Alain Juppé devant une affiche de François Fillon à Bordeaux le 16 février. | NICOLAS TUCAT / AFP

Pour la première fois depuis le début des « affaires Fillon », Alain Juppé s’affichera, mercredi 19 avril, aux côtés du candidat des Républicains à l’élection présidentielle. Tous deux doivent visiter le siège de la plate-forme de musique Deezer, à Paris, à 11 heures. Ils ne s’étaient plus montrés côte à côte depuis le 25 janvier, date des premières révélations du Canard enchaîné sur des soupçons d’emplois fictifs entourant les activités de Penelope Fillon en tant qu’attachée parlementaire de son époux. Mais le rabibochage affiché des deux finalistes de la primaire de droite à quatre jours du premier tour masque mal les divisions des deux hommes.

Le 6 mars, c’est avec des mots très durs qu’Alain Juppé avait dénoncé « l’obstination » de François Fillon dans cette campagne, quelques jours avant la mise en examen du candidat à la présidentielle. La ligne de défense de M. Fillon l’a conduit « dans une impasse », avait renchéri le maire de Bordeaux, qui avait également fustigé un « noyau de militant Les Républicains […] radicalisé ». La hache de guerre était déterrée entre les deux finalistes de la primaire, mais pas question pour Alain Juppé de se présenter en remplaçant. « Pour moi, il est trop tard », concédait-il.

Meeting commun impossible

Depuis, le maire de Bordeaux n’avait plus pris la parole dans la campagne, jusqu’au 7 avril où, emboîtant le pas à Nicolas Sarkozy, il avait laconiquement « confirmé [s]on soutien » à un candidat « expérimenté » pour un « monde […] dans la tourmente ».

Pour afficher un camp rassemblé, Xavier Bertrand, président de la région des Hauts-de-France, s’était même pris à appeler à un meeting commun de M. Fillon avec MM. Juppé et Sarkozy. Un scénario devenu inenvisageable face aux risques que le maire de Bordeaux essuie les sifflets de militants.

Juppé « dans l’opposition » à Sens commun

Reste qu’en coulisse les divisions sur le fond sont toujours grandes. Dernière pomme de discorde : l’annonce de François Fillon sur la place qu’il est prêt à accorder à des membres de Sens commun, émanation de La Manif pour tous, dans son gouvernement. Selon Le Canard enchaîné daté de mercredi, Alain Juppé aurait déclaré mardi à ses proches qu’il ne soutiendrait pas un gouvernement « dont la ligne serait dictée par Sens commun ». « C’est simple, je serai dans l’opposition », aurait-il ajouté. Une ligne sur laquelle ses proches lieutenants se sont ouvertement alignés. Pour Dominique Bussereau, député de la Charente-Maritime, la présence du mouvement dans un gouvernement « serait une faute », a-t-il prévenu sur Twitter.

Sur France Inter mardi matin, Jean-Pierre Raffarin, soutien de M. Juppé lors de la primaire, s’est, lui, prudemment rallié à cette position. « Je veille à ce que les principes républicains soient respectés, c’est pour ça que, comme Alain Juppé, je ne souhaiterais pas que Sens commun dicte sa ligne au gouvernement », a déclaré le sénateur de la Vienne.

« Je souhaite que personne ne dicte une ligne autre que celle du projet de François Fillon pour lequel je vote […] pas plus les cathos ou les francs-maçons. »

« Pour François Fillon, c’est son projet qui dictera la ligne politique de son gouvernement », a-t-il ajouté, insistant toutefois sur le fait qu’il ne souhaitait « diaboliser ni Sens commun ni les adversaires de Sens commun ».