Brian Chesky, le patron d’Airbnb, était de passage à Shanghaï, mercredi 22 mars, pour annoncer la montée en puissance de son entreprise dans le pays. | STAFF / REUTERS

Airbnb espère réussir là où tant d’autres start-up américaines ont échoué : conquérir l’immense marché chinois. Brian Chesky, le patron de la plate-forme en ligne de réservation d’hébergements, était de passage à Shanghaï, mercredi 22 mars, pour annoncer la montée en puissance de son entreprise dans le pays. Le groupe américain prévoit d’y doubler ses investissements (dont le montant n’est pas public) et de tripler ses effectifs d’ici à la fin de l’année pour atteindre 180 personnes. L’occasion aussi pour le site de s’attribuer un nom chinois : « Ai bi ying », littéralement : « S’accueillir mutuellement avec amour. » « La nouvelle génération de voyageurs chinois veut voir le monde différemment. On espère qu’Aibiying saura les toucher », a déclaré M. Chesky.

Présent en Chine depuis fin 2014, Airbnb a jusqu’ici avancé à pas feutrés. L’application, qui permet de louer son appartement à des particuliers, propose aujourd’hui 80 000 hébergements dans le pays, alors que 5,3 millions de Chinois ont utilisé des logements de la plate-forme dans le monde en 2016.

Réglementation hostile

Comme beaucoup d’acteurs du tourisme, Airbnb lorgne sur un marché en pleine expansion : en 2015, les touristes chinois ont dépensé près de 500 millions de dollars (près de 463 millions d’euros). Reste à convaincre les Chinois d’expérimenter ces nouvelles manières de voyager. Pas évident dans un pays où l’argument du prix compte peu, les hôtels restant bon marché, et où la confiance ne règne pas. « Je n’irai jamais chez un Chinois qui n’a pas déjà beaucoup de commentaires positifs. On ne sait pas sur qui on peut tomber », avoue Jue, une étudiante à Shanghaï qui a eu recours à l’application pour trouver une chambre temporaire.

Les concurrents locaux du groupe américain, Xiaozhu et Tujia, ont déjà pris les choses en main en misant sur la pédagogie. « Il faut du temps pour éduquer les utilisateurs. Derrière chaque propriété mise en location, il y a un gérant d’entreprise », explique Kelvin Chen, directeur de Xiaozhu, au New York Times. Son entreprise, qui compte 140 000 annonces, collabore aussi avec le Département de la censure et le Bureau de la sécurité publique pour chasser les utilisateurs possédant un casier judiciaire. Quant à Tujia, ses 420 000 offres sont pour la plupart gérées directement par l’entreprise, ou par des sous-traitants.

Au-delà du défi commercial, Airbnb devra évoluer dans un environnement réglementaire hostile aux géants américains de la technologie. La plupart des sites Web utilisés dans le reste du monde, comme Google, YouTube ou Facebook, ont été bloqués par la censure en Chine. Dernier échec en date pour la Silicon Valley en Chine, Uber a jeté l’éponge à l’été 2016 après avoir dépensé des milliards dans une guerre commerciale avec Didi, un concurrent local qui a finalement racheté la branche chinoise de l’américain.

Ceux qui restent, comme Microsoft, Yahoo! ou Airbnb, ont dû accepter d’héberger en Chine toutes les données des utilisateurs du pays. L’entreprise a annoncé le changement en octobre 2016 à ses utilisateurs en créant une entité séparée pour la Chine. S’attirer les bonnes grâces des autorités locales est aussi un passage obligé : Airbnb s’est rapproché d’investisseurs locaux, et multiplie les partenariats avec les municipalités (Shanghaï, Canton, Shenzhen), pour promouvoir le tourisme.