Une enquête de la de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) lancée en décembre dernier vise le groupe automobile Renault. Les enquêteurs soupçonnent le constructeur d’avoir truqué ses moteurs diesel depuis plus de 25 ans.

Que reproche-t-on à Renault ?

Selon la DGCCRF, Renault aurait installé sur ses moteurs un dispositif qui permet de diminuer les émissions d’oxyde d’azote au moment où le véhicule subit des tests de pollution. En clair, les voitures concernées pollueraient plus qu’indiqué lorsqu’elles sont utilisées dans la vie réelle.

Une information judiciaire a été ouverte le 12 janvier par le parquet de Paris, après une perquisition le 7 janvier au siège du groupe. Cette enquête menée par trois juges d’instruction du pôle santé publique du tribunal de grande instance de Paris vise Renault pour « tromperie sur les qualités substantielles et les contrôles effectués ».

La fraude a été découverte grâce à la commission dite « Royal », du nom de la ministre de l’écologie Ségolène Royal. Mise en place il y a un an, cette commission avait pour objectif de contrôler les voitures françaises après le premier scandale du « dieselgate » qui a ébranlé la marque allemande Volkswagen.

Quels modèles sont concernés ?

Certains des modèles en question figurent parmi les voitures les plus vendues de la marque :

  • la citadine Captur
  • la citadine Clio IV (la voiture la plus vendue en France)
  • la berline Talisman
  • le 4x4 Kadjar

Au total, selon la DGCCRF, pas moins de 898 557 automobiles sont équipées de ces systèmes de dépollution douteux en France.

Parmi les modèles incriminés dans l’enquête sur les moteurs de Renault truqués se trouvent des « best sellers » comme la Clio ou la Captur. | images CC Wikimedia

Que répond le groupe ?

Renault se plaint dans un communiqué d’un traitement médiatique à charge et refuse de détailler le fond de l’affaire. Le groupe affirme tout de même :

« Les véhicules Renault ne sont pas équipés de logiciels de fraude aux dispositifs de dépollution. »

En interne, des employés du groupe disent par ailleurs que les réglages des dispositifs antipollution ont déjà été réajustés ces derniers mois. Cette affaire plonge néanmoins le groupe dans le trouble et menace son PDG, Carlos Ghosn, une figure par ailleurs critiquée pour le montant très important de sa rémunération, 7,2 millions d’euros en 2015.

Quels sont les précédents ?

En 2015 éclatait le scandale des moteurs truqués : Volkswagen avait installé sur plusieurs de ses modèles des dispositifs capables de reconnaître si le véhicule était en test ou sur la route. Ainsi, le système antipollution s’activait uniquement aux moments des tests antipollution. Onze millions de véhicules étaient concernés.

Carlos Ghosn, le PDG de Renault-Nissan. | KAZUHIRO NOGI / AFP

Ce scandale industriel a coûté jusque-là 19 milliards d’euros au groupe allemand dont le titre en bourse a perdu 40 % de sa valeur au plus fort du scandale, et a très sérieusement entaché son image. Et la facture va continuer de s’alourdir, car des procédures judiciaires sont toujours en cours aux États-Unis, en Australie, en Espagne, en France, en Italie, en Corée du Sud… Ce qui représente autant de clients à indemniser.

Pourquoi c’est si grave ?

C’est un sujet plus grave qu’il paraît. Si la tromperie est avérée, cela signifie que les clients de Renault ont été trompés pendant 25 ans sur les voitures qu’ils ont achetées.

Mais surtout, c’est un sujet de santé publique car il est prouvé que la pollution automobile tue. Selon des chercheurs américains, Les moteurs truqués de Volkswagen auraient causé 1 200 morts prématurées en Europe.

Mais au fait… pourquoi truquer les moteurs ?

Tout d’abord parce que cela permet de faire passer un véhicule pour moins polluant qu’il ne l’est en réalité. Ensuite parce que les systèmes antipollution permettent certes de réduire les émissions des voitures, mais elles entraînent aussi une perte de ses performances. Le trucage permet d’offrir au client les meilleures performances tout en faisant semblant de se conformer aux régulations.