Proche de l’industrie des énergies fossiles, Scott Pruitt a longtemps été un détracteur farouche de cette agence dont il a désormais la charge. | ZACH GIBSON / AFP

Le nouveau patron de l’Agence de l’environnement américaine (EPA), le climatosceptique Scott Pruitt, a pris jeudi 9 mars le contre-pied du consensus scientifique mondial en estimant que les émissions de dioxyde de carbone (CO2) n’étaient pas un facteur déterminant dans le changement climatique, appelant à « continuer d’étudier l’analyse » de l’impact du CO2.

« Je pense que mesurer avec précision [l’impact de] l’activité humaine sur le climat est quelque chose de très difficile et il existe un immense désaccord sur le degré de cet impact. Donc non, je ne serais pas d’accord pour dire qu’il s’agit d’un contributeur important au réchauffement climatique », a-t-il déclaré dans une interview sur la chaîne CNBC.

La très grande majorité des scientifiques dans le monde s’accorde à conclure que la combustion de dérivés du pétrole, de gaz naturel et de charbon, a largement contribué à la forte montée des températures depuis le début de l’ère industrielle et à la fonte accélérée des glaces arctiques. La planète a battu un record de chaleur ces trois dernières années, le mercure atteignant des niveaux sans précédent depuis le début des relevés de température en 1880.

Des scientifiques indignés

Jeudi, le météorologue Eric Holthaus a estimé sur Twitter que M. Pruitt « devrait démissionner », car ses positions « mettent directement en danger notre sécurité ». Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui fait autorité sur ce sujet, « a déterminé que l’accroissement des émissions de CO2 était la principale cause du réchauffement suivi par le méthane, les gaz halogénés et le protoxyde d’azote dont les concentrations ont résulté principalement des activités humaines », précise Kerry Emanuel, professeur de sciences atmosphériques au Massachusetts Institute of Technology.

Depuis sa nomination à la tête de l’EPA et durant ses auditions au Sénat en vue de sa confirmation, M. Pruitt avait fait profil bas, évitant toute déclaration provocante. Il avait notamment reconnu la réalité du réchauffement planétaire tout en soulignant que la part de responsabilité humaine faisait encore débat.

Proche de l’industrie des énergies fossiles, Scott Pruitt a longtemps été un détracteur farouche de cette agence dont il a désormais la charge. Cet ancien procureur général de l’Oklahoma a initié ou s’est joint à quatorze actions en justice contre l’EPA aux côtés d’industriels et de lobbyistes pour bloquer diverses régulations. Notamment celles de l’ancien président Barack Obama destinées à forcer les centrales électriques au charbon à réduire leurs émissions de CO2 et autres gaz à effet de serre.

Selon un document obtenu par plusieurs médias américains, les coupes budgétaires envisagées par M. Pruitt entraîneraient une réduction de 20 % du personnel de l’EPA et élimineraient des dizaines de programmes de protection de l’environnement.

L’accord de Paris critiqué

Scott Pruitt a également dénoncé jeudi le « mauvais accord » de Paris sur le climat. « L’accord de Paris aurait dû être géré comme un traité, il aurait dû passer par une validation au Sénat. C’est inquiétant », a-t-il déploré.

L’entourage du président Donald Trump serait très divisé concernant l’opportunité pour les Etats-Unis de se retirer de cet accord phare, a récemment rapporté le New York Times, avançant qu’une décision pourrait être annoncée très prochainement.

Pendant sa campagne électorale, M. Trump – climato-sceptique lui aussi – avait dit qu’une fois élu il annulerait la participation américaine à cet accord, un des grands accomplissements de Barack Obama. Après son élection le 8 novembre, il avait dit garder « l’esprit ouvert » sur le sujet.

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