Cendrine Le Locat, en novembre. | Didier Olivré pour « Le Monde »

« Il faut être capable d’impulser un projet, puis de le coordonner en s’appuyant sur les bons services et les bonnes personnes » : c’est ainsi que Cendrine Le Locat, 45 ans, décrit sa fonction. Elle est en effet responsable développement durable et responsabilité sociétale (DDRS) au sein de l’école d’ingénieurs Télécom Bretagne, qui compte des campus à Brest, à Rennes et à Toulouse. Le rôle de ces professionnels, de plus en plus nombreux au sein des établissements de l’enseignement supérieur est, d’une part, de développer l’apprentissage du développement durable et de la responsabilité sociétale, mais aussi de favoriser le respect de ces principes au sein de leur structure.

Aujourd’hui, environ 120 personnes exercent cette fonction au sein des établissements du supérieur, estime Gérald Majou, chargé de mission développement durable à la Conférence des grandes écoles. « Dans les années 2005-2006, ils étaient une petite trentaine de précurseurs. Puis, avec le Grenelle de l’environnement et l’évolution réglementaire qui en a découlé, de plus en plus d’établissements ont compris l’intérêt de nommer des personnes pour coordonner leurs politiques de développement durable », explique-t-il.

« Un pouvoir d’influence et de conviction »

Pour cette fonction nouvelle, les contours sont loin d’être gravés dans le marbre : « Les missions peuvent varier énormément d’un ­établissement à l’autre », souligne Cendrine Le Locat, qui estime pour sa part que 50 % de son temps est consacré à favoriser l’enseignement du développement durable dans les différentes disciplines de la formation d’ingénieur. Elle anime, pour cela, un comité de pilotage qui rassemble des enseignants-chercheurs de Télécom Bretagne, afin de ­réfléchir à la manière d’inclure cette dimension dans leur cours. Et elle assure elle-même des enseignements au sein de ­différentes années.

« Je n’ai pas de pouvoir hiérarchique, mais un pouvoir d’influence et de conviction », insiste-t-elle. Elle en use pour que le développement durable continue d’être pris en compte dans les enseignements du futur Institut Mines-Télécom Atlantique, l’établissement qui verra le jour en 2017, après la fusion de Télécom Bretagne avec l’Ecole des mines de Nantes.

L’une de ses plus grandes satisfactions ? Avoir milité pour rendre obligatoire un cours consacré au développement durable et à la responsabilité sociétale en première année. Depuis cinq ans, à raison de trente heures sur l’année entière, les élèves ingénieurs qui entament leur cursus sont ainsi sensibilisés à ces thématiques. Le cours aborde, entre autres, des questions comme la raréfaction des ressources naturelles, le changement climatique, mais aussi l’éthique de l’ingénieur ou la diversité dans l’entreprise. « L’idée est d’amener les futurs ingénieurs à se projeter et à être en mesure, plus tard, d’évaluer l’utilité sociale et environnementale de leur travail », précise-t-elle.

« Faire avancer les choses »

Si le volet gestion environnementale des sites est piloté par les secrétaires généraux de chaque campus, c’est Cendrine Le Locat qui se charge de l’autoévaluation annuelle « plan vert », une obligation. Ce référentiel, mis en place en 2009 avec la loi Grenelle 1 sur l’environnement, permet de s’assurer que les établissements du supérieur mettent bien en place des démarches de développement durable.

« Mon rôle est aussi d’œuvrer à une transformation culturelle pour que les bonnes pratiques soient adoptées sur un maximum de campus »

Elle a également monté pour Télécom Bretagne le dossier en vue de l’obtention du label « Développement durable et responsabilité sociale », une appellation récente, lancée en 2015, qui permet elle aussi de reconnaître l’engagement de l’école dans le domaine. Réduction des émissions de CO2 sur ses campus, important travail paysager avec la plantation d’espèces endémiques et la suppression des engrais chimiques, ou encore développement de thèmes de recherches liées au développement durable… L’établissement a en effet multiplié les initiatives, dès 2006. Verdict en décembre.

« Au-delà de ma fonction dans l’école, mon rôle est aussi de contribuer à une évolution de l’enseignement supérieur sur ces questions, d’œuvrer à une transformation culturelle pour que les bonnes pratiques soient adoptées sur un maximum de campus », dit aussi celle qui a par ailleurs participé à l’élaboration de ce label au plan national.

Et son parcours avant d’occuper ce poste ? « Il n’a rien d’une ligne droite, ce qui est un atout, car il faut être capable de porter des projets transverses. » Titulaire d’un DESS (master) en management, obtenu à l’université d’Evry-Val d’Essonne, elle est embauchée comme chargée de communication par Télécom Bretagne en 2003, après avoir travaillé dans le domaine de la formation et du management.

Quand l’établissement ouvre un poste de responsable DDRS en 2010, elle se porte immédiatement candidate. « Sans être une militante écologiste, j’avais envie de donner davantage d’utilité sociale à mon travail, de faire avancer les choses », raconte cette passionnée de yoga, qu’elle enseigne également sur le campus de Brest.