Ils sont huit. Huit à être au cœur du réacteur. Depuis les premières révélations du Canard enchaîné sur les emplois supposés fictifs de Penelope Fillon, ils entourent le candidat de la droite pour piloter sa communication de crise. En première ligne se trouve Anne Méaux, l’influente patronne de l’agence Image 7, chargée de la stratégie, qui se trouve être experte… en com’ de crise. Elle est épaulée par Myriam Lévy, une ancienne journaliste, qui était déjà responsable de la communication de M. Fillon à Matignon, et Caroline Morard, qui s’occupe des relations presse du candidat depuis 2012. Anne Méaux fait le lien avec l’avocat, Antonin Lévy, pour ses prises de parole dans les médias. Dans cette équipe resserrée figurent également : Patrick Stefanini (directeur de campagne), Igor Mitrofanoff (« plume » de François Fillon), Bruno Retailleau (coordinateur de la campagne) et le président du Sénat, Gérard Larcher.

Depuis près de dix jours, ce premier cercle est soumis à rude épreuve. Au bord de la crise de nerfs, chacun se méfie de tout et de tous. Un sentiment de paranoïa s’est même installé, l’équipe Fillon a l’impression d’être la cible de toutes les attaques et de toutes les manœuvres… A tel point qu’une règle a été fixée pour éviter d’éventuelles écoutes sauvages : avant chaque réunion autour du candidat, chacun laisse son téléphone portable en dehors de la pièce. Et, de préférence, les discussions entre eux se passent en face à face, sans passer par le téléphone ou les mails. On est jamais trop prudent… « On a peur de tout et franchement, vu le contexte, il y a de quoi devenir parano », confie un participant.

Retard à l’allumage

Ses proches parmi les proches n’étaient pas au courant des activités de Penelope Fillon. « On est tous tombés de l’armoire quand c’est sorti, confie l’un d’eux. Fillon n’a jamais pensé à nous parler de l’histoire de sa femme car il n’a jamais considéré avoir fauté. » D’où la stupeur et le retard à l’allumage dans les premières heures qui ont suivi les révélations du Canard enchaîné. « Au départ, on ne s’est pas affolé. On a préféré faire le dos rond, en se disant que ça allait se tasser », explique l’un d’eux. Mais très vite, la machine médiatique s’est emballée, la petite équipe a donné l’impression d’être totalement dépassée et la com’ a déraillé.

François Fillon et ses porte-parole ont multiplié les prises de parole imprécises et contradictoires, ce qui a contribué à renforcer les soupçons. Le candidat a lui-même changé de ligne de défense, dénonçant au départ des attaques « misogynes » contre sa femme, puis un supposé complot du pouvoir contre lui, tout en contestant les chiffres avancés dans la presse. Et quand il a joué la transparence pour anticiper toute polémique future, il a commis des erreurs factuelles. Comme le 26 janvier, sur TF1, lorsqu’il a avoué avoir rémunéré deux de ses enfants avocats pour « une mission », du temps où il était sénateur de la Sarthe, entre 2005 et 2007, alors qu’ils n’étaient pas encore diplômés à cette époque-là. Pour ne rien arranger, ses porte-parole ont multiplié les explications contradictoires. Certains disant que Penelope avait travaillé à l’Assemblée, d’autres dans la Sarthe… Sans jamais répondre à la seule question qui importe : quels sont les éléments prouvant qu’elle a réellement travaillé ?

« La communication de crise, c’est très compliqué et cela obéit à des règles strictes : il ne faut pas que cent voix différentes s’expriment. Et il ne faut jamais dévier dans le message que l’on veut faire passer », souligne un ex-ministre. L’équipe du candidat tente de positiver, en espérant que l’accumulation des accusations va modifier le regard des Français. Un stratège de la campagne résume l’objectif : « Il faut tenir assez longtemps pour qu’on arrive au point de basculement dans l’opinion, où cela va apparaître comme de l’acharnement ». Pour l’instant, c’est tout l’inverse : 76 % des Français ne sont pas convaincus par sa défense, selon un sondage Elabe pour BFM-TV publié mardi.