L’énième épisode d’un long feuilleton judiciaire. La cour d’appel d’Aix-en-Provence a tranché en décidant, mardi 21 mars, de ne pas ordonner la démolition de la mosquée de Fréjus (Var), comme le réclamait la mairie Front national (FN), malgré des conditions de construction irrégulières.

L’association El-Fath qui gère la mosquée, son président, Driss Maaroufi, et l’ancien maire (Les Républicains) Elie Brun, qui avait accordé les permis de construire litigieux, ont en revanche été condamnés à des peines allant de 5 000 à 20 000 euros d’amende, nettement moins élevées qu’en première instance.

La cour d’appel d’Aix-en-Provence n’a pas retenu les infractions relatives aux permis de construire, dont le tribunal de Draguignan avait estimé, en février 2016, qu’ils avaient été obtenus frauduleusement grâce à la mairie. Les juges ont simplement estimé que la construction de la mosquée n’avait pas respecté les obligations du plan de protection des risques d’inondation et qu’il n’était pas nécessaire pour autant de détruire le bâtiment.

Bras de fer et Conseil d’Etat

En mars, le tribunal administratif de Toulon (Var) avait jugé illégal le permis de construire de la mosquée de Fréjus. Délivré en avril 2011 à l’association El-Fath, gérante de la mosquée, celui-ci était périmé lorsque les travaux ont commencé. Selon la décision du tribunal administratif, qui avait été rendue publique mercredi 8 mars, c’est cette péremption qui avait « entach[é] d’illégalité » le permis modificatif délivré en 2013 par l’ancien maire.

L’association El-Fath avait, dès lors, décidé de faire appel de la décision. David Rachline, maire FN de Fréjus avait, quant à lui, salué cette décision.

Pour mieux saisir le bras de fer qui oppose le maire FN de Fréjus à l’association El-Fath, il faut revenir à l’été 2015 lorsque M. Rachline rejette la demande d’autorisation d’ouverture de la mosquée pourtant prête à ouvrir ses portes depuis le printemps. L’association saisit alors le juge des référés, qui estime le 17 septembre 2015 que le refus de la municipalité ne se fonde sur aucune base légale. L’élu a alors quinze jours pour réexaminer la demande. Mais, il n’en fait rien.

Le 9 novembre, c’est au tour du Conseil d’Etat de donner huit jours au maire pour ouvrir le lieu de culte. Sans succès. Les fidèles se tournent alors vers le préfet. Après un premier refus, ce dernier finit par parapher l’autorisation d’ouverture. En janvier 2016, la mosquée, qui peut contenir jusqu’à 700 personnes, accueille ses premiers fidèles.

Ouvrir les hostilités

Mais en février 2016, c’est le permis de construire qui est attaqué, sur le plan pénal, devant le tribunal correctionnel de Draguignan. Si la cour refuse de suivre les réquisitions du parquet partisan de la démolition du bâtiment, l’association El-Fath est toutefois condamnée à 60 000 euros d’amende pour avoir construit l’édifice religieux avec un permis périmé et au mépris de certaines dispositions sur les zones inondables.

Le président de l’association, Driss Maaoroufi, est, lui, condamné à 15 000 euros d’amende pour les mêmes faits. Quant à l’ancien maire (Les Républicains) de Fréjus, Elie Brun, il est condamné à une peine de dix-huit mois de prison avec sursis pour la délivrance frauduleuse du permis de construire de l’édifice.

La municipalité FN de la ville, qui s’était portée partie civile obtient 7 500 euros de dommages et intérêts. La commune voisine de Saint-Raphaël, à l’origine de la plainte, se voit, elle, attribuer 1 euro symbolique à la charge de chaque prévenu. A l’époque, Georges Ginesta, le maire Les Républicains de Saint-Raphaël et député du Var, s’enorgueillit auprès du Monde d’être celui qui a déposé le premier recours administratif contre le permis de construire, en octobre 2013. De peur de voir des centaines de fidèles se garer dans sa commune, voisine, le septuagénaire avait alors décidé d’ouvrir les hostilités.