Des victimes de l’attaque chimique du 4 avril, à Khan Cheikhoun, dans le nord de la Syrie. | AP

Au moins 87 civils ont été tués, dont une trentaine d’enfants, et près de 200 blessés dans un raid aérien mené mardi 4 avril par l’armée syrienne avec des armes chimiques sur Khan Cheikhoun, un bastion rebelle et djihadiste du nord-ouest syrien. Damas a démenti avoir utilisé « toute substance chimique ou toxique », mais l’attaque a provoqué une vague d’indignation à l’ONU et dans les capitales internationales, François Hollande pointant la « responsabilité » de Bachar Al-Assad dans le bombardement.

Parmi les candidats à la présidentielle française, ce raid aérien, et plus largement le soutien au régime syrien, suscite des positions contrastées voire opposées.

  • Nicolas Dupont-Aignan : « Ce qui m’inquiète, c’est de recommencer les erreurs de la Libye et de l’Irak »

« Hier, on parlait d’attaques chimiques présumées, donc, j’attends d’avoir une enquête claire », a déclaré Nicolas Dupont-Aignan, mercredi 5 avril, sur Twitter, à propos de l’attaque aérienne de Damas sur Khan Cheikhoun. Le candidat de Debout la France, favorable à une alliance avec la Russie, prévient : « Ce qui m’inquiète, c’est de recommencer les erreurs de la Libye et de l’Irak. Il faut d’abord connaître la vérité avant d’agir si vite », a-t-il argué sur Public Sénat.

« Si je suis président de la République, ma priorité sera de venger les morts du Bataclan et de Nice en éliminant Daech. Ce n’est pas Bachar Al-Assad qui a tué sur les trottoirs de Paris », a souligné le candidat souverainiste.

  • François Fillon : « Les faits et les responsabilités doivent être établis dans les meilleurs délais »

« Je condamne avec la plus grande fermeté ce crime atroce, a réagi dans un communiqué le candidat de la droite et du centre. Les faits et les responsabilités doivent être établis avec certitude et transparence dans les meilleurs délais. »

François Fillon, qui prône la coopération avec la Russie sur le dossier syrien, a ajouté : « Je renouvelle mon appel urgent à construire une solution militaire et diplomatique à la crise syrienne. L’impuissance des grandes puissances – Etats-Unis, Russie, Union européenne, Turquie, Iran, pays du Golfe – à s’accorder sur une stratégie commune ne peut pas perdurer. Il faut, tous ensemble, vaincre l’Etat islamique et contraindre le régime syrien à se plier à une solution politique durable. La France doit s’engager sérieusement en ce sens. »

Dans ce but, le candidat du parti Les Républicains « souhaite que le Conseil de sécurité des Nations unies sanctionne le régime de Bachar Al-Assad ». « La réédition de l’affaire irakienne ne me paraît pas être une bonne solution », précise celui qui, dans son programme, assurait pourtant être prêt à développer « des contacts avec tous ceux qui luttent contre la menace terroriste, y compris si nécessaire avec les autorités en place ».

  • Benoît Hamon : « La France doit avoir une position absolument inflexible » (Aurélie Filippetti)

Benoît Hamon n’a pas fait de déclaration sur le raid aérien à Khan Cheikhoun. Mais Aurélie Filippetti, porte-parole du candidat socialiste, s’est montrée très critique, mardi sur Public Sénat, n’hésitant pas à condamner « la complaisance vis-à-vis de Bachar Al-Assad et vis-à-vis de son allié, Vladimir Poutine », dont feraient preuve François Fillon, Marine Le Pen et, « dans une certaine mesure », Jean-Luc Mélenchon. « On voit Bachar Al-Assad et son allié Vladimir Poutine commettre des crimes contre l’humanité, des crimes contre leur peuple (…), on l’a vu, avec des armes chimiques interdites, et ça, la France doit avoir une position absolument inflexible », a affirmé Mme Filippetti, qui a souhaité que Jean-Luc Mélenchon « condamne ce qui s’est produit en Syrie et (…) condamne l’alliance de Vladimir Poutine avec le dictateur Bachar Al-Assad ».

