Marie-Martine Schyns est une amatrice de Val-Dieu, bière d’abbaye à haute teneur en alcool. | Jean-Luc Flémal/Belpress/MaxPPP

Pas de chance pour la ministre francophone de l’éducation en Belgique : en l’espace de dix mois, Marie-Martine Schyns s’est fait pincer à deux reprises par la police pour conduite en état d’ivresse. Les tests d’alcoolémie ont révélé un taux de 1,4 g par litre de sang le 14 janvier, sensiblement le même que celui qu’on lui avait trouvé en mars 2016, à la sortie d’une fête dans l’est du royaume – l’intéressée qui aurait égaré le procès-verbal prétend ne plus se souvenir précisément. En Belgique, le taux maximal d’alcool autorisé au volant est de 0,5 g en Belgique.

« On se dit maintenant qu’au lieu de travailler la ministre préfère faire la fête. » Françoise Bertieaux, élue d’opposition

Penaude, l’ex-institutrice a dû battre sa coulpe après les révélations de quotidiens populaires vers lesquels avaient soufflé des vents très favorables, porteurs de cette info croustillante. Devant micros et caméras, elle a dû avouer « mesurer pleinement » son erreur, « d’autant plus grave, ajoutait-elle, si l’on considère la fonction que j’occupe ». La responsable a dès lors présenté ses « excuses les plus sincères ». Membre du Centre démocrate humaniste (CDH), un parti d’inspiration chrétienne, elle a même confessé qu’elle combattrait désormais son faible pour la… Val-Dieu, une bière d’abbaye dont, avoue son créateur, une seule bouteille peut suffire à dépasser le seuil légal autorisé.

Relayée par d’autres médias qui, avec pas mal d’hypocrisie, livraient des détails tout en précisant qu’il s’agissait d’une « affaire privée », l’information tombe au plus mal. Et pas seulement parce que sa dernière infraction a été commise lors d’un « week-end sans alcool », décrété par les pouvoirs publics afin de limiter le nombre d’accidents sur les routes.

Le parfait contre-exemple

Mme Schyns peine, en effet, à concrétiser une vaste réforme de l’école qu’elle se targuait de mener à bien. Son « pacte d’excellence » est critiqué de toutes parts et a peu de chances d’aboutir. « Déjà, on n’avait pas l’impression que quelqu’un était à la barre de cette réforme, et elle avait besoin d’une image forte. On se dit maintenant qu’au lieu d’y travailler la ministre préfère faire la fête », relevait, avec un joli brin de perversité, Françoise Bertieaux dans les cinq quotidiens du groupe Sud Presse. Cette élue libérale, dans l’opposition, soulignait évidemment, elle aussi, qu’il ne s’agissait pas de commenter « des faits qui relèvent de la vie privée ». Mais que sa rivale aurait quand même bien du mal à porter des messages de prévention auprès d’ados invités à boire modérément…

La ministre peut se consoler de ne pas être suédoise. Sinon, elle aurait déjà été poussée à la démission.

« L’éducation, c’est aussi reconstruire sur ses erreurs, je sais que Marie-Martine le fera », a défendu Benoît Lutgen, le président du CDH, qui affirme prendre l’épisode « très au sérieux » et en a parlé avec l’intéressée. « Elle sait que cela ne peut plus se reproduire », précise-t-il. La commission de déontologie de son parti pourrait, qui sait, s’emparer du dossier.

L’Institut belge pour la sécurité routière, déplore, lui, qu’une ministre s’incarne en parfait contre-exemple des campagnes officielles. Les responsables de l’Institut offrent donc à Mme Schyns vingt heures de cours de comportement routier – dits de driver improvement – généralement proposés en tant que peines alternatives à des conducteurs condamnés par un juge.

La seule chance de la ministre est finalement de ne pas être suédoise. Aida Hadzialic a démissionné en août 2016 : ministre de l’enseignement secondaire et grand espoir du parti social-démocrate, elle avait été contrôlée à Malmö avec, dans le sang, un peu plus de 0,2 g d’alcool – soit un verre de vin –, la limite fixée en Suède. La ministre de 29 ans avait dû mettre un terme à sa carrière, en avouant avoir commis « la plus grande erreur de [sa] vie ».