Une première : le Grand prix lycéen des compositeurs, qui couronne chaque année un compositeur de musique contemporaine, a été décerné ce jeudi 16 mars au pianiste de jazz Baptiste Trotignon pour son concerto pour piano Different Spaces. L’œuvre, créée et enregistrée en 2012 par le pianiste Nicholas Angelich et l’Orchestre de Bordeaux-Aquitaine sous la direction de Paul Daniel (chez Naïve), avait déjà valu à son auteur une Victoire de la musique classique dans la catégorie « compositeur » en 2014.

Baptiste Trotignon "Different spaces"
Durée : 05:23

Créé en 2000 par le magazine La Lettre du Musicien, en partenariat avec l’association Musique nouvelle en liberté qui en a seule repris le flambeau en 2012, ce prix est assorti d’une dotation de 9 000 euros qui comprend la rémunération d’une commande pour l’année suivante. Ainsi le compositeur Karol Beffa, lauréat 2016, a-t-il entendu le 16 mars la création mondiale de sa pièce Le Bateau ivre à la Maison de Radio France, avec l’Orchestre national de France sous la direction d’Alain Altinoglu.

Présidé par le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus et dirigé par le romancier, journaliste, homme de radio et musicologue Benoît Duteurtre, le Grand prix lycéen des compositeurs cornaque chaque année quelque 3 000 élèves de seconde, première et terminale. Les œuvres, parues aux disques, sont choisies par un comité de sélection d’une neutralité esthétique garantie, et distribuées dans des établissements scolaires dispensant un enseignement musical, disséminés dans toute la France. Parmi les 97 lycées participants cette année au vote, 28 ont accueilli physiquement les six compositeurs désignés : outre Baptiste Trotignon, l’Italien Francesco Filidei (Puccini alla Caccia), les Français Aurélien Dumont (Eglog), Philippe Hurel (Cantus), Philippe Leroux (Quid sit Musicus ?), et surtout Edith Canat de Chizy, qui a reçu quant à elle le Prix lycéen des professeurs pour Pierre d’éclair, une pièce pour orchestre composée en 2010.

Un éclectisme qui puise aux sources du jazz américain aussi bien qu’aux mélodies israéliennes de son enfance

Bien que les 18 éditions aient distingué des écritures aussi différentes que celles de Thierry Escaich (2002), Martin Matalon (2007), Benjamin de la Fuente (2010), Kaija Saariaho (2013) ou Eric Tanguy (2014), le Grand prix lycéen des compositeurs, un temps soupçonné de flirter avec le néo-tonalisme, a eu du mal à se forger une image plus avant-gardiste. L’arrivée de Baptiste Trotignon, dont l’éclectisme puise aux sources du jazz américain aussi bien qu’aux mélodies israéliennes de son enfance, et qui partage son clavier avec qui bon lui semble (du classique à la chanson, en passant par la musique de film) a mis tout le monde d’accord.

« Je suis à la fois surpris et très honoré de cette distinction, que je prends pour un encouragement à poursuivre dans cette nouvelle voie entrouverte depuis une petite dizaine d’années, commente-t-il par téléphone. Improviser au piano dans le domaine du jazz et écrire de la musique destinée à être interprétée par d’autres instrumentistes, sont pour moi deux facettes complémentaires et tout aussi jubilatoires. » Rendez-vous est d’ores et déjà pris en 2018 pour une nouvelle pièce symphonique signée Baptiste Trotignon.

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