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Le travail de sape de Marine Le Pen à destination de l’électorat de droite se poursuit. En meeting devant près de 2 000 sympathisants à Bordeaux, dimanche 2 avril, la candidate du Front national n’a pas pris de détours pour s’adresser à eux.

« Je dis aux gens de droite : ne vous laissez pas abuser par M. Fillon. Il a été premier ministre pendant cinq ans, (…) il n’en est rien sorti. Rien ne le sépare de M. Macron, pour qui, main dans la main avec M. Valls, il appellera à voter au second tour. »

Et la députée européenne d’enfoncer le clou, en jugeant que le candidat du parti les Républicains serait de toute façon « dans l’incapacité d’appliquer son programme ».

« Un programme de sang, de larmes, de privations et de sacrifices, que son crédit personnel lui interdit d’exiger aux Français. »

Le réservoir de voix de l’Ouest

La candidate du FN a arpenté, cette semaine, l’ouest de la France. Une zone qui, en théorie, représente un réservoir de voix important pour la droite. Sa campagne l’a menée aux Sables-d’Olonne, en Vendée, lundi ; en Bretagne, jeudi et vendredi, à la rencontre notamment des agriculteurs ; et donc, dimanche, dans la ville administrée par Alain Juppé.

Marine Le Pen assume cette stratégie, alors que, dans le même temps, M. Fillon apparaît comme obnubilé par le seul Emmanuel Macron.

Bien qu’elle continue à se définir comme « ni de droite ni de gauche », la présidente du FN prépare l’hypothèse d’un second tour l’opposant à M. Macron, durant lequel elle espère convaincre l’électorat conservateur de se prononcer pour elle. Malgré des sondages qui indiquent une forme de tassement – M. Macron lui ravit parfois la tête au premier tour dans les intentions de vote –, elle semble persuadée d’être en capacité de concourir au second tour, le 7 mai.

« Le premier tour n’est rien d’autre que la primaire des candidats du système. Au second tour, l’éliminé des deux appellera à voter pour l’autre. »

Assumer la sortie de l’euro et le « magma postnational »

La candidate frontiste ne remise pas au placard sa proposition d’une sortie de la France de la zone euro, qui représente un véritable repoussoir pour toute une partie de l’électorat de droite. « C’est un couteau planté dans nos cotes pour nous faire aller là où on veut que nous allions », a-t-elle assumé.

Mais elle met l’accent dans le même temps sur des sujets qui rencontrent une forme de consensus au sein des électorats LR et FN, en décrivant un « pays rongé par une crise identitaire et sécuritaire profonde », qui serait menacé par le « magma postnational ».

« Nous ne voulons pas d’une France ouverte à tous les flux humains, financiers, commerciaux, sans contrôles, sans protections, sans frontières. »

Un peu plus tôt, le secrétaire général du FN, Nicolas Bay, avait promis qu’en cas de victoire frontiste, « ceux qui profitent de la France tout en la vomissant seront sommés de la quitter. C’est au risque de disparition de notre nation que nous sommes confrontés ».

Engluée dans les affaires, en particulier celle de l’emploi présumé fictif d’assistants frontistes au Parlement européen, Mme Le Pen s’en est prise avec virulence aux « médias [qui] se déchaînent pour tenter de nous atteindre de leurs flèches venimeuses ».

Mercredi, Le Monde révélait qu’un email envoyé, en 2014, par le trésorier du parti, Wallerand de Saint-Just, à Mme Le Pen se trouvait en possession de la justice. Un document potentiellement gênant, puisqu’il laisse penser que le FN pourrait avoir cherché à faire supporter une partie de sa masse salariale par l’institution de Strasbourg. Et donc par les contribuables européens.

Une accusation dont souffre également François Fillon, qui est soupçonné d’avoir salarié fictivement sa femme et deux de ses enfants. Les points communs ne sont pas toujours là où on croit les trouver.