Benoît Hamon lors de son meetinfg à Montreuil le 26 janvier. | STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Pour Benoît Hamon, le plus dur est probablement encore à venir. Large vainqueur de la primaire à gauche, dimanche 29 janvier, il y accède toutefois sans triompher, tant la participation a été en deçà de la précédente primaire à gauche en 2011 (2,86 millions) et de celle de la droite en novembre 2016 (4,4 millions). Surtout, M. Hamon devra affronter des vents contraires, venus de son propre camp.

  • Rassembler son camp

Manuel Valls l’a dit lui-même, vendredi 27 janvier : « Je ne pourrai pas défendre son programme », a prévenu l’adversaire de M. Hamon au second tour de la primaire, deux jours avant le scrutin. Choisi par les sympathisants et les militants de gauche pour les représenter à l’élection présidentielle, Benoît Hamon se retrouve propulsé leader de fait d’un Parti socialiste déchiré, dont il a été, depuis sa sortie du gouvernement en août 2014, l’un des frondeurs et dont il s’est aliéné une partie des troupes.

Dès le début de semaine, il devra affronter l’opposition d’un certain nombre de députés de l’aile droite du PS. Certains ont fait savoir vendredi qu’ils envisageaient un « droit de retrait de la campagne » de Benoît Hamon si celui-ci venait à l’emporter. Un texte allant dans ce sens doit être proposé au vote par le député de Gironde Gilles Savary, lors de la traditionnelle réunion du groupe socialiste à l’Assemblée, mardi. Benoît Hamon devrait par ailleurs faire face au départ de plusieurs élus socialistes vers un autre candidat : Emmanuel Macron. Un pas que s’apprête à franchir Frédéric Cuvillier, député du Pas-de-Calais, qui a, ces derniers jours, multiplié les déclarations favorables à l’ancien ministre de l’économie. Vendredi, sur Europe 1, il estimait ainsi qu’il « faudra être à côté d’Emmanuel Macron pour éviter l’extrême droite ».

Quel Parti socialiste sera finalement derrière la candidature de Benoît Hamon ? Il devrait en connaîtra la teneur dimanche 5 février, date prévue de son investiture, au Zénith de Paris.

  • Parler avec le reste de la gauche

Martelant un mot d’ordre qu’il s’est donné depuis plusieurs semaines, Benoît Hamon a répété jeudi 26 janvier, en meeting à Montreuil (Seine-Saint-Denis) que la première chose qu’il fera lundi 30 janvier sera de « s’adresser aux autres dirigeants de la gauche » : Yannick Jadot (EELV), Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) et Pierre Laurent (PCF). Dans un contexte de multiplication des candidatures à gauche, le député des Yvelines n’a cessé de faire du « rassemblement » l’une de ses préoccupations de campagne, sans recevoir de gage d’écoute de la part des autres camps.

Jean-Luc Mélenchon, pour le moment le mieux positionné dans l’opinion et soutenu par le Parti communiste de M. Laurent, a dit jeudi qu’il refusait de jouer « la comédie » en dialoguant avec le gagnant de la primaire à gauche. Le candidat qui se présente sous l’étiquette de La France insoumise n’entend pas laisser le PS « revenir nous donner la leçon, nous redemander de marcher au pas et de porter leurs sacs ». « Non ! Ça, ça n’aura pas lieu ! » a prévenu M. Mélenchon. Autre raison du probable blocage du dialogue entre les deux hommes : leur rivalité sur les propositions qu’ils portent, plus à gauche que la ligne défendue par le PS au gouvernement, et qui donne une place centrale aux problématiques environnementales.

Yannick Jadot a, lui, un autre problème. Si M. Hamon et lui se renvoyaient des déclarations flatteuses, début janvier, et que les écologistes ont été nombreux à saluer la conversion aux questions environnementales du socialiste, le candidat désigné par la primaire d’Europe Ecologie-Les Verts, a dû à de nombreuses reprises marquer sa distinction d’avec M. Hamon. Dans l’entre-deux-tours de la primaire, tandis que des membres du parti ne cachaient pas leur intention de voter pour le député des Yvelines, M. Jadot a rappelé qu’il n’envisageait « pas du tout de [se] désister en [sa] faveur ».

  • Convaincre sur son programme

Une fois lancé dans l’arène de l’élection présidentielle et face aux candidats des autres formations politiques, Benoît Hamon devra par ailleurs composer avec son meilleur ennemi : son programme. Vivement attaqué par son propre camp, à commencer par Manuel Valls qui lui a livré un procès en manque de crédibilité, il devra aussi faire face aux assauts de la droite et de Jean-Luc Mélenchon, en particulier sur la question du revenu universel. Crédité de moins de 10 % des intentions de vote à la présidentielle, il devra convaincre qu’il a la stature de prétendant à l’Elysée que beaucoup lui contestent.

Voir aussi dans notre comparateur : le programme de Benoît Hamon

Enfin, il devra persuader les électeurs du Parti socialiste qui ont voté pour lui lors de la primaire de voter pour lui à la présidentielle quand nombre de ceux rencontrés dans les bureaux de vote lors des premier et second tours se disaient peu certains de le soutenir le 23 avril en raison de ses faibles chances de se qualifier pour le second tour de la présidentielle.