C’est peut-être l’hostilité qu’ont manifestée Emmanuel Macron ou François Fillon face à la gestion paritaire de l’assurance-chômage ou alors la perspective de réformes dont ils ne voient pas l’utilité, qui les ont poussés à avancer. Toujours est-il que patronat (Medef, U2P, CPME) et syndicats (CFDT, FO, CGT, CFTC et CFE-CGC) ont fait d’importants progrès, jeudi 23 mars, lors de la troisième séance de négociations pour une nouvelle convention régissant l’assurance-chômage. Chargés de la gestion de ce régime, ce sont eux qui décident tous les deux ans des règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi mais aussi des montants, et des modalités de cotisations des entreprises.

Réunis en juin 2016 pour la signature d’une nouvelle convention, les partenaires sociaux ont échoué à se mettre d’accord. En cause : l’épineux dossier de la taxation des contrats courts, un point rejeté par le patronat mais que les syndicats voyaient comme une condition sine qua non à la signature d’un accord.

La troisième séance de négociations qui s’est tenue jeudi s’annonçait tendue, tant le projet d’accord, transmis mercredi 22 mars aux syndicats, semblait leur déplaire. Mais les choses se sont améliorées dans l’après-midi. « Nous avons entendu un certain nombre d’objections et nous avons fait plein de gestes », a affirmé Alexandre Saubot, président du pôle social du Medef et négociateur pour l’organisation de l’avenue Bosquet. « Nous sommes contents d’avoir râlé, s’est félicitée Véronique Descacq, chef de file de la délégation CFDT, ils sont revenus dans l’après-midi avec deux ou trois avancées. Et nous avons senti à travers leur expression orale une certaine volonté d’aboutir. »

Parmi les « avancées » dont parle le syndicat réformiste : l’âge d’entrée des demandeurs d’emploi dans la filière senior, que le patronat souhaitait significativement reculer, mais sur lequel il a fait des concessions. Aujourd’hui, un chômeur qui a atteint l’âge de 50 ans bénéficie d’un dispositif spécial lui accordant trente-six mois d’indemnités contre vingt-quatre mois pour le reste des demandeurs d’emploi.

« Grande inconnue »

Jeudi, les partenaires sociaux se dirigeaient vers un accord introduisant la possibilité d’une entrée progressive dans la filière. Selon ce scénario, l’âge minimum ne serait plus de 50 ans mais s’étalerait entre 53 et 55 ans ou un peu plus (l’âge maximum demeure à déterminer mais pourrait aller jusqu’à 58), avec quelques mois ou un trimestre d’indemnités supplémentaires par année. Exemple : un demandeur d’emploi de 53 ans aurait droit à deux ans et un trimestre, quand celui de 54 ans pourrait bénéficier de deux ans et six mois, et ainsi de suite.

Autre concession faite par le patronat, le calcul des indemnités pour les travailleurs enchaînant les contrats très courts. Selon un système de calcul compliqué, une personne qui réalise trois CDD de cinq jours est aujourd’hui mieux indemnisée qu’une autre qui en fait un seul de trois semaines. Sur ce point, le patronat a décidé de se ranger aux propositions de la CFDT et de FO qui permettent de « calculer pour tout le monde pareil, en toute équité » sans aller au moins-disant, a expliqué Mme Descacq.

Reste l’épineuse question de la taxation des contrats courts. « C’est la grande inconnue, a regretté Michel Beaugas, chef de file de la délégation FO, ils vont nous faire attendre jusqu’au dernier moment… » Sur ce point, le patronat proposait d’ouvrir des discussions secteur par secteur, tous n’ayant pas le même usage des CDD. Mais de l’aveu même de M. Saubot, une telle disposition présente quelques « risques de mise en œuvre ». Elle serait même « illégale », expliquent certains, car elle créerait une rupture d’égalité entre les entreprises. Les organisations patronales doivent donc revoir leur copie afin de trouver une solution « moins sectorielle » d’ici à la prochaine séance de négociations. Celle-ci aura lieu le 28 mars, le lendemain d’un conseil exécutif du Medef consacré à la question. « La dernière séance promet d’être houleuse », a prophétisé M. Beaugas.