  • Marine Le Pen : « Le seul rempart contre Daech, c’est Bachar Al-Assad » (Nicolas Bay)

« Cette attaque chimique est un crime de guerre. Il restera à déterminer par qui il a été commis. Il n’y a pas à ce stade de certitude. Attendons qu’une enquête ait lieu, la plus impartiale possible pour déterminer les responsables », a déclaré Nicolas Bay, mardi, sur France 5.

Le secrétaire général du Front national a toutefois ajouté que « le seul rempart efficace sur le terrain contre Daech, [c’était] malgré tout le régime de Bachar Al-Assad », précisant que, si le régime syrien était « sans doute très critiquable », il fallait « s’associer » à Assad pour « éradiquer » Daech. Marine Le Pen, elle, n’a pas fait de déclaration après l’attaque chimique sur Khan Cheikhoun. Mais la dirigeante frontiste, qui n’a jamais dissimulé sa proximité avec Vladimir Poutine, s’est toujours montrée en faveur d’un rapprochement avec Moscou en matière de politique étrangère.

  • Emmanuel Macron : Assad devra « répondre de ses crimes devant des tribunaux internationaux »

« Je condamne fermement les attaques chimiques en Syrie », a dénoncé Emmanuel Macron mercredi sur Twitter, estimant que Bachar Al-Assad devra « répondre de ses crimes devant des tribunaux internationaux ». « Je suis opposé aux valeurs, aux actions conduites par Bachar Al-Assad. Je les condamne, a-t-il ajouté. Cette attaque au gaz chimique (…) contrevient à toutes les règles de droit international et cela contrevient, bien évidemment, à ce qu’un dirigeant doit à son peuple. »

S’il est élu président, le candidat d’En marche ! précise que, sur le dossier syrien, il aurait « constamment la même politique ». « Notre ennemi, c’est Daech, a-t-il ajouté, et l’ensemble des groupes djihadistes qui fomentent des attentats et nous menacent. L’ennemi du peuple syrien, c’est Bachar Al-Assad », a conclu M. Macron.

  • Jean-Luc Mélenchon : « Qui que ce soit qui ait commis le crime, il doit être châtié »

Jean-Luc Mélenchon a réagi sur Twitter : « Qui que ce soit qui ait commis le crime, il doit être châtié. L’accord mondial de 93 sur les armes chimiques doit s’appliquer partout, par tous. »

Dans son programme présidentiel, le candidat de La France insoumise précise vouloir « mettre en place une coalition universelle sous mandat de l’ONU pour éradiquer Daech, rétablir la paix et la stabilité en Syrie et en Irak, associant les combattants kurdes ». Le candidat, qui a toujours défendu l’idée d’une coopération avec la Russie en matière de politique étrangère – « les intérêts de la France, c’est de s’entendre avec la Russie » –, appelle en outre à un règlement « politique » de la situation en Syrie, insistant sur le fait que « c’est au peuple syrien de décider de son destin ».

  • Les autres candidats

Parmi les autres candidats, Nathalie Arthaud, la candidate de Lutte ouvrière, a dénoncé, jeudi 6 avril sur LCP, « l’horreur et la dictature de Bachar Al-Assad sur son propre peuple » mais également « la politique [étrangère] française, américaine et russe ».

Jacques Cheminade a déclaré ce jeudi, sur France 2 : « On parle avec tout le monde, même Bachar Al-Assad, en se “bouchant le nez” », ajoutant : « C’est une intervention de tous qu’il faut en Syrie, pas seulement de Donald Trump. »

Jean Lassalle, Philippe Poutou et François Asselineau n’ont pas fait de déclarations après l’attaque.