Après l’explosion d’un courrier piégé dans les locaux du Fonds monétaire international à Paris, jeudi 16 mars en fin de matinée, l’enquête « s’oriente » vers la piste de l’ultragauche grecque, a confirmé au Monde une source judiciaire. Un acte aussitôt qualifié « d’attentat » par François Hollande qui y a vu l’occasion de « justifier l’état d’urgence ». Une enquête de flagrance a été ouverte et confiée au parquet antiterroriste. La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a condamné un « acte de violence lâche ».

Selon nos informations, c’est une assistante du bureau Europe du FMI qui a été blessée par l’explosion. Ses jours ne sont pas en danger mais elle a été sérieusement touchée aux mains et au visage, ce qui a nécessité une intervention chirurgicale. Le souffle de l’explosion a pu par ailleurs affecter ses tympans. Le courrier ouvert par l’assistante renfermait un dispositif pyrotechnique sophistiqué composé de « poudre, de produit déflagrant et d’un système de mise à feu électronique », a précisé au Monde une source proche du dossier. Le tout était étudié pour exploser à l’ouverture. Ce dernier a été envoyé par la poste au siège du FMI, avenue d’Iéna (16arrondissement).

Un lien a été rapidement fait avec un autre acte du même type, commis à Berlin, mercredi 15 mars et revendiqué jeudi au matin par le groupe anarchiste grec nommé « Conspiration des cellules de feu ». Le groupe a affirmé avoir envoyé ce colis au ministre des finances allemand, Wolfgang Schäuble, dans le cadre d’un plan visant « le système de pouvoir ». Un plan baptisé du nom de « Nemesis » (« justice » en grec).

Résidus de timbre grec

Il y a un « point de convergence » entre les deux affaires, a confirmé au Monde une source proche du dossier. Même si aucune revendication officielle n’a eu lieu pour l’instant. Le laboratoire central de la Préfecture de police a été dépêché sur place. Les premières constatations ont permis d’identifier des résidus de timbre grec.

La Conspiration des cellules de feu est un groupuscule relativement connu des services de police européens. Apparu en 2008, il s’inscrit dans la mouvance anarchiste et d’extrême gauche toujours active en Grèce. Il a depuis été à l’origine de plusieurs actions violentes, notamment contre la résidence d’un procureur en 2009, contre le tribunal de Salonique ou encore contre le Parlement grec, en 2010.

Le groupuscule a déjà été, par le passé, à l’origine d’une série d’envois de colis piégés à plusieurs dirigeants européens. Parmi eux : Angela Merkel, Nicolas Sarkozy, Silvio Berlusconi, ou encore José Manuel Barroso, président à l’époque de la Commission européenne. Ces colis n’avaient pas fait de victimes. Ils avaient été envoyés à d’autres institutions et ambassades européennes mais avaient pu être interceptés à l’aéroport d’Athènes.

En 2011, plusieurs de ses membres ont été arrêtés et condamnés en Grèce à de lourdes peines de prison. Le groupe a cependant annoncé « son retour » en 2014, et a depuis signé des actions sporadiques, sans faire de victimes, dont une attaque contre les locaux du Parti socialiste grec Pasok, alors au pouvoir dans un gouvernement de coalition. Sa dernière opération revendiquée remonte à octobre 2016 : un engin explosif avait visé le domicile athénien d’une magistrate du parquet.

Un colis piégé explose au siège du FMI à Paris
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