Dominique Tian, député Les Républicains des Bouches-du-Rhône. | AFP/JACQUES DEMARTHON

Le député Les Républicains (LR) des Bouches-du-Rhône, Dominique Tian, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris pour « blanchiment de fraude fiscale » et « omission dans sa déclaration de patrimoine » de 2012 d’avoirs détenus en Suisse.

Une source judiciaire a confirmé, mardi 7 mars, une information du site Mediapart. Le parquet de Paris a délivré une citation directe visant l’élu, qui est également premier adjoint au maire de Marseille et membre de l’équipe de campagne de François Fillon. La date de son procès n’est pas encore connue.

Une enquête préliminaire avait été ouverte après un signalement en avril 2015 par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) sur le cas de cet homme, engagé dans la chasse à la fraude sociale. Il était en 2011 le rapporteur d’une mission parlementaire sur la fraude aux prestations et cotisations sociales.

L’instance chargée de contrôler les déclarations de patrimoine et d’intérêts des élus avait fait état d’« un doute sérieux quant à l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité de sa déclaration de situation patrimoniale adressée en mai 2012 », au moment des législatives.

Interrogé par l’Agence France-Presse en avril 2015, M. Tian avait évoqué un compte en Suisse qui a « fait l’objet d’une régularisation » après la mise en place en juin 2013 par Bercy d’une procédure pour inciter les contribuables détenant des avoirs dissimulés à l’étranger à se présenter spontanément au fisc. Il avait mentionné une somme d’« un peu moins de deux millions d’euros », résultant d’une « opération issue d’un héritage ». Le député avait soumis à la HATVP une nouvelle déclaration de patrimoine en 2014.

Une quinzaine de dossiers transmis à la justice

La Haute Autorité pour la transparence de la vie politique est née de la loi du 11 octobre 2013 sur la transparence, adoptée dans la foulée de l’affaire Cahuzac. Depuis sa création, elle a transmis à la justice une quinzaine de dossiers d’élus ou membres du gouvernement, dont plusieurs ont fait l’objet de condamnations.

Le sénateur LR Bruno Sido, qui avait accepté le plaider-coupable, a notamment été condamné à six mois de prison avec sursis et 60 000 euros d’amende en avril, pour omission dans sa déclaration de patrimoine et blanchiment de fraude fiscale, en raison d’un compte non déclaré en Suisse.

L’ancienne ministre de la francophonie, Yamina Benguigui, a, elle, été condamnée en appel en septembre à un an d’inéligibilité, deux mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende pour des omissions dans ses déclarations de patrimoine et d’intérêts. Elle a fait un pourvoi devant la Cour de cassation.

Qu’est-ce que la HATVP et à quoi sert-elle ?

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique est l’autorité administrative chargée de contrôler les déclarations de patrimoine et d’intérêts des responsables publics français (ministres, parlementaires, conseillers régionaux ou municipaux). La HATVP a été instaurée par la loi du 11 octobre 2013, votée dans la foulée du scandale provoqué par les mensonges de Jérôme Cahuzac, ancien ministre délégué au budget, sur son compte en banque dissimulé en Suisse.

La HATVP remplace la Commission pour la transparence financière de la vie politique, elle-même créée en 1988 à la suite d’un scandale ayant fait naître des soupçons sur le financement du Parti socialiste (l’affaire Luchaire). La loi du 11 mars 1988 prévoyait déjà un contrôle de la situation patrimoniale des membres du gouvernement en leur imposant de renseigner leur patrimoine au début et à la fin de leur mandat, afin de détecter les éventuels enrichissements anormaux. Mais ladite commission disposait de moyens d’action limités.

Pouvoirs élargis

La HATVP possède des pouvoirs élargis par rapport à la commission qu’elle remplace. Elle peut ainsi bénéficier de l’aide des services fiscaux pour contrôler la véracité des déclarations de situation patrimoniale soumises par les élus. La HATVP a également pour mission de prévenir les conflits d’intérêts des membres du gouvernement en contrôlant et vérifiant les déclarations d’intérêts remplies par chacun d’entre eux dès le début de leur mandat.

En cas de conflit d’intérêt avéré, la HATVP possède un pouvoir d’injonction qui lui permet d’imposer à un élu de faire cesser ledit conflit. La loi du 11 octobre 2013 a d’ailleurs donné pour la première fois une définition juridique du conflit d’intérêt, jusque-là absent du cadre légal.

Ces obligations déclaratives ne s’appliquent désormais plus aux seuls ministres et élus : la loi relative à la déontologie des fonctionnaires datée du 20 avril 2016 a élargi cette liste à tous les fonctionnaires « dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient » (le décret d’application donnant la liste précise est attendu pour octobre 2016).