Cars de la compagnie Flixbus, Porte Maillot à Paris, le 9 Juin 2016. | Serge Attal / CIT'images

En une année d’existence, les « cars Macron » se sont définitivement inscrits dans le paysage français. Depuis l’entrée en vigueur, en août 2015, de la loi libéralisant les autocars longue distance, près de 4,8 millions de personnes ont été, selon nos informations, transportées en France sur ces nouvelles lignes. À comparer aux plus de 100 millions de passagers qui prennent le train chaque année sur longue distance.

La haute autorité du rail et de la route, l’Arafer, a, de son côté, comptabilisé 3,4 millions de « Macronautes » sur dix mois, d’août 2015 jusqu’à fin juin 2016, dont 1,5 million pour le seul deuxième trimestre de 2016. Un total de 193 villes françaises sont desservies par les Flixbus, Ouibus et autre Isilines. Les trois liaisons les plus utilisées étant, dans l’ordre décroissant, Paris-Lille, Paris-Lyon et Paris-Rouen.

L’économie de ce transport à petit prix est fragile : aucun opérateur n’a pour l’instant durablement gagné d’argent

À fin juin, les cars Macron n’avaient rapporté, toujours selon l’Arafer, que 40 millions d’euros à leurs opérateurs, dont 19 millions d’avril à juin. L’économie de ce transport à petit prix est donc fragile : aucun opérateur n’a pour l’instant durablement gagné d’argent, et le secteur s’est concentré, passant de cinq à trois acteurs.

  • Flixbus : tout près de la rentabilité

Flixbus France, la filiale de la start-up allemande, leader du transport en autocar outre-Rhin, a réussi son implantation en France, avec plus de 40 % de parts de marché. La société qui fait travailler une cinquantaine de PME sous-traitantes (qu’elle préfère appeler « partenaires ») a comptabilisé 2 millions de voyageurs début septembre.

La société aurait dégagé un peu de cash pendant les mois d’été, selon son directeur général Pierre Gourdain. « Je peux vous dire que ça fait plaisir d’envoyer de l’argent à la maison mère en Allemagne, quand, auparavant, on a passé des mois à lui en réclamer. »

Flixbus a aussi habilement réduit la concurrence en faisant disparaître Megabus en deux temps. Le groupe a d’abord racheté l’activité commerciale et la marque Megabus au britannique StageCoach fin juin. Il restait une société, Megabus.com SAS, propriétaire de 34 cars et salariant 170 chauffeurs, devenue sous-traitante de Flixbus. Mais le 9 septembre, ce dernier a annoncé à son ex-rival la fin prochaine du contrat, ouvrant une période d’incertitude pour Megabus.com SAS et ses salariés, avec à la clé les premiers licenciements du secteur.

« Notre principale préoccupation est retrouver des jobs pour les chauffeurs » explique M. Gourdain, qui assure que son équipe cherche à recaser, auprès de ses partenaires ou de sociétés de VTC, les salariés menacés de licenciement.

  • Ouibus : un coleader satisfait

C’est le numéro un du marché avec Flixbus. La filiale de la SNCF a, elle auss,i transporté 2 millions de « voyageurs Macron » en une année, dont 600 000 depuis la fin du mois de juin. « Les Français se sont massivement retrouvés dans nos offres », se réjouit Roland de Barbentane, directeur de Ouibus, dans un communiqué diffusé le 12 septembre.

Cet été, Ouibus a accéléré pour répondre à la demande : doublant ses destinations, étoffant sa flotte qui est passée de 150 à 200 autocars et ses effectifs, de 450 à 600 chauffeurs. La société se réjouit aussi d’avoir touché une nouvelle clientèle ; « 17 % de nos passagers n’auraient pas voyagé sans nous », se félicite l’entreprise.

Côté financier, Ouibus n’est pas encore rentable (l’entreprise ne diffuse aucun chiffre), mais observe un taux de remplissage qui a permis la pérennisation de neuf lignes jusqu’ici éphémères, souvent à caractère touristique comme Paris-Le Touquet, Paris-Mont-Saint-Michel, Paris-Deauville ou Marseille-Barcelone.

Pressenti pour reprendre l’activité de Megabus délaissée par Flixbus, Ouibus n’a pas donné de réponse positive. « Je vous rappelle que Ouibus s’est récemment alliée à Starshipper », souligne un responsable. La filiale de la SNCF a en effet contribué à la consolidation du secteur en absorbant les lignes et les chauffeurs de son concurrent à la mi-juin. Une manière de dire que Ouibus a déjà donné en matière de soutien à l’emploi.

  • Isilines : le Petit Poucet

C’est le troisième larron. Une position pas forcément facile. La filiale de Transdev a transporté plus de 700 000 passagers depuis son lancement, soit environ 15 % du marché. « Mais, en ajoutant les passagers de nos lignes internationales Eurolines, nous atteignons 2,5 millions de voyageurs transportés », précise une porte-parole d’Isilines.

Le Petit Poucet des cars Macron n’a pas plus que ses concurrents dégagé de profits en un an. Quelques lignes sont proches de la rentabilité, glisse un cadre. Cette situation ne fait pas paniquer Isilines, qui ne s’attendait pas à enregistrer des bénéfices en douze mois.

L’entreprise préfère parler d’objectifs validés, d’expérience engrangée et de croissance pérenne et responsable. Isilines ne reprendra pas non plus les chauffeurs de Megabus, préférant s’installer dans une relation de long terme avec ses sept PME partenaires, des autocaristes bien implantés dans leurs régions.