Un dépôt de ferraille à Berlin. | Michael Sohn / AP

Il a fallu que le patron prenne la plume pour calmer le jeu. « Vous êtes certainement tous aussi irrités que je le suis, parce que Volkswagen a besoin de quelque chose de totalement différent maintenant : la concentration sur une sortie propre de la crise du diesel », a écrit Matthias Müller, président du groupe Volkswagen, dans une lettre à ses collaborateurs rendue publique par plusieurs médias allemands lundi 13 février.

La cause de cette exaspération ? De fortes dissensions au sein de l’entreprise sur le plan d’économies en cours ont été exposées sur la place publique. « Cela donne l’impression fatale et erronée que chez Volkswagen on travaille les uns contre les autres et non pas les uns avec les autres », écrit M. Müller.

Ce même lundi, direction et syndicats prenaient acte de l’échec de discussions sur la mise en œuvre de ce vaste plan de restructurations annoncé en novembre 2016, et destiné à sortir l’entreprise de l’ornière du « dieselgate ». Lors des négociations, la semaine précédente, des tensions avaient vu le jour entre les syndicats – traditionnellement impliqués dans la gestion du groupe – et le patron de la marque Volkswagen, Herbert Diess, accusé par le comité d’entreprise de ne pas respecter le pacte initial.

Le conflit porte sur le nombre d’intérimaires

Le plan convenu, et âprement négocié, prévoit une réduction de 20 % des effectifs des sites allemands d’ici à 2020, soit 23 000 emplois supprimés outre-Rhin. Cette restructuration doit se faire sans licenciement et par un vaste plan de retraites anticipées, conduisant à une économie de 3,7 milliards d’euros et par un doublement de la marge.

Le conflit porte désormais sur le nombre d’intérimaires à garder dans les sites industriels. Volkswagen dit ne pas pouvoir conserver un grand nombre de travailleurs temporaires en raison de la baisse de la demande pour certains modèles comme la Golf ou la Passat. Les embauches de ces catégories d’employés sont actuellement gelées.

Mais la bataille a pris surtout une dimension personnelle, sous la forme d’un duel féroce entre Herbert Diess, côté direction, et Bernd Osterloh, le président du comité d’entreprise (CE) du groupe de Wolfsburg, côté syndicats. Ce dernier accuse M. Diess, qui a bâti sa réputation de chasseur de coûts chez BMW, de vouloir baisser le nombre de contrats temporaires plus rapidement et plus vigoureusement que ce qui a été convenu.

« Tout faire pour que les conflits soient réglés »

La tension est telle que le CE a publiquement appelé Matthias Müller à s’impliquer davantage dans la résolution du conflit. « Nous nous réjouirions que la direction du groupe s’attache avec plus de vigueur à la mise en œuvre du futur pacte et au respect des accords », écrit un porte-parole du comité d’entreprise dans un courriel.

La missive de Matthias Müller laisse entrevoir une implication accrue du grand patron dans les négociations. « Nous, en tant que direction, et moi-même personnellement continuerons de tout faire pour que les conflits soient réglés de manière constructive », écrit le président du groupe. Il n’en reste pas moins que Volkswagen traverse la plus grave crise de son histoire et que les analystes jugent la réussite du plan cruciale pour l’avenir.

Les ventes ont été bonnes en 2016, puisque le groupe a commercialisé 10,3 millions de voitures, devenant le numéro un mondial de l’automobile devant Toyota. Mais ses marges sont parmi les plus faibles de l’industrie automobile, 4 % hors coût du « dieselgate », 1,6 % en prenant en compte les 20 à 30 milliards d’euros de dépenses liées à l’affaire. A comparer aux marges de ses concurrents, plus de 6 % pour Renault, Nissan et PSA, plus de 8 % pour Ford et Toyota.