Michael Flynn a démissionné de son poste de secrétaire américain à la sécurité nationale. | DREW ANGERER / AFP

La démission du secrétaire américain à la sécurité nationale, Michael Flynn, a suscité en Russie des commentaires assez hétéroclites, les représentants du pouvoir dénonçant une nouvelle fois la manifestation d’une « russophobie », l’opposition saluant pour sa part la chute d’un… « agent du Kremlin ». « Ce n’est pas notre affaire », a tenté d’éluder, mardi 14 février, Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, en répétant que le départ précipité de l’ancien général, trois semaines après la mise en place de la nouvelle administration américaine, « était l’affaire des Etats-Unis ».

Ce retrait contraint a été provoqué par la révélation persistante de contacts entre M. Flynn et l’ambassadeur russe en poste à Washington, après l’annonce de nouvelles sanctions décidées par l’administration Obama en représailles à des interférences russes durant la campagne présidentielle américaine. Il met cependant une nouvelle fois à l’épreuve la relation bilatérale que Moscou espérait plus « fluide » avec l’arrivée de la nouvelle équipe à la Maison Blanche. Et dans le cénacle du pouvoir russe, certains ne cachent pas leurs regrets.

« Ouvert à un dialogue »

Michael Flynn, « contrairement à beaucoup d’autres Américains haut placés, était ouvert à un dialogue », a réagi Konstantin Kosachev, président de la commission des affaires étrangères au Conseil de la fédération. « Chasser un conseiller sur la sécurité nationale pour des contacts avec l’ambassadeur russe, ce n’est même pas de la paranoïa, c’est pire », a ajouté le sénateur, cité par l’agence Tass, en omettant de préciser que ces contacts avaient eu lieu alors que l’intéressé n’était pas encore en fonctions. « La russophobie a infecté la nouvelle administration de haut en bas », a-t-il ajouté.

Même son de cloche chez Alexeï Pouchkov, membre de la commission défense et sécurité de la chambre haute du Parlement russe. « Le départ de Michael Flynn est probablement le plus rapide de toute l’histoire, mais la cible, ce n’est pas Flynn, ce sont les relations avec la Russie », a commenté le sénateur sur son compte Twitter. A Moscou, l’espoir de voir les relations bilatérales se réchauffer depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump le dispute à une inquiétude de plus en plus manifeste quant à l’imprévisibilité du nouveau locataire de la Maison Blanche. Le Kremlin attendait les premiers signes de ce réchauffement. Pas le départ de Michael Flynn, considéré comme le dirigeant américain le plus favorable à la levée des sanctions imposées à la Russie depuis 2014.

L’opposition russe s’est engouffrée dans cette brèche. « Ce que disent les fonctionnaires poutiniens sur la démission de Flynn est une indication directe sur le fait que c’est un agent à eux, le plus haut placé [jusqu’à présent] », a réagi sur les réseaux sociaux Vladimir Milov, président du parti Choix démocratique. « Le général Flynn est probablement le personnage le plus loyal à Poutine dans l’administration américaine. A Washington, il avait depuis longtemps la réputation d’un agent du Kremlin », renchérit Ilia Iachine, l’un des fondateurs du mouvement Solidarnost et un proche de l’opposant Boris Nemstov, tué au pied du Kremlin en février 2015.

« Jour noir pour la diplomatie du Kremlin »

« Il coopérait avec la chaîne RT [Russia Today] généreusement financée par le budget russe », poursuit Ilia Iachine en rappelant, photo à l’appui, la présence de Michael Flynn « à la main droite » de Vladimir Poutine lors d’une soirée, le 10 décembre 2015, destinée à fêter l’anniversaire du média russe aujourd’hui au centre de toutes les attentions en Occident. « Dans l’entourage de Trump, c’est celui qui insistait le plus sur la levée des sanctions. Donc, aujourd’hui est un jour noir pour la diplomatie du Kremlin et Poutine lui-même », ajoute-t-il.

Avec férocité, l’opposant rappelle enfin que le porte-parole du Kremlin avait lui aussi démenti, dans un premier temps, les contacts entre M. Flynn et l’ambassadeur russe.