Yahya Jammeh a pris place à bord d’un jet privé, un Falcon 900 DX, qui a décollé peu avant 21 h 20 locales. | STRINGER / AFP

L’ex-président gambien Yahya Jammeh a quitté samedi 21 janvier soir Banjul pour l’exil après avoir cédé le pouvoir à Adama Barrow, mettant fin à six semaines de crise politique.

M. Jammeh, 51 ans dont plus de 22 à la tête du pays, en boubou blanc comme à son habitude, a pris place à bord d’un jet privé, un Falcon 900 DX, qui a décollé peu avant 21 h 20 locales avec, à bord, le président guinéen Alpha Condé. Il a été salué par une fanfare et acclamé par des partisans regroupés sur le tarmac.

Ce décollage avait été précédé par celui d’un autre avion, d’une compagnie mauritanienne qui, selon des sources proches de la présidence guinéenne, transportait des proches et des collaborateurs l’accompagnant dans son exil.

Les deux avions ont atterri à Conakry peu après 22 heures locales et GMT, selon un journaliste de l’AFP présent à l’aéroport et un responsable de la police aéroportuaire.

La Guinée équatoriale comme prochaine étape ?

Conakry ne devrait être qu’une étape sur le chemin de l’exil de Yahya Jammeh. D’après des sources officielles et aéroportuaires, un avion équato-guinéen l’attendait en Guinée pour l’emmener en Guinée équatoriale.

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Cet appareil équato-guinéen est venu avec, à son bord, « un haut responsable de la présidence équato-guinéenne et le ministre des Transports. Ils viennent chercher Jammeh », a précisé le même responsable de la police aéroportuaire. On ignorait samedi soir si l’ex-président gambien resterait un temps à Conakry où s’il poursuivrait son voyage en direction de la Guinée équatoriale.

En apprenant que Yahya Jammeh avait effectivement quitté la Gambie, des habitants de Banjul sont sortis dans les rues, manifestant leur joie, notamment à Grand Banjul (banlieue), selon un correspondant de l’AFP. « Nous sommes libres maintenant ! Nous ne sommes plus en prison, a lancé Fatou Cham, 28 ans, jubilant la rue.

« Nous n’avons plus à faire attention avant d’exprimer nos opinions ».

Des célébrations ont éclaté dans les rues de Banjul, samedi 21 janvier. | CARL DE SOUZA / AFP

Pour Modou Lamin Dumbuya, 25 ans, le départ de Yahya Jammeh signifie que « les Gambiens en exil sont libres de rentrer ». Et « ce qui est bien, c’est que Jammeh saura maintenant ce que cela veut dire, d’être réfugié à l’étranger ».

De nombreuses offres d’asile

Ce départ a été obtenu à l’issue d’une médiation conduite par les présidents mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz et guinéen Alpha Condé, mandatés par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao, 15 pays dont la Guinée mais pas la Mauritanie).

L’accord conclu « prévoit le départ de Yahya Jammeh de Gambie pour un pays africain avec toutes les garanties pour sa famille, ses proches et lui-même. Il peut retourner dans son pays quand il veut et comme il veut », a expliqué M. Ould Abdel Aziz à son retour à Nouakchott.

Selon Kiridi Bangoura, secrétaire général de la présidence guinéenne, « Yahya Jammeh préfère dans un premier temps venir en Guinée », avant de décider « où il va aller s’installer définitivement ». Depuis vendredi, des sources politiques diverses avaient évoqué des offres d’asile en Guinée, au Maroc, en Mauritanie et en Guinée équatoriale.

Yahya Jammeh avait annoncé sa décision de quitter le pouvoir à la télévision dans la nuit de vendredi à samedi. « J’ai décidé aujourd’hui en conscience de quitter la direction de cette grande nation, avec une infinie gratitude envers tous les Gambiens », a-t-il déclaré.

Une intervention militaire suspendue

La crise en Gambie a éclaté le 9 décembre, lorsqu’il a refusé de reconnaître les résultats de l’élection présidentielle du 1er décembre, dont Adama Barrow a été déclaré vainqueur.

De multiples initiatives ont ensuite été prises pour le faire changer d’avis, notamment par la Cédéao, sans succès jusqu’à la médiation de vendredi.

La Cédéao a fait entrer jeudi après-midi des troupes de plusieurs de ses pays en territoire gambien. L’opération a été lancée peu après la prestation de serment d’Adama Barrow à l’ambassade gambienne à Dakar, où il est accueilli depuis le 15 janvier à la demande de la Cédéao.

L’intervention militaire a été ensuite suspendue pour donner des chances à la nouvelle médiation, qui a abouti au départ de M. Jammeh.