Tom Perez et Keith Ellison, candidats à la direction du Parti démocrate. | MANDEL NGAN,BRENDAN SMIALOWSKI / AFP

Plus de trois mois après ses défaites à la présidentielle comme aux sénatoriales, le Parti démocrate va se donner un nouveau dirigeant, samedi 25 février, à Atlanta (Géorgie). Parmi la dizaine de candidats au poste de responsable du Comité national démocrate, deux noms semblent se dégager : ceux de Keith Ellison, représentant du Minnesota, et de Tom Perez, ancien secrétaire au travail de Barack Obama.

Ces deux hommes incarnent les deux options qui s’offrent à une formation au plus bas depuis des décennies. Le Parti démocrate, qui a échoué dans la tentative de reprendre la majorité au Sénat en dépit d’un renouvellement favorable, a perdu la Maison Blanche et reste largement distancé au sein de la Chambre des représentants. Malgré le gain du poste de gouverneur de Caroline du Nord, il ne contrôle en outre qu’une minorité d’Etats (16 contre 33 aux républicains et un indépendant).

Keith Ellison, soutenu par l’ancien candidat à l’investiture démocrate Bernie Sanders, est partisan d’un virage à gauche plus marqué, pour ouvrir le parti aux foules qui avaient porté le sénateur indépendant du Vermont dans le cadre d’une bataille épique contre la favorite, Hillary Clinton.

La dernière responsable en date de l’instance démocrate, Debbie Wasserman Schultz, élue de Floride, avait d’ailleurs été contrainte de démissionner en juillet 2016 à la suite de fuites faisant état de son hostilité vis-à-vis de M. Sanders pendant les primaires.

Imposer un « changement de culture »

L’électorat du sénateur avait été séduit par la radicalité d’un programme prônant une couverture sociale universelle, une hausse du salaire minimum, et la gratuité de l’enseignement supérieur. Keith Ellison, un Afro-Américain né en 1963 au sein d’une famille catholique du Michigan, converti plus tard à l’islam, a été le premier de sa communauté élu à la Chambre du Minnesota, puis le premier musulman élu au Congrès, en 2006. Il avait choisi M. Sanders lors des primaires démocrates et bénéficie également du soutien du maire progressiste de New York, Bill de Blasio.

Tom Perez, 55 ans, fils d’émigrés de la République dominicaine, est un avocat de formation qui a occupé des fonctions au sein de l’exécutif de l’Etat du Maryland, un bastion démocrate, puis au ministère de la justice après l’élection de Barack Obama. En 2013, il avait été nommé secrétaire au travail, un poste qu’il a pu occuper après avoir été confirmé par le Sénat au cours d’un vote partisan. Il n’avait été soutenu que par les élus démocrates, alors majoritaire. Soutenu par l’ancien vice-président Joe Biden et par l’ancien attorney general des Etats-Unis Eric Holder, M. Perez est également le candidat d’une série de gouverneurs et de responsables syndicaux. Il dit aussi vouloir imposer un « changement de culture ».

Les deux hommes promettent de résoudre l’équation sur laquelle a buté Mme Clinton en novembre 2016. Les démocrates ont espéré que la transition démographique en cours aux Etats-Unis leur accorderait une marge suffisante pour les élections. En se concentrant sur les minorités, ils ont négligé l’électorat des cols-bleus séduits par le protectionnisme prôné par le républicain Donald Trump. Une approche qui a été fatale en Pennsylvanie, dans le Michigan ou dans le Wisconsin, qui ont scellé la défaite de l’ancienne secrétaire d’Etat.

Convergence de vues

M. Ellison estime que l’alternative entre ces deux messages est « un faux choix ». M. Perez pense tout comme lui que le Parti démocrate doit viser « aussi bien la Californie », où il est triomphant, que « le Missouri » où ses espoirs de conquête au Sénat ont été cruellement déçus.

Cette convergence de vues vaut aussi pour la nécessité de remettre en route une formation politique étouffée par les deux mandats de M. Obama et l’ombre portée du clintonisme, cette troisième voie qui avait inauguré un printemps progressiste étendu à l’Europe, dans les années 1990.

Elle se double cependant d’une hésitation quant à la tactique à adopter face à la nouvelle administration. Pour l’instant, la vigueur de l’opposition de la base démocrate, manifestée au lendemain de la prestation de serment de M. Trump et lors de la controverse sur le décret anti-immigration, a poussé les élus du Congrès dans un affrontement souvent sans nuances, comme l’ont montré la majorité des votes de confirmation.

Contrairement aux républicains, lors des deux dernières années passées par M. Obama à la Maison Blanche, les démocrates n’ont cependant pas les moyens politiques d’une tactique de la terre brûlée, qui ne peut par ailleurs les dispenser d’un effort de réflexion. M. Perez l’assurait en février :

« Pendant la campagne, les électeurs ont trop souvent entendu de la part de l’équipe Clinton le message selon lequel il fallait voter pour elle parce que son adversaire était dingue, ce n’était pas un message positif. »