Au Festival d’Angoulême, le 29 janvier 2016. | GEORGES GOBET / AFP

Surtout ne pas réitérer le fiasco de l’an dernier. Le 44e Festival international de la bande dessinée, qui s’ouvre jeudi 26 janvier à Angoulême, devrait être moins polémique que l’édition précédente. Les organisateurs avaient été accusés de misogynie et menacés de boycottage face à l’absence d’œuvre réalisée par une femme dans la sélection initiale. Cette fois, de nombreuses autrices, dont Catherine Meurisse (La Légèreté, Dargaud) ou la Sud-Coréenne Ancco (Mauvaises filles, Cornélius), figurent dans la sélection officielle.

La 43édition avait soulevé un autre tollé lors de la clôture du festival. Le journaliste chargé d’animer la soirée de clôture avait fait un canular en égrenant un faux palmarès à partir de la liste officielle des ouvrages, suscitant des déceptions en cascade – il avait ensuite présenté ses excuses.

66 albums en lice pour les différents prix

Cette année, parmi les dix finalistes en lice pour le Fauve d’or figurent des auteurs chevronnés, comme Martin Veyron (Ce qu’il faut de terre à l’homme, Dargaud), Emmanuel Guibert (Martha & Alan, d’après les souvenirs d’Alan Ingram Cope, L’Association) et Daniel Clowes (Patience, Cornélius).

On compte également de nouveaux talents, dont Mathieu Bablet (Shangri-La, Ankama), Néjib (Stupor Mundi, Gallimard BD), Antoine Marchalot (Histoires croûtes, Les Requins marteaux) ou encore Eric Lambé et Philippe de Pierpont (Paysage après la bataille, Actes Sud/Fremok). Le manga est quant à lui représenté par Minetarô Mochizuki (Chiisakobé, tome 4, Le Lézard noir).

Point d’orgue du festival, le Fauve d’or du meilleur album de bande dessinée de l’année sera décerné samedi soir par le grand jury, présidé par la Britannique Posy Simmonds. A 71 ans, elle est l’une des maîtresses du roman graphique, autrice notamment de Gemma Bovery et Tamara Drewes. L’an dernier, il avait été remis à Richard McGuire pour son roman graphique Ici (Gallimard).

Au total, 66 albums, représentant tous les genres, sont en lice pour les différents prix du festival. Outre le Fauve d’or, le grand jury doit décerner un prix spécial, le prix de la série et le prix de la révélation. Il y aura également le prix jeunesse, le prix du patrimoine et le prix polar-SNCF.

Dès mercredi soir, on connaîtra le nom du lauréat du grand prix de la ville d’Angoulême. Trois auteurs sont en lice : le Suisse Cosey, le Français Manu Larcenet et l’Américain Chris Ware. Le lauréat présidera la prochaine édition du festival en 2018.

Hommage à René Goscinny

C’est mercredi également que doit être inauguré, sur le parvis de la gare d’Angoulême, un obélisque en l’honneur de René Goscinny, le génial scénariste disparu il y a juste quarante ans. Haut d’environ 6 mètres et pesant 7 tonnes, ce monument est truffé de citations et formules inventées par Goscinny, dont le célèbre « Ils sont fous ces Romains ». Curieusement, le scénariste d’Astérix, de Lucky Luke et d’Iznogoud n’avait jamais été honoré – y compris à titre posthume – par Angoulême.

Le dessinateur et scénariste de BD Emmanuel Guibert, auteur notamment de la série « La Guerre d’Alan » (L’Association), a d’ores et déjà reçu mercredi le prix René-Goscinny du scénario pour l’ensemble de son œuvre. Il lui sera remis dans la soirée à Angoulême en préambule du festival.

Trois autres anniversaires seront également fêtés cette année : les 50 ans de la série Valérian et Laureline, de Christin et Mézières (avant la sortie en juillet d’un film de Luc Besson), le 100e anniversaire de Will Eisner, créateur du Spirit, ancêtre des superhéros de BD et les 60 ans de Gaston Lagaffe, déjà célébrés au Centre Pompidou à Paris.

Plusieurs expositions sont également à l’affiche, dont une grande rétrospective consacrée à l’œuvre du Belge Hermann, 78 ans, grand prix de la ville d’Angoulême l’an dernier et qui au cours de ses cinquante ans de carrière a réalisé quelque 136 albums dont les séries Comanche et Jeremiah. Un nouvel album, Duke (Le Lombard), premier d’une nouvelle série, sortira vendredi.

Parmi les invités de marque figure le Chinois Rao Pingru, qui, à 95 ans, vient de publier Notre histoire (Seuil), un livre qui n’est ni vraiment une BD ni un roman, mais un ouvrage hybride et surtout magnifique.

La bande dessinée reste une manne pour les éditeurs. Quelque 5 000 nouveautés et nouvelles éditions ont été publiées en 2016, soit près de 7 % de la production éditoriale globale sur le marché français.