Les juges Marc Perrin de Brichambaut, Olga Herrera-Carbuccia et Peter Kovacs à La Haye le 24 mars 2017. REUTERS/Toussaint Kluiters | UNITED PHOTOS / REUTERS

Germain Katanga a été condamné à verser 1 million de dollars (925 000 euros) aux victimes de crimes commis lors de l’attaque du village de Bogoro, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), le 24 février 2003. L’ancien commandant de la Force de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI) a été, en mars 2014, reconnu coupable de « crimes contre l’humanité » et de « crimes de guerre », et condamné à douze ans de prison pour avoir stocké les armes utilisées lors de cette attaque.

Après trois ans de procédure, la Cour pénale internationale (CPI) a ordonné le versement de réparations collectives et individuelles. Les 297 personnes reconnues comme « victimes » par la Cour, après avoir prouvé qu’elles avaient subi un préjudice directement lié aux crimes du condamné, recevront chacune 250 dollars (231 euros) du Fonds pour les victimes, un organisme chargé des réparations. « Ce montant symbolique ne vise pas à réparer le préjudice dans son intégralité », a précisé le juge Marc Perrin de Brichambaut, au cours de l’audience du 24 mars, mais vise à « soulager » les victimes.

Réparations collectives

La Cour a aussi décidé de mettre en place des réparations collectives, permettant d’apporter une aide à l’éducation, à l’activité professionnelle, au logement et un soutien psychologique aux victimes. Symboliquement, Germain Katanga devra participer aux réparations à hauteur d’un million de dollars, mais les juges précisent qu’à ce jour il n’a « ni biens ni avoirs ». Le Fonds pour les victimes, financé par les Etats membres de la Cour et les donations volontaires, règlera donc la facture. Mais l’ex-milicien pourra néanmoins contribuer « en présentant volontairement ses excuses », éventuellement au cours d’une « cérémonie de réconciliation ».

Lors de son procès, le « lion de l’Ituri » avait à plusieurs reprises demandé pardon. Ses avocats s’étaient notamment rendus à Bogoro après sa condamnation, diffusant une vidéo dans laquelle il plaidait la réconciliation. « Il ne faut pas que cette guerre que nous avons vécue nous divise », déclarait-il. Le chef du village avait proposé qu’il revienne à Bogoro une fois libéré, et présente des excuses au nom de la communauté ngiti, son ethnie.

Le procès de Germain Katanga était resté circonscrit aux crimes commis lors de cette attaque et aux divisions ethniques, effleurant seulement les implications des régimes rwandais et ougandais dans cette guerre. A ce jour, les six affaires engagées par la Cour pour les crimes commis dans l’est de la RDC ne donnent qu’une vision partielle des guerres successives qui auraient fait près de 4 millions de morts.

Plusieurs mois d’attente

Transféré à Makala, la prison centrale de Kinshasa, Germain Katanga avait bénéficié d’une remise de peine en janvier 2016, après avoir purgé les deux tiers de sa condamnation. Mais les autorités congolaises ont engagé d’autres poursuites contre lui pour « crimes contre l’humanité, crimes de guerre et participation à un mouvement insurrectionnel. » C’est donc depuis sa prison congolaise, par liaison vidéo, que l’ex-chef milicien a écouté la décision rendue à La Haye. Quatorze ans après les crimes, ses victimes devront encore attendre plusieurs mois avant de bénéficier vraiment de ces réparations. Le temps pour le fonds concerné de mettre sur pied les différents projets, et tenter d’obtenir le soutien des autorités congolaises.