Film sur OCS Géants à 20 h 40

L'Eclipse ( bande annonce )
Durée : 02:01

Michelangelo Antonioni (1912-2007) compte parmi les plus grands metteurs en scène du XXsiècle. Mais c’est surtout le cinéaste par excellence de la solitude. Avec une incomparable élégance, son œuvre, très marquée par les romans de Cesare Pavese, tourne autour de l’incommunicabilité, de la déshumanisation de la vie, de l’agression du monde et de l’impression d’effacement du réel.C’est dans la trilogie L’Avventura (1960), La Nuit (1961) et L’Eclipse (1962) qu’éclate tout le génie d’une nouvelle écriture cinématographique, où la géométrisation du cadre souligne le désenchantement des personnages. « Quand tout a été dit, quand la scène majeure semble terminée, il y a ce qui vient après », expliquait Antonioni pour définir sa démarche. D’où son art du champ/contrechamp…

L’Eclipse, Prix spécial du jury en 1962 au Festival de Cannes, est un chef-d’œuvre qui parle de l’éclipse des sentiments, de la séparation des couples, mais surtout de cette incommunicabilité existentielle, symptôme d’une crise de civilisation, qui rend notre monde inanimé.

Alain Delon et Monica Vitti | OCS

« J’étais à Florence en train de filmer une éclipse de soleil. Il y a eu un silence différent de tous les autres, une lumière terne puis l’obscurité et un calme absolu. Je me suis dit que, pendant cette éclipse, même nos sentiments sont en suspens. C’est en partie de là que m’est venue l’idée de L’Eclipse », précisa-t-il…

Dans une Rome géométrique presque déshumanisée, où les objets paraissent des obstacles à toute relation et renvoient à la solitude, on suit les aventures amoureuses de la blonde traductrice Vittoria (Monica Vitti) avec le brun Piero, agent de change (Alain Delon). Sur fond d’agitation et de crise boursière, ces deux-là cherchent, en vain, à repousser l’ennui et à nier la fragilité des sentiments.

Tout les oppose en une symétrie poussée jusqu’au paroxysme par le réalisateur : la poésie silencieuse de l’une, la séduction bavarde de l’autre, le secret intérieur de l’une, la frénésie inutile de l’autre… Le film s’achève sur un rendez-vous où aucun d’entre eux ne se rend, ce qui permet à Antonioni de filmer l’absence avec un plan époustouflant, où, dans un tonnerre musical, un lampadaire s’allume et devient le soleil, symbole de l’effacement du monde naturel au profit des objets. A la même époque, Georges Perec écrivait Les Choses et J.-M. G. Le Clézio L’Extase matérielle. Il ne faut pas y voir un hasard.

L’Eclipse, de Michelangelo Antonioni (It.-Fr., 1962, 118 min). Avec Monica Vitti, Alain Delon.