Des manifestant à l’aéroport de Chicago, le 29 janvier. | JOSHUA LOTT / AFP

Manifestations, condamnations politiques, pressions internationales : neuf jours après sa prise de fonctions, Donald Trump faisait face dimanche 29 juillet à un feu nourri de critiques après sa décision de fermer les frontières à tous les réfugiés ainsi qu’aux ressortissants de sept pays musulmans.

Après un week-end de confusion et de controverses, le président républicain s’est défendu de toute discrimination anti-musulmans, alors que dans le pays des milliers de manifestants se sont rassemblés dimanche à Washington, New York, Boston et dans d’autres villes et aéroports du pays.

  • Le décret

Le décret paraphé par le président interdit pendant quatre-vingt-dix jours toute entrée sur le territoire américain des ressortissants de sept pays : le Yémen, l’Iran, la Libye, la Somalie, le Soudan, la Syrie et l’Irak. Cette liste pourrait être élargie à l’avenir sur proposition – au président – du département de la sécurité intérieure, en accord avec le secrétaire d’Etat.

Il bloque également pendant quatre-vingt-dix jours les entrées de réfugiés venant de ces pays, et les demandes des réfugiés syriens sont bloquées jusqu’à nouvel ordre. De façon plus générale, le texte bloque le processus d’admission des réfugiés du monde entier pendant 120 jours. Samedi matin, il avait été annoncé que le décret concernait les détenteurs de green card (visa de résident permanent aux Etats-Unis), avant que l’ordre inverse ne soit donné dimanche après-midi.

Donald Trump a annoncé dimanche soir que les Etats-Unis émettraient à nouveau des visas pour tous les pays concernés une fois mises en place des politiques de sécurité.

  • La riposte judiciaire

A New York et en Virginie, des juges fédéraux ont imposé, samedi 28 janvier, un sursis d’urgence au décret de Donald Trump, après de nombreux recours déposés par des associations. Cette décision a pour conséquence d’interdire aux autorités américaines de refuser l’entrée ou d’expulser des personnes originaires des pays concernés par le décret, mais seulement si ses personnes disposent d’un visa valide.

  • Manifestations

« Les réfugiés sont les bienvenus ! » criaient quelque 10 000 personnes dans un parc à la pointe de Manhattan, la Statue de la Liberté visible au large, symbole depuis 1886 de l’accueil des immigrés venus respirer l’air de la liberté.

Des milliers de manifestants se sont aussi fait entendre sous les fenêtres du président Trump dans le parc de la Maison Blanche à Washington. « S’il a fait ça pendant ses sept premiers jours, qui sait ce qui nous attend dans les quatre prochaines années », dit une Serbe présente ici depuis 10 ans, Sonja Davidovic, 37 ans.

Des manifestations ont également ont lieu dans plusieurs villes ou leurs aéroports (Seattle, Los Angeles, San Francisco...).

  • Le Canada à la rescousse

Le Canada va accorder un asile temporaire aux voyageurs à destination des Etats-Unis affectés par le décret anti-immigration signé vendredi par Donald Trump, a annoncé dimanche le ministre canadien de l’Immigration, Ahmed Hussen.

Lors d’une conférence de presse, le ministre a dit ignorer le nombre de personnes susceptibles de bénéficier de cet accueil temporaire, tout en estimant que seule une poignée de voyageurs s’étaient vus refuser l’embarquement à bord d’avions vers les Etats-Unis dans les aéroports canadiens.

  • Critiques internationales...

La vague d’indignation traverse le monde musulman, la Ligue arabe dénonçant dimanche des « restrictions injustifiées ». Téhéran a immédiatement instauré la réciprocité contre les citoyens américains, et dimanche, des voix s’élevaient en Irak pour prendre des mesures similaires.

Plusieurs dirigeants européens dont Angela Merkel ont aussi rappelé Washington à ses devoirs d’accueil de réfugiés, et s’inquiétaient du sort de leurs ressortissants ayant une double nationalité, en théorie également concernés. Mais le Canada, lui, a annoncé avoir obtenu l’assurance de Washington que ses ressortissants binationaux pourraient continuer à se rendre aux Etats-Unis, selon le bureau du premier ministre Justin Trudeau.

  • ...et nationales

L’opposition démocrate et un nombre croissant d’élus de la majorité républicaine sont aussi mal à l’aise face à ce qui s’assimile pour beaucoup à une discrimination religieuse à la frontière. Au moins dix élus républicains du Congrès ont demandé le retrait du décret, et une quinzaine ont émis des réserves, souvent au nom des valeurs américaines et de la Constitution.

« Malheureusement, nous craignons que ce décret ne nous affaiblisse dans la lutte contre le terrorisme », ont déclaré les sénateurs John McCain et Lindsey Graham. Une déclaration qui a fait réagir Donald Trump sur Twitter. « La déclaration commune des anciens candidats à l’élection présidentielle JohnMcCain & Lindsey Graham est fausse. Ils sont tristement faibles sur l’immigration. Les deux sénateurs devraient concentrer leur énergie sur l’EI, l’immigration illégale et la sécurité aux frontières au lieu de toujours tenter de commencer la troisière guerre mondiale. »

  • La Silicon Valley et Hollywood prennent position

Inquiète, la Silicon Valley, qui emploie des milliers d’immigrés, dénonce à l’unisson le décret. A l’image de Tim Cook (Apple) ou de Mark Zuckerberg (Facebook), la plupart des grands patrons de la « high tech » sont sortis de leur silence pour critiquer des mesures qui risquent de leur priver d’un énorme réservoir de talents.

Le transporteur Lyft et les cafés Starbucks sont allés plus loin. Le premier a annoncé avoir fait une promesse de don d’un millon de dollars à l’ACLU (American Civil Liberties Union), l’organisation qui a obtenu le premier jugement, samedi, contre le décret. Le second a promis d’embaucher 10 000 réfugiés sur cinq ans. A l’inverse, Uber, soupçonné d’avoir voulu profité de la grève des taxis newyorkais, a fait face à un mouvement d’opinion sur les réseaux sociaux.

Hollywood a également réagi. Le cinéaste iranien, nommé aux Oscars, a annoncé qu’il boycotterait la cérémonie qui aura lieu fin février. Dimanche soir, lors de la cérémonie des SAG awards, les récompenses décernées par le syndicat des acteurs, qui avait lieu à Los Angeles, plusieurs acteurs ont manifesté leur désaccord avec la politique du président.

Etats-Unis : des manifestations dans tout le pays contre le décret anti-immigration de Donald Trump