Le milliardaire Warren Buffett a de nouveau livré un message d’optimisme à l’Amérique. Dans sa lettre aux actionnaires, publiée samedi 25 février, le patron de Berkshire Hathaway a salué le « dynamisme économique » des Etats-Unis, qualifié de « miraculeux ». Une expansion qui a permis aux actions de sa société présente à la fois dans les assurances, le transport ferroviaire ou encore dans une myriade de grandes entreprises comme Coca Cola, Burger King ou Bank of America, d’afficher en 2016 une progression de 23,4 %, soit à peu près le double de celle de l’indice Standard & Poor’s 500. Le bénéfice net quant à lui a atteint 24,07 milliards de dollars, un montant équivalent à celui de 2015.

« En 240 ans soit une période qui représente moins de trois fois le temps de ma présence sur Terre –, les Américains ont allié l’ingéniosité, l’économie de marché, une vague d’immigrés talentueux et ambitieux, et le respect de la loi pour produire une abondance qui a dépassé le rêve des pères fondateurs », écrit le milliardaire philanthrope de 86 ans. Même s’il ne cite pas Donald Trump, M. Buffett lance clairement une pique en direction du nouveau président, qui est en train de préparer un nouveau décret pour limiter l’immigration après s’être heurté à la justice, celle-ci ayant annulé entre-temps un premier texte promulgué le 27 janvier.

Le milliardaire, qui avait appelé à voter pour Hillary Clinton lors de la dernière élection présidentielle, reste confiant dans la capacité de l’économie américaine à croître sous l’ère Trump. Selon lui, les actions américaines vont continuer à se valoriser dans le futur, affirme-t-il, même s’il reste toutefois prudent. « Des chutes sur les marchés financiers vont occasionnellement se produire – et même des paniques – qui vont peser pratiquement sur toutes les actions », reconnaît-il, tout en appelant les investisseurs à ne pas céder à ces paniques.

« Il va pleuvoir de l’or »

« Oui l’accumulation de richesses va s’interrompre de temps en temps, pendant de courtes périodes », estime-t-il, avant d’assurer que le mouvement d’ensemble, lui, « ne sera pas stoppé ». Comme à son habitude, M. Buffett emploie des expressions très imagées pour appuyer son propos : « Chaque décennie ou presque, des nuages noirs vont remplir le ciel de l’économie et brièvement, il va pleuvoir de l’or. Lorsque de telles averses se produisent, il est impératif de se précipiter dehors en portant des bassines, pas des petites cuillères. »

Celui qu’on surnomme l’oracle d’Omaha, du nom de la ville du Nebraska où se situe le siège social de Berkshire Hathaway, semble toutefois préoccupé par la répartition inégale de la richesse, pointant notamment l’endettement excessif des Américains. Même si M. Buffett renouvelle sa foi dans l’économie de marché, il reconnaît au gouvernement un rôle de « redistribution d’une part significative de l’abondance ».

Le milliardaire profite également de sa lettre pour régler ses comptes avec les fonds spéculatifs à qui il reproche de prélever sur le dos des actionnaires des frais de gestion exorbitants. Des pratiques, qui, selon lui, leur auraient coûté plus de 100 milliards de dollars au cours de la dernière décennie. « Lorsque les gens de Wall Street gèrent des milliers de milliards en prélevant des frais élevés, ce sont généralement les dirigeants qui récoltent les bénéfices, pas les clients », écrit M. Buffett.

Un pari à un million de dollars

Le fondateur de Berkshire Hathaway n’a eu de cesse tout au long de ses cinquante ans de carrière de critiquer le mode de rémunération du secteur des fonds spéculatifs, qui prélèvent en moyenne 2 % des actifs qu’ils gèrent et 20 % des bénéfices qu’ils arrivent à dégager. Pour prouver que le jeu n’en vaut pas la chandelle, M. Buffett avait même fait en 2007 un pari à 1 million de dollars avec un hedge funds, Protégé Partners, en assurant que, sur une durée de dix ans, la performance des fonds spéculatifs serait inférieure à celle de l’indice S&P 500. Dans sa lettre, il annonce que le pari est gagné : à l’issue de la période, les premiers n’ont obtenu que 2,2 % par an en moyenne contre 7 % pour l’indice boursier.

Et comme d’habitude avec M. Buffett, tout se finit toujours par une formule savoureuse : « Si mille gestionnaires font une prédiction en début d’une année, il est très probable que l’une d’entre elle au moins sera correcte pendant neuf années consécutives. » Avant d’ajouter : « Bien sûr, mille singes seraient tout aussi susceptibles de produire une telle prophétie apparemment tout aussi judicieuse. Mais il resterait une différence : le singe chanceux ne trouverait pas des gens pour investir avec lui. »