Des casques bleus à Goma, le 8 novembre 2016. | EDUARDO SOTERAS / AFP

Les effets d’annonce de l’administration Trump se sont une nouvelle fois heurtés au principe de réalité. La Monusco, la mission de l’ONU en République démocratique du Congo (RDC), l’une des plus anciennes et des plus coûteuses avec un budget annuel de 1,2 milliard de dollars (1,1 milliard d’euros), devait faire les frais de la politique « America First » du président Donald Trump, qui avait promis de réduire d’un milliard de dollars sa participation dans les opérations de maintien de la paix.

Mais la Monusco, qui évolue dans un environnement particulièrement troublé et violent du fait du maintien au pouvoir du président Joseph Kabila, échappe à cette purge. Le Conseil de sécurité a voté à l’unanimité, vendredi 31 mars, le renouvellement pour un an de la mission, qui va continuer à opérer avec 16 215 casques bleus maximum, soit à peine 500 militaires de moins sur le terrain que lors du précédent mandat.

Compromis d’affichage

Les négociations ont été « ardues », a convenu le représentant français à l’ONU, François Delattre, qui a subi plusieurs semaines de pression des Américains, qui souhaitaient faire de la Monusco un exemple. Ce dernier avait publiquement appelé sa partenaire américaine à « ne pas jouer avec le feu » en réduisant les forces onusiennes, alors que les violences se sont étendues de l’est de la RDC à la région centrale du Kasaï, où les corps des deux experts indépendants de l’ONU enlevés le 12 mars ont été retrouvés mardi.

Un compromis d’affichage a été trouvé. Grâce à une réduction – fixée à 3 600 personnels – du plafond maximum autorisé de troupes sur le terrain, l’ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley, montre à Washington qu’elle applique les politiques de rigueur. Mais cette baisse reste symbolique puisqu’elle correspond au plafond opérationnel de la mission et non au nombre réel des casques bleus déployés sur le terrain.

« On a parié sur le fait que les Américains ne voudraient pas être vus comme responsables du chaos si les foyers d’instabilité se multiplient à mesure qu’on approche des élections », assure un diplomate. Une Monusco plus mobile et plus efficace doit intervenir en soutien du processus électoral congolais, avec la mise en œuvre des accords dits « du 31 décembre » 2016, pour une transition pacifique du pouvoir entre Joseph Kabila et l’opposition. Mais la résilience du président depuis seize ans à la tête du pays laisse craindre des violences à plus grande échelle.

« Limiter les dégâts »

Le rétropédalage des Américains ne rassure pas pour autant les ONG qui travaillent sur le terrain. « Nous sommes bien sûr satisfaits d’avoir pu limiter les dégâts, assure Stéphanie David, de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), mais on avance au cas par cas et nous sommes inquiets pour les futurs renouvellements de mission. »

Interrogée devant des experts de politique internationale au Council on Foreign Relations (CFR), mercredi 30 mars, Nikki Haley a réaffirmé la volonté du gouvernement américain de réduire de 28 % à 25 % sa participation aux opérations de maintien de la paix, qui s’élève à 7,9 milliards de dollars (7,4 milliards d’euros). L’ancienne gouverneure de Caroline du Sud s’est par ailleurs étonnée que l’ONU collabore avec la RDC, un Etat « corrompu », assurant qu’il fallait avoir « la décence et le bon sens d’y mettre un terme ». Ce langage fort peu diplomatique ne risque pas d’améliorer les relations déjà difficiles entre l’ONU et le pouvoir en place.