Jean-Marc Ayrault à l’Assemblée nationale, mercredi 15 février. | FRANCOIS GUILLOT / AFP

La France répliquera si un Etat interfère dans les élections françaises, a averti Jean-Marc Ayrault, interrogé mercredi 15 février à l’Assemblée nationale.

La France « n’acceptera aucune ingérence (…) dans [son] processus électoral », a assuré le ministre des affaires étrangères, « pas plus de la Russie d’ailleurs que tout autre Etat, il en va de notre démocratie, il en va de notre souveraineté, il en va de notre indépendance nationale ». Avant de poursuivre :

« [Il faut] faire clairement connaître les limites à ceux qui seraient tentés de porter atteinte à ce principe de la non-ingérence et le faire clairement et y compris en prenant des mesures de rétorsion lorsque cela est nécessaire, car aucun Etat étranger ne peut influencer le choix des Français, aucun Etat étranger ne peut choisir le futur président de la République. »

Une atmosphère pesante

La crainte de telles ingérences contre la campagne française est attisée par les récentes accusations de Washington visant la Russie. Les Etats-Unis accusent en effet Moscou d’avoir favorisé la candidature de Donald Trump à coup de piratages informatiques, une accusation sans précédent que Moscou a toujours démentie. Les autorités allemandes ont, à l’approche de leurs propres élections à l’automne prochain, montré du doigt Moscou dans le cadre de plusieurs incidents informatiques, notamment le piratage du Bundestag.

Enfin, dans une tribune publiée lundi dans Le Monde, Richard Ferrand, le secrétaire général d’En marche !, affirmait que la Russie tentait de déstabiliser la campagne d’Emmanuel Macron, notamment par le biais de piratages informatiques. Des accusations jugées « absurdes » par la présidence russe.

Malgré ce climat délétère sur le front des cyberattaques, aucune preuve tangible ne permet d’affirmer à ce jour qu’une attaque informatique sérieuse visant à perturber le fonctionnement de l’élection a été menée en France.

De nouvelles mesures annoncées

L’Elysée a cependant indiqué qu’un point serait fait avec François Hollande sur les mesures de protection informatique du processus électoral lors du prochain conseil de défense, qui se déroulera le jeudi 23 février. Plusieurs mesures en la matière ont été prises ces derniers mois, sous l’égide de l’Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information). Celle-ci a travaillé avec le ministère de l’intérieur à sécuriser l’infrastructure permettant de faire remonter depuis les bureaux de vote les résultats de l’élection. Elle a également travaillé à sécuriser le vote à distance, disponible aux Français résidant hors de France lors des élections législatives. Les partis politiques ont été réunis à l’automne pour faire le point sur les menaces et les sensibiliser aux mesures de protection utiles. Enfin, l’Agence s’est rapprochée du Conseil constitutionnel, un des juges de l’élection, pour lui faire remonter le fruit d’une veille technique menée sur Internet pour détecter d’éventuelles manipulations liées au scrutin.

M. Ayrault a quant lui annoncé que de nouvelles mesures destinées à protéger l’élection seraient abordées lors du conseil de défense du 23 février. La proximité des élections rend improbable un chambardement de l’architecture de la France en matière de cybersécurité. L’exécutif devra cependant résoudre une difficulté liée à l’émergence d’une menace protéiforme pour laquelle les institutions ne sont pas conçues : l’Anssi, dépendant directement de Matignon, est habilitée par la loi à inspecter les systèmes informatiques de l’Etat, mais n’a ni vocation à se pencher sur les partis politiques en pleine période électorale, ni de rôle, défini par la loi, de contrôle de l’élection.