Le chanteur canadien The Weeknd en concert à Amsterdam, le 24 février 2017. | PAUL BERGEN/AFP

Tel le vaisseau spatial des Rencontres du troisième type, une masse fuselée descend du plafond de l’Accorhotels Arena pour s’approcher de la promenade partant de la scène pour traverser la foule parisienne. Surgi d’un petit escalier s’enfonçant dans cette piste d’atterrissage, le Starboy Abel Tesfaye emprunte ce « starship » pour traverser l’Europe, avant de fondre, en mars et avril, sur l’Amérique latine, puis les Etats-Unis, pour la sixième tournée – Starboy : Legend of the Fall – de la jeune histoire de The Weeknd, son alter ego.

Rien n’arrête la trajectoire ascendante de ce chanteur canadien d’origine éthiopienne qui, à 26 ans et en trois albums, est devenu l’un des personnages centraux de la scène R’n’B internationale, célébré pour l’efficacité de ses tubes et une activité sur les réseaux sociaux dopée par sa vie sentimentale (après la mannequin Bella Hadid, The Weeknd s’affiche avec la chanteuse et actrice Selena Gomez).

Le 28 février, dans ce que l’on baptisait autrefois le Palais omnisports de Bercy, l’imposante structure aux allures de véhicule interstellaire pivote et se disloque jusqu’à prendre la forme d’une étoile. Clou scénographique de ce spectacle, ce vaisseau transformiste aux facettes bordées de néons s’accompagne aussi de dépouillement.

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Une agilité vocale roucoulant dans les aigus

Cantonné au fond de scène, un trio d’instrumentistes ne fait pas d’ombre à un chanteur, par ailleurs sobre dans le choix de sa tenue vestimentaire – veste claire aux motifs ton sur ton, sur fond de pantalon et tee-shirt noirs, et une chaîne dorée pour unique breloque. Comme si la variété musicale du répertoire de The Weeknd portait suffisamment de fantaisie pour se passer d’un supplément de décor.

D’abord débuté sur un mode rappé-chanté, se lovant habilement autour de mélodies accrocheuses (All I Know, Party Monster, Reminder, tous tirés de son dernier best-seller, l’album Starboy), le concert peut se corser de rock, d’électro, de house ou de soul, avec un éclectisme revendiquant moins le titre de parrain du R’n’B que celui de roi de la pop. Une couronne ayant longtemps appartenu à Michael Jackson, son idole de toujours.

The Weeknd - Starboy (official) ft. Daft Punk
Durée : 04:34

Du « King of Pop », Abel Tesfaye a hérité d’une agilité vocale roucoulant dans les aigus. Plus « chanteur » que la plupart de ses concurrents, marqués par les effets de l’autotune (ce correcteur numérique devenu la signature vocale de toute une génération), le Canadien pousse parfois cet avantage jusqu’à forcer sur les ballades sirupeuses. Un ton dont on peut se lasser, même si le romantisme presque enfantin du timbre cache souvent des textes sexuellement crus et désabusés.

Doté d’un corps moins svelte que sa voix, The Weeknd bouge avec enthousiasme mais loin de la grâce de Michael Jackson ou de Prince, dont il est aussi un grand admirateur. Les prouesses instrumentales de ce dernier manquent d’ailleurs au trio d’accompagnement, qui mêle un peu laborieusement interprétation live et arrangements numériques.

Le chanteur canadien The Weeknd en concert à Amsterdam, le 24 février 2017. | PAUL BERGEN/AFP

Efficacité

Plus que dans l’émotion de l’intuition, on est ici dans l’exploitation d’une efficacité qui a fait prospérer les tubes depuis le premier véritable album, Kiss Land (2013) et surtout le second, Beauty Behind the Madness (2015).

Le public parisien reprend d’ailleurs en chœur une pléthore de titres, dont les clips ont souvent été vus des dizaines de millions de fois sur YouTube : l’explosif False Alarm (62 millions de vues), Wicked Games (87 millions de vues), l’ultra sensuel Starboy (708 millions de vues) – composé et coproduit avec le duo français de Daft Punk –, le très pop Can’t Feel My Face (751 millions de vues) ou The Hills (qui a dépassé le milliard de vues).

Si Daft Punk n’a pas fait d’apparition sur la scène de l’AccorHotels – les Parisiens s’étant réservés pour la cérémonie américaine des Grammy Awards, le 12 février –, un autre invité, le rappeur texan Travis Scott, a fait se lever les foules en reprenant un de ses hits, le vénéneux Antidote, entremêlé avec Party 4 You, une chanson cosignée avec The Weeknd. Bouillonnants d’énergie, sa danse possédée et son flow hypnotique ont boosté à propos un show qui, malgré sa diversité, aurait pu manqué d’aspérités.

En concert le 22 juillet, à l’Hippodrome de Longchamp, dans le cadre du festival Lollapolooza, 79 €.