Des migrants à Calais le premier jour de l'opération de démantèlement de la « jungle », le 24 octobre. | ANTONIN SABOT / LE MONDE

Les associations d’aide aux migrants ont enregistré une nouvelle victoire devant la justice dans leur bras de fer avec la mairie de Calais. Le tribunal administratif de Lille a annulé, mercredi 22 mars, les arrêtés visant à interdire la distribution de repas dans certains lieux.

En début de semaine dernière, dix associations d’aide aux migrants avaient déposé un « référé liberté », au nom de la « liberté d’aller et venir et de manifester », contre des arrêtés pris au début de mars par la maire de Calais, Natacha Bouchart (Les Républicains). Ceux-ci interdisaient la distribution de repas sur des emplacements situés dans la zone industrielle des Dunes et le Bois Dubrulle.

Dans son jugement rendu mercredi, le tribunal administratif de Lille ordonne que « l’exécution des arrêtés (...) [soit] suspendue à compter de la notification de la présente ordonnance ». Ainsi, le tribunal considère que « la maire de Calais a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir, à la liberté de réunion » et a fait obstacle « à la satisfaction par les migrants de besoins élémentaires vitaux, au droit à ne pas subir des traitements inhumains et dégradants ».

Mesures « ni adaptées, ni nécessaires, ni proportionnées »

Certes, les juges disent « comprendre le souhait de la commune, soucieuse de préserver ses habitants et leur cadre de vie, isolée et démunie face à cette problématique complexe, de ne pas se retrouver dans la situation éprouvante qu’elle a déjà connue » avec plus de six mille migrants qui étaient présents dans la « jungle » démantelée à l’automne. Mais les mesures prises par la mairie « ont pour effet de priver une population en très grande précarité d’une assistance alimentaire vitale » et « ne sont ni adaptées, ni nécessaires, ni proportionnées au regard du but réellement poursuivi ».

A l’annonce de la décision, les associations ont fait part de leur satisfaction, alors que les distributions de repas n’ont jamais cessé, étant organisées en dehors des périmètres concernés par les arrêtés municipaux. Le Défenseur des droits, qui s’exprimait dans le cadre d’observations soumises au tribunal administratif de Lille, a estimé que « cet arrêté poursuit en réalité un objectif étranger à la sauvegarde de l’ordre public et vise à interdire les distributions humanitaires de nourriture aux migrants ».

Il s’agit du second revers en quelques semaines devant le tribunal administratif pour la mairie de Calais, qui cherche coûte que coûte à éviter tout point de fixation de migrants dans la ville. Ainsi, au début de février, la municipalité n’avait-elle pas hésité à utiliser une benne à ordures pour bloquer le passage de douches modulaires devant un local du Secours catholique dans le centre de la cité portuaire. Cette décision avait déjà été retoquée par le tribunal administratif de Lille.