Deuxième année consécutive de bénéfice pour Air France-KLM. Le groupe franco-néerlandais, qui était revenu dans le vert en 2015 après sept années de déficit, poursuit son redressement en dégageant un résultat net de 792 millions d’euros en 2016, plus de 6,5 fois supérieur aux 118 millions de l’année précédente. Une hausse due aussi à la vente de 49,99 % de ses parts dans sa filiale de restauration à bord Servair au suisse Gategroup, propriété du conglomérat chinois HNA.

Pas question cependant de céder à l’euphorie pour Jean-Marc Janaillac, qui a pris les commandes du groupe en milieu d’année, après le départ d’Alexandre de Juniac. D’autant que ces résultats, présentés jeudi 16 février, sont en ligne avec les objectifs. Une fois encore, l’amélioration des performances est due principalement à l’effet favorable du carburant ainsi qu’à la bonne performance en matière de coûts.

« La rentabilité d’Air France insuffisante »

« Nous avons deux façons d’interpréter ces résultats », relève M. Janaillac :

« Soit nous nous estimons satisfaits d’avoir dégagé un bénéfice dans un environnement de surcapacité d’avions et impacté par deux grèves d’Air France et des attentats, soit nous regrettons, malgré une baisse de la facture pétrolière d’1,5 milliard d’euros par rapport à 2015, de dégager des résultats inférieurs à ceux de nos concurrents et donc insuffisants pour financer notre développement. »

Pour conforter cette deuxième hypothèse, il suffit de regarder les performances des deux compagnies. Alors qu’en 2015, le résultat d’exploitation d’Air France pour la première fois avait dépassé celui de KLM, la tendance s’est à nouveau inversée et même accentuée. La compagnie française a vu son bénéfice baisser de 12 %, à 372 millions d’euros. Un recul dû aux grèves des pilotes et des personnels navigants mais aussi à la chute de fréquentation de la France à la suite des attentats, qui ont coûté respectivement 130 millions et 150 millions d’euros. A l’inverse, le bénéfice d’exploitation de son homologue néerlandais a bondi de 77 %, à 681 millions d’euros.

Mais c’est surtout la différence de rentabilité entre les deux compagnies qui s’est creusée. Elle a reculé de 2,6 % à 2,4 % pour Air France et décollé de 3,9 % à 6,9 % chez KLM. « Cet écart qui s’accroît conforte ma conviction. Il faut continuer les efforts entrepris chez KLM et trouver pour Air France une nouvelle voie permettant à la compagnie de dégager des ressources pour se développer », a ajouté le patron du groupe. Pour M. Janaillac, « le niveau de rentabilité d’Air France est clairement insuffisant et met à mal sa croissance ».

La consultation des pilotes prolongée jusqu’au 20 février

Or, tous les concurrents multiplient les initiatives. Lufthansa accroît assez fortement son emprise dans le moyen-courrier low cost avec Air Berlin, IAG (British Airways et Iberia) s’apprête à lancer des vols long-courriers à bas coûts depuis Barcelone, et la compagnie scandinave SAS va installer une partie de ses équipages en Irlande pour faire baisser les coûts. Norwegian s’attaque, elle aussi, aux long-courriers. Quant aux compagnies du Golfe, Qatar Airways va ouvrir une ligne depuis Lyon et Emirates proposera un vol par jour entre Dubaï et New York via Athènes. « Ce serait incompréhensible qu’Air France soit la seule compagnie à être incapable de réagir et de mettre en œuvre des mesures pour s’adapter à l’évolution du marché », prévient-il.

Une allusion au plan « Trust Together » lancé en novembre 2016 et reposant sur la création de Boost, une nouvelle compagnie à bas coût de fonctionnement permettant de rivaliser avec les compagnies du Golfe. Ce projet est actuellement soumis aux votes des adhérents du Syndicat national des pilotes de ligne, majoritaire dans la compagnie. L’organisation a d’ailleurs prolongé d’une semaine la consultation. Celle-ci s’achèvera le 20 février.

Le lancement de Boost est prévu à la fin de l’année pour une mise en œuvre durant l’année 2018. « Cela n’aura pas d’effet sur l’exercice en cours », précise M. Janaillac. Il observe depuis le début de l’année « une reprise du trafic, avec le retour d’un certain nombre de clients lointains principalement asiatiques qui avaient disparu, mais aussi une recette unitaire en janvier en légère baisse comparée à celle de 2016 ». Celle-ci est due à la baisse des prix des billets sous la pression de la concurrence mais aussi à une surcapacité dans l’offre. Toutefois, les réservations jusqu’en avril sont bonnes et légèrement en avance sur les prévisions. Avec une classe business qui résiste bien. Si les premiers signes de l’année sont relativement encourageants, le groupe reste prudent en raison des incertitudes liées à l’évolution du prix du carburant mais aussi du contexte géopolitique et économique mondial.