Benoit Hamon Le candidat du PS souhaite organiser la baisse du temps de travail. Il défend « un travail choisi et non plus subi, un travail partagé et dont la valeur dépasse la seule contribution au PIB. C’est ainsi que nous répondrons au défi de la raréfaction du travail et de la révolution numérique. » D’où l’idée d’un revenu universel de 600 euros au départ ( RSA plus 10 %). D’abord réservé aux ayant droit du RSA, et aux jeunes entre 18 et 25 ans, il serait, à terme, étendu à toute la population pour un montant de 750 euros. Une façon pour le candidat de faire autrement que « régle[r] le chômage à coup de pauvreté. »

Analyse Pour Benoît Hamon, c’est une fatalité. Le travail est voué à se raréfier, voire à disparaître sous la pression de la révolution technologique d’une part, et d’une croissance molle, voire inexistante, d’autre part. Cette rhétorique s’appuie sur une théorie économique reconnue : celle de la stagnation séculaire. Incapables de créer de la croissance à cause du vieillissement de leur population ou d’une consommation qui marque le pas, les pays développés risqueraient de se figer dans leur situation actuelle. Se pose toutefois la question du financement de cette mesure, pour l’instant encore flou. La première étape du disposititif coûterait à elle seule environ 45 milliards d’euros. Si le dispositif était généralisé pour une allocation de 750 euros par personne, il coûterait, selon l’OFCE, 450 milliards d’euros, soit... 22 % du PIB tricolore. La notion même de fin du travail est débattue. Moins de 10 % des emplois existants sont vulnérables et risquent de disparaître dans un contexte d’automatisation et de numérisation, avançait le Conseil d’orientation pour l’emploi, dans une note de janvier. Par ailleurs, si certains postes disparaissent, d’autres, que nous n’imaginons pas encore, émergent, soulignent des économistes.

François Fillon Le candidat Les Républicains souhaite arriver au plein-emploi avec un taux de chômage de 5 % en fin de quinquennat. Pour ce faire, il veut, entre autres, modifier les rêgles d’indemnité-chômage en instaurant la degressivité des allocations, afin d’inciter au retour à l’emploi. François Fillon souhaite, par ailleurs, s’affranchir des 35 heures en supprimant la référence à une durée légale du travail dans la limite des 48 heures par semaine.

Analyse Le chiffre de 5 % de chômage contenu dans le programme du candidat LR paraît particulièrement ambitieux, à la fois au regard des évaluations des éconnomistes mais aussi des projections des autres candidats à la présidentielle. Par ailleurs, en allongeant la durée du travail, M. Fillon considère qu’il peut redonner de la compétitivité aux entreprises et les encourager à embaucher. Pour les économistes, un tel raisonnement n’a rien d’évident. Ils peinent toujours à trancher ce débat vieux de plus de quinze ans, qui donne régulièrement lieu à des querelles de spécialistes. Sur la dégressivité, rien n’indique qu’elle aura nécessairement l’effet incitatif de retour à l’emploi recherché. Elle pourrait même avoir des effets négatifs sur le marché de l’emploi, en incitant les chômeurs les mieux qualifiés à accepter des postes moins-disants. Ce qui aurait un impact négatif sur le niveau général des salaires.

Marine Le Pen Pour lutter contre le chômage, le principal axe de la candidate du Front national (FN) est la « priorité nationale à l’emploi ». Elle propose pour cela une taxe sur l’embauche des salariés étrangers, pour un gain chiffré à 2 milliards d’euros par an. Mme Le Pen veut aussi « soutenir les entreprises françaises face à la concurrence internationale déloyale par la mise en place d’un protectionnisme intelligent et le rétablissement d’une monnaie nationale ».

