Des techniciens installent des relais téléphoniques sur le toit d'un immeuble parisien, le 20 mars 2003. | JACQUES DEMARTHON / AFP

« Maîtriser l’exposition des Parisiens aux ondes électromagnétiques, tout en continuant à faire de Paris une capitale numérique. » C’est le double objectif de la nouvelle charte de téléphonie mobile que la maire, Anne Hidalgo, soumettra fin mars au Conseil de Paris. Il s’agit, précise Julien Bargeton, adjoint aux finances, de trouver « un équilibre entre préoccupations de santé publique et bonne qualité du service de téléphonie mobile ».

Quelque 2 240 antennes-relais sont aujourd’hui disséminées sur les toits de la capitale. Pour encadrer ce secteur, vis-à-vis duquel elle ne possède pas de compétences juridiques, la Ville a signé depuis 2003, avec les trois opérateurs historiques, Bouygues Telecom, Orange et SFR, rejoints en 2010 par Free Mobile, une « charte relative à la téléphonie mobile », renouvelée depuis à plusieurs reprises.

Celle aujourd’hui en vigueur, adoptée en 2012, plafonne à 5 volts par mètre (V/m) l’exposition pour la 2G et la 3G, et 7 V/m pour la 4G. Sachant que la quasi-totalité du réseau est passé à la 4G, la limite actuelle est donc, en pratique, de 7 V/m. La nouvelle charte, issue de neuf mois de « négociation trappue » avec les industriels, selon M. Bargeton, abaisse à 5 V/m le niveau maximal d’exposition dans les lieux fermés, pour tous les réseaux. Soit une réduction de 30 % par rapport aux 7 V/m aujourd’hui tolérés.

Des antennes moins puissantes mais plus nombreuses

En réalité, indique la municipalité, le seuil de 5 V/m n’est aujourd’hui jamais dépassé à Paris, à l’exception de quelques très rares points dits « atypiques ». Sur la période 2013-2015, la moyenne mesurée était de 0,36 V/m dans les lieux de vie en général, avec un niveau un peu plus élevé dans les appartements (0,5 V/m) que dans les écoles et les crèches (0,26 V/m).

La nouvelle norme n’en va pas moins contraindre les opérateurs à s’adapter, d’autant qu’elle s’appliquera aussi à la 5G, dont le déploiement est attendu dans les prochaines années. Pour la respecter, ils devront à l’avenir implanter des antennes-relais moins puissantes, ce qui signifie qu’elles seront plus nombreuses. La charte prévoit aussi que les dossiers d’installation, soumis aux mairies d’arrondissement puis à la Ville, devront être plus détaillés. En outre, le délai de concertation avec les habitants passera de deux à quatre mois.

Cette charte fera de Paris « la métropole la plus protectrice d’Europe », se félicite Mme Hidalgo. A titre de comparaison, Bruxelles, en pointe dans ce domaine, a retenu comme plafond 6 V/m. En tout état de cause, ces valeurs sont très inférieures aux seuils maximaux d’exposition aux champs électromagnétiques fixés en France sur l’ensemble du territoire national, qui s’étagent entre 36 et 61 V/m selon les réseaux.

L’association Priartem (Pour rassembler, informer et agir sur les risques liés aux technologies électromagnétiques) ne partage pourtant pas le satisfecit de la maire. « La limite de 5 V/m est beaucoup trop haute, estime sa présidente, Janine La Calvez. Elle ne correspond nullement à un seuil de protection sanitaire. » Selon elle, il faudrait instaurer « un périmètre de sécurité autour des établissements sensibles, crèches, écoles et collèges ».

Lors de la discussion de la « loi relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques », adoptée en janvier 2015, il avait été initialement prévu que le seuil légal d’exposition en France soit ramené à un niveau « aussi bas que raisonnement possible », soit 0,6 V/m, comme le réclamaient les associations. Mais cet objectif a disparu de la loi.

Mise en garde des agences sanitaires

La députée du Val-de-Marne Laurence Abeille (Europe Ecologie-Les Verts), à l’origine de cette loi, juge pour sa part que « le seuil de 5 V/m, même s’il n’est pas idéal, constitue une belle victoire pour la protection des personnes ». Elle espère que la charte de Paris, qui marque à ses yeux « un jalon extrêmement important », servira de « modèle » à d’autres grandes villes.

La question des effets sur la santé des ondes électromagnétiques reste débattue. Mais, en 2011, l’Organisation mondiale de la santé a classé les radiofréquences comme « peut-être cancérogènes pour l’homme ». Et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail a conclu, dans un rapport de juillet 2016, que ces ondes ont « des effets possibles sur les fonctions cognitives et le bien-être des plus jeunes ».

La charte qui entrera en vigueur en avril prévoit aussi la mise en place d’un observatoire municipal des ondes, réunissant experts, associations et ministère de l’environnement. Il sera notamment chargé de mener des contrôles dans les haltes-garderies, les crèches et les écoles, ainsi que dans les espaces publics.