Les salariés ont un rapport très positif au travail. Selon l’enquête « Parlons travail » de la CFDT, présentée jeudi 16 mars et réalisée à partir d’un échantillon exceptionnel de 196 925 personnes, 76,4 % des personnes interrogées aiment leur travail. « Au travail, on rigole souvent », assurent 70,5 %, 57,5 % y prennent du plaisir et 55,7 % sont fiers de ce qu’ils font. 39 % indiquent même qu’ils continueraient à travailler s’ils gagnaient au Loto… La CFDT va présenter un « Manifeste pour le travail » après avoir auditionné jeudi Benoît Hamon, François Fillon et Emmanuel Macron (en vidéoconférence depuis Berlin). Marine Le Pen n’a pas été invitée.

Si 76 % des répondants disent avoir des relations cordiales, voire « formidables », avec leurs collègues, ils sont 35 % à juger que leur travail nuit à leur santé. Chez les ouvriers et les employés et ceux qui gagnent moins de 1 500 euros par mois, 40 % estiment que le travail les « délabre ». Globalement, ils sont 51 % à considérer que leur charge de travail est « excessive ». Et 58 % disent ne pas avoir le temps de faire correctement leur travail. Sur le temps de travail, 27 % des répondants souhaitent qu’on ne touche pas à la durée légale hebdomadaire qui n’est pas « le problème » pour 42 %, 17 % veulent la diminuer et 13 % l’augmenter. 75 % des syndiqués de la CGT (et 58 % pour la CFDT) se prononcent pour le partage du temps de travail.

L’idée de tenir compte de la pénibilité dans le calcul de la retraite est plébiscitée par 97 % des répondants. Parmi eux, 44 % affirment ressentir des douleurs physiques à cause de leur travail et 34 % estiment effectuer une tâche pénible. Les « malmenés » au travail, ceux qui ayant fréquemment une faible qualification se plaignent d’effectuer des taches « inutiles, abrutissantes, honteuses ou dénuées de plaisir », représentent 12 % des actifs répondant.

Pouvoir changer de métier

Le mal-être au travail peut venir aussi du manque d’autonomie. Les chercheurs qui ont piloté l’enquête ont élaboré trois critères pour évaluer le degré d’autonomie au travail : une organisation du planning en amont pour pouvoir s’organiser (55 % répondent positivement) ; l’impression de « ne pas être une machine » (65 %) et la possibilité de mettre ses idées en pratique (54 %).

Le mode de management est mis en cause : 62 % estiment que l’absence de manager ne changerait rien à leur travail. 73 % souhaitent participer davantage aux décisions importantes de l’entreprise. L’enquête relève que « la majorité des travailleurs dit pouvoir s’exprimer librement ou contester son chef. Ils ne sont cependant qu’une grosse moitié à pouvoir faire les deux ». La liberté d’expression au travail ne concernerait qu’un actif sur deux et est plus faible pour les femmes.

Pour la CFDT, qui réclame un « partage du pouvoir » dans l’entreprise, « ceux qui souffrent au travail sont ceux qui disent n’avoir aucune liberté pour l’organiser, aucun espace pour s’exprimer, aucun sens à leur activité ». Pour 50 % des répondants, une carrière idéale doit permettre de changer de métier, 47 % privilégiant un parcours sans chômage.

Seulement 29 % des salariés actifs estiment que « les chômeurs sont des assistés ». Les plus précaires et les plus diplômés sont les plus nombreux à ne pas partager ce sentiment. Chez les syndiqués, ceux de la CFTC sont 38 % à porter ce jugement sur les sans-emploi contre 20 % pour ceux de la CGT. 69 % des répondants ne partagent pas l’idée selon laquelle « au boulot, soit tu marches sur les autres, soit tu te fais marcher dessus ».

Une « banque du temps »

L’image du syndicalisme est plutôt positive : 56 % des actifs interrogés affirment qu’un monde sans syndicats serait « l’exploitation pour tous », 36 % jugent que « cela ne changerait rien ». Cette opinion sur l’utilité des syndicats est partagée par 50 % des non-syndiqués et reçoit une large adhésion chez les syndiqués : de 70 % pour la CFTC et la CFE-CGC à 84 % pour la CFDT et 89 % pour la CGT.

La CFDT devait présenter son « Manifeste pour le travail » avec comme fil conducteur, « pour changer la société, il faut changer le travail ». Elle revendique « un rôle renforcé des représentants des travailleurs pour peser sur la stratégie, notamment dans les comités d’entreprise et dans les conseils d’administration des grands groupes », des « contre-pouvoirs effectifs au pouvoir des dirigeants », « la mise en place d’un dispositif de type chèque syndical ». Elle propose aussi de créer une « banque du temps, intégrée au compte personnel d’activité, qui permettrait à chaque travailleur de gérer sont temps de travail tout au long de sa carrière ».