du monopole national des jeux de loterie, vient de boucler une nouvelle année record. Ses ventes ont progressé de 4,6 % en 2016, à 14,3 milliards d’euros. Une croissance portée les paris sportifs en ligne et les jeux à gratter. Elle contraste avec le marasme persistant du PMU, dont l’activité a encore décliné de 0,6 % en 2016.

La transformation de la FDJ est cependant loin d’être achevée, explique au Monde Stéphane Pallez, PDG depuis novembre 2014. L’entreprise espère que le nombre de ses clients va enfin remonter en 2017. Au programme également, le regroupement en fin d’année, de plusieurs sites, dont le siège, dans un nouveau bâtiment à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine).

En quinze ans, le nombre de clients de la FDJ a baissé de 18 %. Où en est votre plan de reconquête ?

Nous poursuivons les ambitions de ce projet FDJ 2020, y compris l’objectif de regagner 1 million de clients. Après une baisse sensible en 2015, la FDJ a réussi à stabiliser leur nombre à 26 millions en 2016. Nous avons regagné des clients dans toutes nos gammes sauf Amigo, jeu pour lequel nous avons limité nos investissements commerciaux. L’année 2017 devrait marquer le début de la remontée du nombre de nos joueurs.

Quels jeux vont faire venir ou revenir les joueurs vers vous ?

Pour 2017, nous misons en particulier sur deux jeux populaires, Euro Millions et le Loto. Le mouvement est déjà enclenché avec Euro Millions, relancé en 2016. Ses ventes ont bondi de 8 % au dernier trimestre, après une baisse équivalente durant les neuf premiers mois de l’année.

Et pour le Loto ?

La relance du Loto, qui vient de fêter ses 40 ans, est prévue pour mars. Nous allons lui redonner de la modernité, tout en nous appuyant sur son incroyable capital affectif. Tout cela, conjugué avec l’essor des paris sportifs et le lancement de jeux innovants enrichis par le numérique, y compris dans notre réseau physique, devrait entraîner une nouvelle hausse des ventes. Pendant que nous investissons dans la transformation de l’entreprise, la croissance continue !

D’année en année, les joueurs sont moins nombreux et dépensent plus. Le risque d’addiction grandit ?

On reste vigilant en matière de risque d’addiction au jeu, aujourd’hui limité et mesuré par l’Observatoire des jeux. A 10,60 euros par semaine, la mise moyenne reste l’une des plus faibles d’Europe, et sa hausse est très raisonnable.

Pour éviter l’addiction, la fraude et le blanchiment, les autorités souhaiteraient que les joueurs puissent être identifiés. Qu’en pensez-vous ?

C’est un sujet de débat, surtout pour les paris sportifs, où les mises sont plus importantes, et les risques de blanchiment d’argent aussi. Nous allons mener un test. Il débutera au printemps dans une centaine de points de vente. Nous proposerons aux clients de bénéficier d’offres exceptionnelles, par exemple de parier sur des résultats de football ou de basket en cours de match, ce qui est déjà possible sur Internet. Mais pour cela, ils devront s’identifier. Nous verrons alors comment réagissent le public et les détaillants. Cela peut avoir du sens en matière de régulation, mais aussi de marketing : connaître ses clients permet de proposer des offres et des services adaptés.

Dans son rapport d’octobre sur les jeux d’argent, la Cour des comptes constate qu’il subsiste une importante offre illégale de jeux en ligne. Que faire ?

Il suffit d’aller sur Internet pour accéder à des sites de jeux de loterie qui prennent l’apparence de jeux de casino en ligne. Ils sont illégaux en France, où FDJ est seule à pouvoir proposer des jeux de loterie. La Cour ne remet pas en cause ce monopole. Cependant, pour contrer ces sites, elle suggère que nous puissions proposer des jeux de loterie plus attractifs. Il n’est pas question de jeux de casino où 95 % voire 99 % des mises sont redistribuées. Mais nous pourrions tester des jeux avec un taux de 75 %, par exemple, au lieu de 70 % aujourd’hui. Quitte à changer les caractéristiques du jeu ou à l’arrêter si le résultat n’est pas satisfaisant. Nous discutons de ce projet avec les pouvoirs publics.

La Cour s’inquiète aussi du fait qu’un jeune de 15 à 17 ans sur trois aurait déjà joué à un jeu d’argent…

La législation sur les mineurs est relativement récente et encore mal connue. Nous investissons énormément pour informer le public, former les détaillants et nos commerciaux, contrôler ce qui se pratique dans le réseau. Cet effort doit être renouvelé en permanence. La mobilisation de tous est indispensable, y compris celle des parents.