Les joueurs du XV de France, le 12 février à Saint-Denis. | MARTIN BUREAU / AFP

« C’est une belle victoire. C’est toujours bon de gagner en jouant mal. » Il y a une semaine, le sélectionneur anglais Eddie Jones affichait un sourire satisfait à l’heure de commenter le succès compliqué des siens contre le XV de France (19-16). Dimanche 12 février au Stade de France, son homologue tricolore Guy Novès n’allait pas jusqu’à se réjouir de gagner sans produire de jeu, ce qui est plus facile à faire lorsqu’on entraîne une équipe qui en est à 16 victoires de suite (série en cours), mais le Toulousain tentait malgré tout de ne pas bouder son plaisir.

« On vient de subir trois défaites contre des équipes renommées (l’Angleterre, la Nouvelle-Zélande, l’Australie), donc aujourd’hui, j’ai envie de retenir la victoire, et ce fameux dernier quart d’heure, que l’on gagne alors qu’avant il nous faisait défaut avant », a donc expliqué le sélectionneur en conférence de presse, juste après le succès décroché contre l’Ecosse (22-16). Un Novès qui souriait pourtant à moitié, n’évitant pas non plus d’évoquer sa déception devant le jeu produit par les siens.

« Cette fois on est frustré par la manière, et non par le résultat. La pression a eu une incidence sur cette équipe, mais je le répète, je suis profondément heureux pour les joueurs », a-t-il insisté, tout en révoquant l’idée d’un retour à un jeu plus restrictif. « Ça fait un an qu’on travaille un rugby qui nous correspond, mais aujourd’hui ce n’est pas un retour en arrière, non. On n’a pas l’intention de changer notre fusil d’épaule, mais plutôt de continuer à travailler dans ce sens, et à progresser. »

Prendre du plaisir, ou pas

Du côté des joueurs, l’heure était à une joie modeste et sincère. « La victoire on en avait parlé toute la semaine, elle est acquise, donc voilà » (Cyril Baille). « Ça valide le travail accompli, notamment sur la gestion du dernier quart d’heure, qui était un axe important de la semaine écoulée » (Rémi Lamerat). « Moi je suis fatigué, mais on est soulagé quoi, il y a la victoire » (Sébastien Vahaamahina). « Ça fait du bien… » (Uini Atonio).

Titillés par les journalistes quant à leur prestation moyenne, les tricolores évoquaient tantôt la pression, tantôt leurs coriaces adversaires, voire même l’aspect ovale du ballon de rugby. « On a un sentiment mitigé. On n’a pas fait un gros match, on n’a pas été capable de mettre notre jeu en place, mais on a gagné », constatait Scott Spedding, battu sur le deuxième essai écossais par un mauvais rebond (« Je sais pas, ça arrive… »).

L’arrière clermontois insistait toutefois sur l’importance de ce succès pour ses camarades les moins expérimentés, comme Camille Lopez qui exultait au coup de sifflet final, lesquels commençaient peut être à se demander quelle forme de malédiction les avait touchés. « Notre groupe est jeune et avait besoin d’une victoire. On a tué le match comme il fallait », a-t-il précisé. « Mais je n’ai pas pris de plaisir ce soir », rigolait Spedding. A deux mètres de lui, comme un précipité du manque de coordination tricolore constatée par séquences sur la pelouse du Stade de France, on pouvait entendre Louis Picamoles dire l’inverse : « J’ai pris du plaisir sur le terrain. »

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A un doigt d’inscrire un essai libérateur en fin de partie, Rémi Lamerat évoquait lui aussi le sujet, tout ressassant son manque de réussite. « De toute façon, à titre individuel, c’est rare que je sorte d’un match heureux », expliquait dans un sourire le centre international, qui n’est pas le seul dans l’hexagone à avoir ce souci. « C’est parce qu’il y a toujours moyen de faire mieux. Mais ce travail-là est plus facile à faire après une victoire. »