Analyse La candidate FN n’affiche pas d’objectif précis de réduction du chômage et reste floue sur le financement des mesures pour les demandeurs d’emploi. Mme Le Pen souhaite pérenniser le CICE qui sera fusionné avec l’ensemble des allègements de charges et conditionné au maintien de l’emploi. Elle prévoit aussi de revenir sur la défiscalisation des heures supplémentaires. Une mesure considérée comme peu efficace dans un contexte de croissance faible et de chômage élevé. Sur l’euro, il s’agit de rassurer les retraités, dont le patrimoine serait laminé par un retour au franc, synonyme de dévaluation. Le FN promet que ce processus ne ferait pas grimper outre mesure l’inflation, mais les produits et services importés coûteraient plus cher, de même que les consommations intermédiaires (pièces détachées par exemple) que les entreprises achètent à l’étranger. Il est vraisemblable que les ménages comme les entreprises, inquiets à l’idée de voir la valeur de leurs économies s’effondrer, tenteraient de placer leur argent à l’étranger. Enfin sur le volet recettes, l’essentiel doit provenir d’une taxe de 3 % sur les produits importés, censée rapporter quelque 15 milliards d’euros par an, et d’une « taxe sur l’embauche de salariés étrangers » (2 milliards).

Emmanuel Macron Le candidat d’En Marche vise un taux de chômage à 7% en fin de quinquennat. IL compte étendre l’assurance-chômage aux indépendants et aux personnes démissionnaires (dans la limite d’une fois tous les cinq ans). Son programme prévoit des économies de 10 milliards d’euros sur l’assurance-chômage, sur laquelle il reprendrait la main. Il compte aussi mettre en place un système de bonus-malus sur les cotisations chômage acquittées par l’employeur afin que « ceux qui mettent le plus de personnes au chômage payent le plus ». Comprendre : ceux qui ont le plus recours aux CDD.

Analyse Le programme d’Emmanuel Macron est ambitieux. Il souhaite réaliser une réforme en profondeur de la protection sociale, notamment celle de l’assurance chômage. Le coût d’une telle mesure inquiète certains économistes, même s’il s’avère compliqué à établir tant le comportement des futurs assurés est imprévisible (y aura-t-il plus de démissionnaires, par exemple ?). L’équipe de M. Macron, elle, le chiffre à deux milliards d’euros par an. Autre question : l’objectif de 7 % de taux de chômage en 2022 ( qui explique à lui seul les 10 milliards d’économies contenues dans son programme) est-il réaliste? Une telle amélioration a déjà été observée entre 1998 et 2002. Mais à l’époque les taux de croissance étaient autrement plus élevés. Pour réaliser son programme il faudra aussi convaincre les partenaires sociaux (syndicats et patronat) qui président aujourd’hui aux destinées de l’assurance chômage. Et sont très attachés à leur rôle.

Jean-Luc Mélenchon « Notre politique de relance permettra de créer plus de 3 millions d’emplois soit une baisse du chômage de 9,7 % à 6,2 % de la population active. Un plan d’investissement de 100 milliards d’euros, financé par l’emprunt, sera lancé, auquel s’ajouteront 173 milliards d’euros de dépenses nouvelles, durant le quinquennat. Le salaire minimum sera relevé de 15 %, à 1 326 euros mensuels net pour une personne à temps complet. »

Analyse Le candidat de la France insoumise affiche des ambitions élevées puisqu’il faut remonter à 1981 pour retrouver un taux de chômage de 6,2 %, en métropole. Il veut stimuler l’économie tricolore en soutenant la demande, grâce à un accroissement du pouvoir d’achat des ménages les plus modestes et à la réalisation de grands travaux. Mais ses hypothèses de croissance semblent très optimistes (2 % dès 2018). Tout comme le montant d’économies qu’il entend dégager (68 milliards d’euros) grâce à la lutte contre l’évasion fiscale et à la suppression de dispositifs allégeant les impôts. En outre, les 100 milliards d’euros empruntés au titre du programme d’investissement pourraient alourdir l’endettement, alors même que celui-ci s’avère déjà important, en étant presque égal au PIB. Si les taux d’intérêt s’emballent, la charge de la dette risque de devenir écrasante. Enfin, plusieurs études montrent qu’une nette augmentation du salaire minimum induit des effets négatifs sur l’emploi des personnes les moins qualifiées. Et un gros « coup de pouce » au smic est susceptible d’écorner la compétitivité, déjà insuffisante, des entreprises françaises – donc de leur faire perdre des marchés à l’exportation.